Algérie

Le musicien Kouider Berkane Krachaï à La voix de l’Oranie



«Il faut laisser les artistes oranais s’exprimer» Kouider Berkane-Krachaï est connu sur la place publique pour être un chef d’orchestre et un musicien virtuose. Quand il se met au violon, les lamentations de son instrument donnent la chair de poule à son entourage. Tout comme son franc-parler: le musicien ne s’embarrasse pas de circonvolutions lorsqu’il s’agit de nommer un chat un chat. Autant il n’hésite pas à concéder des éloges aux personnes auxquelles il voue respect et admiration pour leur valeur artistique et ou qualités humaines, autant il ne se fait aucun scrupule à lancer une foudroyante invective en direction de ceux qu’il considère comme ayant failli aux règles de la déontologie. Dans une discussion à bâtons rompus, le musicien Kouider Berkane Krachaï a bien voulu se répandre sur son parcours personnel et sur bien d’autres sujets. La voix de l’Oranie: Comment êtes-vous arrivé à la musique? Kouider Berkane Krachaï: La musique, c’est d’abord une affaire de vocation et puis il y a ensuite beaucoup de travail pour l’entretenir et la faire fructifier. A vrai dire, au début quand j’étais enfant, j’avais une grande aversion pour la musique. Ce n’est que lorsque j’ai atteint le palier des études secondaires et intégré le lycée Ibn Badis que mon professeur, M. Gora Mustapha, à qui je dois rendre hommage aujourd’hui, a réussi à m’intéresser à cette discipline. J’ai même fait partie de la chorale du lycée. Puis j’ai commencé à gratter mes premiers arpèges sur la guitare que me prêtait un cousin. - Et comment s’est effectuée la conversion vers le violon? - Le violon, c’est le fait d’un simple concours de circonstances. Un soir, dans le quartier d’El Hamri où je résidais, j’ai été séduit par le son plaintif et lointain d’un violon. J’ai décidé d’aller à la rencontre de ce son qui me subjuguait. C’était l’instrument de feu Bendhiba, le prestigieux violoniste, Allah Yarhmou, qui animait une fête de mariage. Ce fut le coup de foudre pour le violon. Depuis cette heureuse circonstance, cet instrument ne m’a jamais plus quitté. - Un mot sur votre parcours. La notoriété est-elle venue aussi facilement? - Pas du tout. Il fallait d’abord mener un combat pour surmonter les préjugés des parents peu enclins à laisser leur fils se lancer dans une voie qu’ils jugeaient hasardeuse. Les débuts ont été laborieux, mais quand on a la vocation, on ne peut que réussir. Ma rencontre avec le public est due aussi à un concours de circonstances. Saïm El Hadj animait une émission à la radio, il cherchait des intermèdes musicaux pour ponctuer son produit radiophonique. Je répétais, à cette époque, dans le local de l’orchestre Azhar, sis à St Pierre. De passage, Saïm El Hadj et Nadji Noureddine ont été impressionnés par ma maestria. Ils m’ont convoqué pour un test à la radio que devait superviser Ahmed Wahbi. Le grand maître a été séduit par ma prestation et leur a confessé que j’avais plus de dispositions que bon nombre de musiciens qui faisaient partie de son orchestre. En 1976, j’intégrais, en qualité de salarié, l’orchestre de Blaoui Houari que je considère toujours comme mon maître. J’ai appris également aux côtés de Rahal Zoubir. J’ai alors fait partie de l’orchestre de la RTA jusqu’à sa dissolution inattendue en 1988. Les éléments de l’orchestre ont été alors voués à eux-mêmes et les productions à la RTA au cachet devenaient de plus en plus rares. Plus tard, lorsque la situation fut devenue difficile en Algérie, je me suis installé en France. J’ai travaillé avec les stars du raï Khaled et Mami. J’ai également vendu mes services à des vedettes occidentales comme Sardou, Gipsy Kings, Rita Mitsouko, et tant d’autres. En 2004, on m’a donné l’occasion de créer l’orchestre de la wilaya d’Oran qui, hélas, a été dissous avec le départ du promoteur du projet. Aujourd’hui, je fais constamment la navette entre la France et l’Algérie. - L’ENTV vient d’organiser le concours de chanson «Alhan oua Chabab». Votre appréciation sur cette compétition? - Je dois dire que j’avais proposé à l’ENTV, il y a trois ans, un projet similaire qui n’a pas abouti. C’est une initiative louable qui a permis de faire connaître des voix mais le concours a péché par une prospection précipitée des talents et une absence flagrante de communication. Autrement, on aurait pu révéler plus de 200 finalistes dans la seule ville d’Oran qui a toujours constitué, c’est un fait incontestable, un vivier pour les artistes et les créateurs qui ne sont pas pris convenablement en charge. Il faut laisser les artistes d’Oran s’exprimer. Lorsqu’il arrive qu’on nous soumette un projet, on nous demande toujours de nous déplacer à Alger pour le concrétiser sans tenir compte de nos contraintes familiales ou autres. Toujours pour «Alhan oua Chabab», certains éléments du jury avaient eux-mêmes besoin de formation. - Au mois prochain, Oran présentera sa semaine culturelle à Alger dans le cadre d’ «Alger, capitale de la culture arabe». Feriez-vous partie de la délégation? - Selon la rumeur, si, mais je n’ai reçu aucune invitation officielle. Je dois dire un mot, si vous permettez, sur cette grande manifestation. Je considère que la cérémonie d’ouverture a été complètement ratée et sa conception métissée était, à mon sens, complètement hors sujet et loin de mettre en exergue notre prestigieux patrimoine culturel arabe.


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