Algérie

Le mouvement associatif est l'usine de fabrication de la démocratie



Tous les militants assidus des associations comme moi vous le diront : si nous ne nous sentons bien que dans cet espace d'expression, c'est que nous faisons ce qu'on aime et que nous aimons ce que nous faisons, autrement dit que nous sommes libres et aimons le rester. Nous sommes libres dans un territoire que nous définissons nous-mêmes où nous donnons libre cours à nos pensées, nos actions, car nous en garantissons en grande partie le résultat.Nous animons à notre guise avec nos seules compétences notre bulle de liberté bénéfique à un pan de la population validée par le nombre d'adhérents et bénéficiaires de nos actions. Nous cohabitons avec l'Etat qui nous a concédé un état civil appelé agrément : ce même Etat qui nous tolère plus qu'il n'adhère, toujours attentif à ce que l'on gère.
Quand on dit que «la démocratie d'un pays se mesure à son nombre d'associations», ce n'est pas anodin : multipliez les petites bulles de liberté, chacune selon ses propres buts statutaires, et vous obtiendrez un patchwork démocratique, qui, s'il est organisé, motivé et assidu, finira petit à petit à convaincre l'Etat du bien-fondé de ses revendications, qui en fera à son tour une de ses préoccupations soit par des actions, soit par l'octroi de subventions à ces associations, ce qui aboutira à la paix civile.
La société civile idéale et saine est celle qui en plus d'être constituée du simple citoyen lambda est riche d'un grand nombre d'associations aussi diverses que variées, qui apportent de la vie et de la sève à cette société civile. Et c'est là qu'on s'aperçoit qu'il y a anomalie lorsque l'Etat regarde ce mouvement associatif d'un ?il plus que vigilant, voire suspicieux, alors qu'il est porteur d'un trésor de compétences es qualités, porteur d'une manne économique lorsque vous mettez bout à bout les milliers d'heures de travail en bénévolat, c'est aussi un vivier d'idées novatrices, un initiateur de projets d'avant-garde : alors pourquoi cette frilosité vis-à-vis du développement associatif, quand on sait que le mouvement associatif est l'usine de fabrication de la démocratie d'un pays ' Tout le monde sait que la Terre tourne autour du soleil et que les hommes politiques tournent autour de la terre et que quand chez eux ça ne tourne pas rond, c'est toujours pour eux la faute à la société civile, la faute aux assoc's !
Petit tour d'horizon pour conclure : dans d'autres pays, un simple clic sur le Net vous suffit pour créer votre association à partir de deux personnes seulement bien que l'idéal serait trois (président, trésorier, secrétaire). N'importe quelle association du moment que vous ne portez atteinte ni à la bienséance ni à l'Etat. Vous pouvez créer n'importe quelle association, que ce soit celle des porteurs de cravate ou celle de ceux qui ont une verrue sur le nez.
Chez nous, il est plus facile d'investir ou de créer une entreprise en un temps record - bien que souvent elles se cassent la figure entraînant des conséquences économiques désastreuses - que de créer une association qui relève du parcours du combattant qui deviendra forcément poilu avant son agrément : pour créer une association locale, il faut d'abord que trois personnes fondatrices présentent à la wilaya leur CNI et leur casier judiciaire pour déclarer leur intention de création d'une association avec indication de la date de leur AG constitutive. Il faut qu'elles fassent cette AG dans une salle d'un organisme culturel de l'Etat en présence d'un huissier. Et pour cette AG, il faut au moins 15 personnes constitutives munies de leur CNI et de leur casier judiciaire ; ensuite dépôt à la wilaya et attendre patiemment l'agrément au gré d'une bureaucratie qui a bon dos. No Comment !
Pour créer une association nationale, je vous conseille d'aller créer une centrale nucléaire même en Papouasie, ça ira plus vite...
Perplexes ' me direz-vous ; je vous répondrai : à qui profite «ce crime de lèse-activités» : à l'Etat ' Alors qu'il a besoin d'une société civile organisée et saine !
Aux associations ' Alors qu'elles sont asphyxiées pendant les forceps ! La question reste posée bien que le constat soit clair : tout pays qui barre la route aux associations veut tout diriger lui-même.

Par Nadjia Bettahar
Présidente d'association


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)