Durant la grande crise sanitaire du mois de mars 2020 où les autorités compétentes ont dû prendre des mesures drastiques pour contrôler la propagation du virus à Oran, l'un des endroits ciblés comme étant une source de contamination collective a été le grand marché de la ville nouvelle «M'dina Jdida».Sa fermeture avait appauvri ses habitués entre marchands ambulants et les citoyens au faible, voire très faible revenu. Ce fut pour eux un véritable coup de massue, car cet endroit est connu depuis toujours pour ses bonnes affaires, mais surtout pour les prix de ses différents produits et marchandises accessibles aux couches les plus défavorisées. Mais pas seulement, la ville nouvelle demeure le lieu incontournable pour tous les visiteurs et ses natifs, tant elle offre un très large choix d'articles. Les cas de contaminations ayant connu une décrue, l'ouverture de ce grand souk a fait le bonheur des citoyens.
Une virée à ce lieu emblématique nous a permis de constater que nous étions presque les seuls à porter le masque et à nous désinfecter régulièrement les mains. Nous n'avions aucun choix ni moyen de respecter la distanciation, nous devions alors nous soumettre à la réalité : nous étions collés les uns aux autres. Qu'ils soient commerçants ou clients, aucun n'applique les mesures de prévention. Seul point commun, entre tous, c'est l'échange commercial, la négociation et l'acquisition de divers produits.
C'est la période des achats des habits de l'Aïd el-Fitr, particulièrement les robes d'intérieur pour les femmes qui attirent en ce moment, d'autant que les prix sont attractifs, 1 000 DA l'unité. En second lieu, viennent ensuite les accessoires pour la confection de gâteaux et leurs ingrédients. Pour ceux et celles qui ne veulent pas ou ne peuvent les réaliser, une variété de gâteaux prêts sont proposés, exposés à ciel ouvert. Pour ce vieil homme derrière sa table de fortune où il propose toute sorte d'articles entre pinces à linge, entonnoirs, brosses, ballets, bobines de fil... « Lorsqu'on est pauvre, rien ne sert d'avoir peur du virus. Si je devais avoir tout le temps peur, je ne viendrai pas travailler ici et donc je mourrais de faim moi et mes enfants, dieu est grand et nous protège ».
Un vendeur de robes d'intérieur nous explique que «M'dina Jdida, c'est la source de revenus de beaucoup de familles dans le dénuement, ici vous avez de quoi manger, vous habiller et faire quelques affaires pour survivre, c'est un lieu cher pour beaucoup de personnes qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts. Ainsi, ils peuvent pour les plus démunis offrir des vêtements de l'Aïd à leurs enfants, leurs épouses et s'offrir un couffin de légumes et de fruits. Ce qui explique tout ce monde présent dans ces lieux, sa fermeture nous avait anéantis. Beaucoup de familles ont vécu un calvaire ». À notre question de savoir pourquoi les gestes barrières ne sont pas respectés, entraînant la propagation du virus ,et par voie de conséquence le risque d'une seconde fermeture, il nous dira «les gens n'ont pas le choix, il y va de leur survie, autant profiter tant que c'est ouvert». La joie qu'affichaient tous les clients de la ville nouvelle est sans égale. «Je fais toujours de très bonnes affaires ici, je trouve toujours des robes, des pyjamas, des rideaux et bien d'autres choses à des prix plus que concurrentiels. Vous savez, souvent ce qui est vendu au centre-ville est proposé ici. Je peux avoir pour le même prix qu'en ville 2 robes au lieu d'une», nous confie fièrement une jeune femme accompagnée de ses amies.
Le propriétaire d'un magasin de trousseau de mariées, nous dira que l'affluence est toujours aussi dense et triplement en période de Ramadhan et à l'approche de l'Aïd. Pour sa part, il nous assure : «Je désinfecte mon magasin après la fermeture, je sais qu'il y a un grand risque de contamination et aussi je ne veux pas risquer la fermeture, c'est ma source de revenus.»
Même si les autorités locales et sanitaires ne cessent de rappeler à l'ordre les commerçants et les citoyens de la nécessité de revenir aux mesures de prévention, et de distanciation, pour l'heure, très peu s'y soumettent sous prétexte pour certains que la situation est sous contrôle et qu'il n'y a pas beaucoup de cas. Pour d'autres, ce raisonnement prime «qu'on nous laisse au moins profiter et fêter l'Aïd ensuite, on reviendra aux mesures de prévention et de protection».
Amel Bentolba
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Posté Le : 08/05/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Amel Bentolba
Source : www.lesoirdalgerie.com