« Parce que nous sommes de ceux qui pensentque l'histoire se construit» n'est-il pas de notre devoir de consigner lesévénements, les lieux et les dates, de les disposer ensuite «afin de leurconférer une nouvelle cohérence» ? Ainsi Omar Dib introduit-il son ouvrage historique «Les amis du livreFleuron du mouvement culturel algérien» suivi de «le mardi 4 juin 1957 àTlemcen : un forfait contre l'humanité», un véritable devoir de mémoire dont ila voulu se «débarrasser» et qui lui «tenait à coeur», car les générationsdoivent savoir. Dib Omar, chercheur, historien mais aussi fin conteurhistorique, dont la sagesse comme l'urbanité de son maintien et la voixagréable et doucereuse et un doux parler typiquement tlemcenien charment, tousles matins sur les ondes de Radio Tlemcen. «On aime tous entendre parler desrois et des rues de Tlemcen mais on se perdrait à l'écouter pendant des heuresparler des Rois dans les rues de Tlemcen». C'est de Omar Dib qu'on parle et quivient de faire éditer à Dar El Gharb son ouvrage fruit de 25 ans de travail, derecherches et d'enquêtes. Il a contacté tous les acteurs de cet événement du«mardi 4 juin», déchiffré des centaines de documents pour pouvoir restituer àl'Histoire même, cette journée préparée de très longue date par les autoritéscoloniales et dirigée essentiellement contre la population de Tlemcen. «Crimes décidés, dira-t-il, avec «une complicité de tous lesextrémistes coloniaux qui ont utilisé leur haine contre une population désarméeavec tous les moyens humains et logistiques qui appartenaient à l'Etat françaisfait au nom de la France qui prétendait défendre cette population justement». «Une atmosphère inhabituelle enveloppant Tlemcen. A première vue,et bien que la guerre fut présente partout, rien ne semblait différent desautres jours; seul un oeil averti aurait pu, du reste remarquer l'absence desEuropéens au centre-ville, plus particulièrement celles des enfants et desfemmes» peut-on lire au chapitre intitulé «En ce mardi 4 juin 1957...» Omar Dibagence l'histoire dans une romance même si l'histoire et le fait historiqueauthentique sont omniprésents. Les lieux sont évocateurs. Les personnages mêmedisparus sont connus de tous. A l'image de «l'assassinat de l'Imam de la GrandeMosquée de Tlemcen» page 191 : «le capitaine dégaina : il y avait dans ses yeuxun mélange de haine et de peur. Alors il tira à bout portant sur l'imam. Cedernier s'écroula sans un cri. L'écho des coups de feu rebondissait de voûte en voûte pendant queSi Djelloul Benosman rendit l'âme, sans doute avant même que son corps netouchât le sol». C'est ainsi qu'il rapporte ces événements dans une langue à laportée de tous mais ce n'est peut-être pas le souci de Omar Dib, l'érudit maisplutôt ce besoin incoercible de dire un souvenir douloureux, comme s'il lecontait, le racontait, pour la millième fois, parfait conteur infatigable dansles deux langues, tenant en haleine des auditeurs qui n'ont qu'une seule peur :qu'il se taise. Omar Dib ne se taira pas et son ouvrage restera une référencehistorique même si parfois on a l'impression que c'est un récit, du vécu où lesagencements percent la cuirasse du témoignage et font deviner l'historien cachépar le fidaï. Mais en filigrane, on peut avancer l'idée justifiée d'un crimecontre une population qui cherchait sa dignité, sa liberté, son indépendance etce sont les termes même utilisés par la France pour décrire la notiond'humanité. Onferme le livre parce qu'on l'a terminé mais on a de suite envie de lereprendre, de le relire. Comme si quelque chose nous a échappé comme si OmarDib veut nous dire une Histoire, la vraie, pas celle qui de tout temps a étéotage des fonctionnaires, l'histoire officielle.
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Posté Le : 01/07/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Belbachir Djelloul
Source : www.lequotidien-oran.com