Algérie

Le MSP surfe sur la vague turque



Le regard du MSP se porte vers l'extérieur. Makri avec Ghannouchi et ErdoganMakri, qui entend inscrire l'Algérie dans une large coalition de partis islamistes, se met volontiers sous la bannière de la Turquie.
Au vu des résultats de son dernier congrès, le MSP a confirmé son ancrage dans la famille islamiste et mieux encore, il peut même se targuer d'en être la locomotive. La défaite quasi définitive de l'aile Soltani, signifie la fin d'une illusion, entretenue par une partie des cadres de cette formation politique, en faveur d'un probable retour dans le giron de la majorité présidentielle. Ancien ministre, Bouguerra Soltani a joué la carte du rapprochement avec le pouvoir jusqu'à la dernière minute. Il en voulait pour argument, que du temps où le MSP était aux affaires, à la tête d'importants départements ministériels, il se portait bien, contrairement à la lente régression dans ses résultats électoraux, depuis son retrait de l'alliance présidentielle et son alignement à un «printemps arabe» qui l'a plus desservi qu'autre chose. Soltani, c'est donc de l'histoire ancienne et c'est Abderezzak Makri qui construira l'avenir du parti de feu Mahfoud Nahnah.
Fermé au compromis politique, doctrinaire et totalement acquis à l'idéologie internationale des Frères musulmans, le nouveau président du MSP entend, sans doute, investir sur le long terme. Il voit bien que le mouvement qu'il dirige perd de son ancrage national, mais il s'entête à vouloir l'amarrer aux Frères musulmans du monde, dans l'espoir lointain d'en tirer des dividendes. En fait de dividendes, Makri ne les voit pas à l'échelle du pays. Il estime faire partie d'un tout qui dépasse l'intérêt de la nation. Ce qui lui importe, c'est la victoire de la pensée islamiste à l'échelle du monde musulman. Son espoir est surtout nourri par la success-story d'un autre islamiste, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, dont il se sent volontiers l'un de ses soldats. Le bilan «brillant» du grand frère turc constitue le principal argument dans le discours de Makri. C'est bien Erdogan qui a fait de son pays une puissance économique régionale, qui discute avec les grands de ce monde, dont la parole est respectée et écoutée par les Européens et les Américains. En quelques années, Erdogan s'est imposé comme le leader incontestable de tous les islamistes en «col blanc».
L'homme qui rêve, sans doute, à la restauration du règne de Soliman le Magnifique manie le discours politico-religieux avec une adresse telle, qu'il «ensorcèle» notre Makri national. Ce dernier ne se laisse pas inviter pour mettre en avant les investissements turcs en Algérie qui le classent en tête du peloton des pays ayant mis beaucoup d'argent dans l'économie nationale. La Turquie, c'est aussi ces nombreux feuilletons télévisuels à succès. Un produit de «propagande» culturelle qui fait aimer le pays d'Erdogan.
Pour le MSP, le maintien de la ligne pro-Frères musulmans est donc stratégique. La formation islamiste ambitionne de surfer sur la vague turque pour séduire un maximum d'électeurs. Une attitude certainement inspirée par l'histoire moderne de la Turquie elle-même. Et pour cause, avant 2002, il était difficile d'imaginer un retour aussi triomphal du parti islamiste l'AKP. C'est dire que la ligne Makri n'est pas si hasardeuse qu'elle y paraît. L'homme, qui entend inscrire l'Algérie dans une large coalition de partis islamistes, se met sous la bannière de la Turquie et suit avec attention les scores des autres formations de même obédience dans d'autres pays arabes. En Tunisie et en Irak, les islamistes se rapprochent des commandes. Le Qatar, qui ne fait pas secret du soutien qu'il apporte aux Frères musulmans, est un autre allié de taille pour le MSP. Tous ces faits mis bout à bout peuvent expliquer le refus du MSP de répondre positivement à l'invitation du pouvoir de rejoindre un gouvernement élargi, en 2017. En un mot comme en mille, Makri a réussi à convaincre les cadres du MSP que leur parti est engagé dans un processus historique régional, censé aboutir à la renaissance de la «Ouma» sous une forme moderne. Le parti de feu Nahnah est, pour ainsi dire, le plus internationaliste de toute la classe politique algérienne. Son recul dans les Assemblées nationale et locales ne semble pas l'empêcher d'espérer revenir au-devant de la scène nationale, non pas par l'entremise de la majorité présidentielle, mais plutôt avec le soutien et l'aide de ses «amis» de l'extérieur. Cette perspective ne paraît pas évidente pour celui qui fait une lecture immédiate de la scène partisane nationale. Mais lorsqu'on caresse le rêve de Makri, rien n'est bien loin.


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