Partout dans les pays de la rive nord de la Méditerranée, des appels à la mobilisation générale et au don de soi ont été lancés depuis début juin par nombre d’organisations de défense de la nature, des écologistes et des scientifiques pour lutter contre la négligence environnementale qui accompagne chaque saison estivale.
Leur mot d’ordre: «Sur les plages qu’elle fréquente, chaque personne devrait être responsable de ne laisser derrière elle que ses empreintes.»
Et pour cause, cette négligence a fait de la mer Méditerranée un vaste dépotoir à ciel ouvert: 1.000 à 3.000 tonnes de déchets plastiques, fait ressortir une étude réalisée en 2015 par des chercheurs de l’université de Cadiz (Espagne).
Un volume beaucoup plus important de fragments de bouteilles, de sacs, d’emballage et de fils de pêche y flotte à la surface, d’après «Ecologistes en action», un réseau fort de quelque 300 groupes écologistes activant dans tout le royaume: outre les retombées au plan économique de la pollution de l’environnement marin y découlant, «les déchets que nous ne collectons pas finiront au large avec les conséquences connues qu’ils ont sur le milieu marin: ne jamais disparaître, provoquer la mort de nombreuses espèces animales et végétales et même atteindre nos plaquettes à travers la chaîne alimentaire», met-on en garde.
Raison pour laquelle il faut réveiller la conscience collective et sensibiliser sur tous ces dangers et tant d’autres en multipliant les actions à l’adresse des populations habitant le long du littoral méditerranéen et des acteurs de l’économie maritime (pêcheurs, armateurs et gens de mer) qui empruntent ces routes est l’objectif que se sont assignés les initiateurs du projet baptisé «Plastic Odyssey» et dont le ce coup d’envoi a été donné il y a quelques jours avec la mise à l’eau du navire démonstrateur Ulysse, apprend dans un communiqué, publié le week-end passé, par «Armateurs de France».
La finalité de cette louable initiative, portée par des jeunes officiers de la marine marchande française, militant pour un «océan sans plastique», étant de réaliser une expédition de trois ans autour du monde à bord d’un catamaran, propulsé uniquement grâce aux déchets plastiques.
Outre le défi technique qu’elle représente, cette expédition aura également une vocation pédagogique visant à encourager les populations au recyclage des déchets plastiques et d’envisager des solutions innovantes adaptées aux besoins locaux pour les revaloriser, est-il souligné dans le document d’Armateurs de France, une organisation regroupant l’ensemble des entreprises de transport et de services maritimes de l’hexagone.
D’autant que les 10 millions de tonnes de plastique englouties chaque année par l’océan ont favorisé l’émergence d’un «7e continent», déplore-t-on.
Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg: à peine 1% des déchets plastiques composant ce continent flotte à la surface, alors que les 99% restants atterrissent dans les fonds ou se décomposent en micro-particules. Invisibles à l’œil nu, elles deviennent impossibles à collecter et finissent par s’infiltrer dans la chaîne alimentaire.
Et pas que. Les effets environnementaux s’avèrent être des plus dévastateurs: «Plus de 100 millions de mammifères marins meurent chaque année d’ingestion de plastique. Les mammifères marins et poissons ingèrent des fragments de plastique qui, lorsqu’ils sont trop volumineux, entraînent leur mort. En prime, le plastique agit comme une éponge et absorbe tous les produits chimiques nocifs pour l’environnement marin. Certains plastiques contiennent du bisphénol et des phtalates, classés comme substances cancérogènes et reconnus comme étant des perturbateurs endocriniens et nuisibles au développement du fœtus», prévient l’équipe d’océanologues et de scientifiques, participant à la Plastic Odyssey.
Par ailleurs, les dégâts occasionnés, du point de vue économique, par la non-récupération/recyclage du plastique assaillant l’environnement, se font de plus ressentir: pas moins de 120 milliards de dollars de perdus chaque année.
Surtout que produite en continu, cette matière première épuise les réserves pétrolières, l’industrie plastique absorbant, à elle seule, 8% de la production pétrolière mondiale.
L’Algérie, gros importateur de plastique
Et qu’en est-il de l’Algérie, pays pétrolier par excellence et l’un des plus grands consommateurs, toujours en appétit féroce, de plastique à l’échelle planétaire? A-t-on pensé à chercher les solutions de transition appropriées aux fins de valoriser les milliers de tonnes de déchets et faire en sorte qu’ils ne finissent plus leur vie dans le large?
«Pas encore.Ce n’est, semble-t-il, pas, pour le moment, à l’ordre du jour de l’agenda économique, ni l’une des priorités majeures aux yeux des pouvoirs publics», s’accordent à dire des scientifiques interrogés, comme le Dr Mohamed Tahar Aïssani, spécialiste en anatomopathologie et médecine de l’environnement et Ali Halimi, président de l’Association nationale pour la protection de l’environnement et la lutte contre la pollution (Anpep).
En attendant, l’invasion inquiétante de notre littoral par le plastique risque de s’exacerber et les dommages y résultant, au double plan environnemental et économiques, pourraient s’aggraver davantage.
Pays de tous les paradoxes, et c’est, une fois encore, le cas de le penser. Longue de quelque 1.200 km, la côte algérienne forme une véritable mosaïque naturelle: plages sablonneuses bordées de végétation, criques rocheuses, estuaires, fleuves côtiers, vallées, îles, anses, presqu’îles…
Mais devant les yeux des millions d’estivants qu’elle draine chaque année, la variété du paysage qui défile se dévoilera sous une forme beaucoup moins captivante eu égard aux amas d’ordures et autres détritus échoués sur le sable et aux masses flottantes de plastique assaillant les plages, les oueds et les rivières.
Un cocktail de mégots, de bouteilles et de sachets en plastique, surtout, laissés sur place ou jetés dans la mer, tout au long de l’année, surtout en été.
En plus des graves atteintes à l’environnement et à l’écosystème dans son ensemble, ces déchets, économiquement parlant, pèsent très lourd. Aux dernières statistiques (juillet 2017) établies par des scientifiques-chercheurs de l’Anpep, chaque année, ce sont pas moins de 280.000 tonnes de déchets solides, dont plus de la moitié constituée de plastique, sont larguées dans la nature, à travers tout le territoire national.
Pis, le plastique représente, à lui seul, 60 à 80% des déchets déversés dans le milieu marin. Ainsi, la grande illusion du recyclage fait perdre au moins 8,64 milliards DA/an à l’Algérie qui, plus est, doit son très peu enviable titre de cinquième ‘‘puissance’’ mondiale en matière de consommation de sacs en plastique, après les Etats-Unis d’Amérique, le Maroc, la France et l’Australie, aux 6,5 à 7 milliards de sacs en plastique, bon an, mal an, utilisés. En somme, les produits en plastique ont décidément de plus en plus la cote auprès des Algériens.
On pourrait presque croire qu’ils ont tendance à y devenir accros. En témoignent encore les données statistiques émanant, cette fois-ci, de l’Association européenne des fabricants de machines en plastique et en caoutchouc (Euromap): au cours des dix dernières années, la consommation du plastique par tête d’habitant a bondi d’environ 9% par an, passant de 10,0 kg en 2007 à 23,1 kg en 2017 et est estimée à 25,8 kg en 2020.
La consommation du pays ayant donc augmenté de 11% par an, au cours de la période sous revue, elle a presque triplé, passant de 338.000 t à 955. 000 t. Notre pays est également le plus grand importateur de plastique sous forme primaire, à l’échelle africaine.
Vu que tous les achats de matières premières plastiques à l’international, lesquels ont, entre 2007 et 2015, évolué de 13% par an, passant de 304.000 à 817.000 t, s’effectuent essentiellement au Moyen-Orient, en Asie ainsi qu’en Europe, notre industrie plastique jouirait, aux yeux de l’Euromap, d’un un fort potentiel d’exportation.
Malheureusement, la valorisation à travers la réutilisation ou encore le recyclage des déchets plastiques devrait, apparemment, attendre encore un peu. Et le moyen le moins coûteux et plus facile de s’en désencombrer reste le largage dans la nature ou en mer, cette grande décharge aquatique.
Alors que se doter d’une véritable industrie de recyclage aurait permis l’économie de plusieurs millions de dollars dont une partie non négligeable profite à nos voisins de l’Est et de l’Ouest (les importations sont respectivement passées de 209.000 en 2007 à 286. 000 t en 2015 et de 374.000 à 421.000 pour la même période): «Le moyen le plus simple et le plus efficace de valoriser les déchets est leur réutilisation directe, une étape qui intervient en amont du recyclage. Par exemple, avec des pneus on peut fabriquer des chaises, ou encore en tissant du plastique on peut faire des vêtements», a conclu plus d’une étude scientifique.
Et lorsque le plastique ne peut pas être réutilisé, il peut éventuellement être recyclé. Différents procédés simples, tels que le broyage, la fonte, l’extrusion ou encore l’injection permettent d’obtenir de nouveaux matériaux (isolants, briques de construction, dalles, tuiles ou encore du mobilier…)
Les écologistes de l’expédition Plastic Odyssey, dont le programme comprend les côtes maghrébines, la nôtre, entre autres, et leurs semblables algériens de recherche, informations, formations subaquatiques (récifs), réussiront-ils à déclencher une quelconque prise de conscience sur les dangers de la pollution plastique, considérant la menace de plus en plus sérieuse sur la vie marine, la santé des populations côtières et les milieux aquatiques qu’elle représente ainsi que les prolongements de ses retombées économiques?
En tout cas, les plongeurs, les scientifiques et les militants pour la sauvegarde de l’écosystème marin, activant via l’association Recifs, qui assure la mission à la fois d’école de plongée, de centre de recherche et d’organisation de défense de l’environnement, sont résolument déterminés à poursuivre leur combat anti-déchets côtiers avec l’opération nationale de nettoiement des plages (sable et mer) qu’ils organisent début juillet de chaque année, et ce, depuis 2010.
Naima Benouaret
L'industrie du recyclage est un leurre, les produits recyclés sont 10 fois plus nocifs que le plastic neuf et au lieu de penser au recyclage et perdre des milliartds traiter le probleme a la racine, interdiction des sachets plastic et reutiliser les vieilles bouteilles en verre c'est deja ça !!!
Samira - Etudiante - oran, Algérie
05/01/2019 - 393573
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Posté Le : 05/01/2019
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Naima Benouaret
Source : elwatan.com du 9 juillet 2018