Nous n'avons pas de quoi payer les salaires de novembre.» Cette phrase grave aurait été prononcée par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, lors d'une rencontre, organisée mardi, avec ses partenaires.Cet aveu remet au goût du jour l'éternel débat sur les effectifs de la Fonction publique, supposément pléthorique, et la capacité de l'Etat à assurer convenablement leurs salaires.
Les effectifs de la Fonction publique s'élevaient au 31 décembre 2014 à 2 020 172 fonctionnaires et agents contractuels, selon les chiffres de la Direction générale de la Fonction publique (DGFP). La répartition de ces effectifs, selon la nature juridique de la relation de travail, se présente comme suit : fonctionnaires :
1 608 964 agents (soit 79,64% des effectifs globaux), contractuels : 411 208 agents (20,36%), précise la même source. Ces chiffres sont-ils importants ' «On est au-dessus de la moyenne européenne pour certains corps et en dessous pour d'autres. Même dans le voisinage, on fait office de fausse note», résume l'expert financier Ferhat Aït Ali.
Selon Abdelkader Fatmi, membre du syndicat Snapap Cgata, «le secteur est certes désorganisé, mais il reste utile puisque c'est grâce aux fonctionnaires que le service public est assuré.» Depuis plusieurs années, les fonctionnaires se plaignent des retards dans le versement de leurs salaires, particulièrement les contractuels qui représentent au moins 20% du total des effectifs.
Avec le contexte difficile, la déclaration d'Ouyahia laisserait penser que l'Etat ne pourrait plus payer les salaires de ses fonctionnaires. Ferhat Aït Ali affirme que les fonctionnaires coûtent toute la fiscalité ordinaire par année, sans inclure les militaires. «En tout, ils (fonctionnaires) reviennent à 2600 milliards de dinars, prestations incluses», relève l'expert qui affirme que l'Etat peut payer pour 65% de ses engagements, mais il doit imprimer les 35% restants. Au Snapap, on préfère parler de mauvaise gestion que de manque de ressources. «Les retards dans le versement des salaires sont surtout affaire de mauvaise gestion et non pas d'austérité, comme cela est avancé. Il y a par exemple tous les communaux qui n'ont pas touché leurs dus depuis 13 mois.
Mais il y a surtout le 1 million de contractuels qui ne sont pas payés régulièrement. S'ajoutent à cela les salaires scandaleux en dessous du SNMG (18 000 DA, ndlr)», s'offusque la secrétaire nationale chargée de mission auprès du secrétariat général du Snapap-Cgata, Meghraoui Yamina. Pour M. Fatmi, membre du Snapap, par des déclarations comme celles prêtées au Premier ministre, les pouvoirs publics «veulent effrayer» les fonctionnaires. «Ouyahia, chef de gouvernement en 2006, a fait des déclarations similaires. Il a été remercié. Abdelaziz Belkadem qui l'a remplacé a réformé le statut général de la Fonction publique (06-03) et a fait adopter les statuts particuliers. Et maintenant, le pouvoir a fait appel au même Ouyahia», rappelle le syndicaliste.
Départs massifs à la retraite !
Contexte de crise oblige, les autorités ont décidé de ne pas renouveler les contrats de certaines catégories de fonctionnaires et de ne plus remplacer les départs à la retraite. «En juillet 2017, il a été annoncé que les contrats de pré-emploi ne seront pas renouvelés. Il existerait 900 000 contrats de ce genre», regrette M. Meghraoui. Ces derniers mois, il y a eu, affirme la chargée de mission du Snapap, une «saignée» de la Fonction publique» due aux départs massifs à la retraite provoquée par l'annonce de l'abrogation de l'ordonnance 97-13 modifiant et complétant la loi n° 83-12 du 2 juillet 1983 relative à la retraite. «Il y a eu presque 50% de départs à la retraite de fonctionnaires à qui il restait 2 ou trois ans pour atteindre l'âge de 60 ans. Excepté des secteurs comme la santé ou l'éducation, les départs ne sont pas remplacés, signale M. Fatmi.
Et même dans ces mêmes secteurs, certains emplois sont laissés sans titulaires formés pour le poste. Dans la santé, par exemple, pour les postes de chauffeurs partis à la retraite, l'administration préfère recourir à des appariteurs ou des gardiens des APC sans qualification. La situation est délicate dans ce secteur où le personnel qualifié de médecins et autres part en masse à la retraite.
Il n'y aura à terme que des aides-soignants qui n'ont pas été convenablement formés.» Selon Yamina Meghraoui, le chômage touchera plus particulièrement les femmes. «Le chômage féminin prend de l'ampleur en situation de crise puisque des recrutements sont fermés aux femmes dans certains secteurs comme le bâtiment, l'agriculture», signale la syndicaliste qui affirme que le Snapap-Cgata compte réunir son conseil national avant fin septembre pour discuter de ces questions.
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Posté Le : 14/09/2017
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Nadir Iddir
Source : www.elwatan.com