Taourirt Mimoun, un des sept villages des Ath Yenni, les «Béni Yenni» du célèbre auteur de L’histoire des Berbères, Abderrahmane Ibn Khaldoun, qui, il y a quelque quatorze siècles, citait la tribu parmi les plus importantes du Djurdjura d’alors, a enterré, le dimanche 21 avril 2013, un homme de 83 ans, que seuls les plus vieux ont connu.
Pour ceux qui, sur place, pouvaient encore s’en souvenir, l’annonce de la mort de celui, qui, comme tant d’autres alors, quitta le douar dès la fin des années quarante du siècle dernier pour émigrer en France, avait créé en quelque sorte l’événement. Tahar Benyahia, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’avait remis les pieds chez lui qu’à peine deux ou trois fois en 1962 et 1963, après la fin de la guerre de Libération nationale à laquelle, lui aussi, participa activement, comme tant d’autres d’ici et d’ailleurs. En fait, nombreux étaient les habitants du village qui s’étaient résolus à croire que le parent, voisin ou ami avait cessé de vivre depuis tout ce temps (près d’un demi-siècle !), car nul n’avait plus la moindre de ses nouvelles !
C’est d’ailleurs par un message des services consulaires algériens en Allemagne, adressé à l’APC des Ath Yenni que la famille fut informée du décès. C’est comme s’il s’agissait d’un revenant. Aussi, l’émotion n’en fut que plus vive chez l’un ou l’autre des rares Yennaouis, qui, aujourd’hui, gardaient encore un brin de souvenir de leur concitoyen. Essentiellement, ses congénères qui, eux aussi, participèrent activement, en France, à la lutte pour l’indépendance nationale, tels Achab Yahia — le cousin et camarade d’enfance, lui-même chef de wilaya en France — Mohamed Boukert, un ancien détenu de Fresnes, l’ancien fidaï de Paris, Makhlouf Toukal, Akli Benyounès le cite dans son récent ouvrage sur la lutte des émigrés algériens en ex-métropole et qui, lui, avait pu à l’occasion, parler aux plus jeunes de Si Tahar, le moudjahid.
De fait, ceux-ci et quelques autres à présent disparus, connaissaient bien le passé révolutionnaire de Si Tahar, tandis que la plupart des parents, voisins et amis sauront que le défunt fut un haut responsable de l’Organisation spéciale du FLN en France (la fameuse OS) ou la redoutable «Spéciale» — qu’à la faveur de la parution dans le journal El Watan du lundi 15 avril de l’avis nécrologique de la famille Benyahia. Et ce n’était pas banal que d’avoir eu le privilège d’avoir servi à ce niveau dans ce qui fut le bras armé de la Révolution algérienne sur le territoire français; l’instrument de guerre qui permit l’ouverture de ce qui sera aussi connu sous l’appellation «second front» de la guerre du FLN contre le colonialisme français. Visiblement, l’anonymat qui avait donc jusqu’ici caractérisé le passé militant de l’homme à inhumer aura immanquablement rendu plus intense l’émotion que l’annonce de son décès aura provoquée chez les villageois qui, ici comme partout ailleurs et de tout temps, apprécient davantage les êtres discrets et humbles. Sur le visage des nombreux compagnons de lutte du défunt venus de plusieurs contrées de Kabylie et même d’Alger et qui ont tenu à être présents le jour de l’enterrement, on pouvait lire la peine et la tristesse.
Ces «anciens des années de feu» se reconnaissaient aux marques physiques, parfois aux handicaps très perceptibles, que l’âge et surtout les souffrances du temps de guerre ont fini par imprimer à leur corps. Il y avait là une bonne quinzaine d’hommes, qui manifestement et pour certains, se redécouvraient également, avant de se rappeler mutuellement des séquences de souvenirs du temps jadis. Tous ceux-là ont connu, ou eu à croiser au moins une fois, au cours de leur parcours militant, le regretté disparu, celui que la plupart d’entre les «choquistes» d’autrefois continuaient d’appeler «Ali».
Le nom de guerre que le résistant s’était choisi, par référence au prénom de celui qui lui donna le jour en février 1930 à Azazga. Le père, celui qu’au douar les plus vieux dénommaient Si Ali ou El Kadhi y exerçait, alors, la charge de cadi notaire. Il était assurément une notabilité bien connue dans la Kabylie du début du vingtième siècle. Né en 1864, l’intéressé eut l’heur de faire partie des premiers effectifs indigènes de l’université d’Alger. Celui-là aurait été bien fier d’entendre, s’il le pouvait de sa tombe, les hommages si peu circonstanciels que les «hommes de la Spéciale» rendirent sur place, unanimement et tout aussi sobrement que spontanément, à son digne héritier. En effet, ce qui a été dit sur Si Tahar par ses pairs présents aux Ath Yenni n’était guère banal.
Au reste, les propos tenus confirmaient, précisaient ou complétaient les informations diverses que le rédacteur de ces lignes avait, soit glanées précédemment sur le passé du défunt au gré de rencontres inopinées de gens qui, un jour ou l’autre, avaient partagé avec lui une séquence de son parcours de combat, sinon, qu’il avait relevé de ses lectures sur l’histoire de la guerre de Libération nationale. En rapportant fidèlement ici l’ensemble de ce qu’il avait ainsi pu recueillir, ce sera plus que l’hommage mérité dû à l’un des innombrables moudjahidine de France, auquel il sera sacrifié. Peut-être serait-ce aussi et surtout l’obligation de sauvegarder un pan de la mémoire du combat de ceux qui ont fait la guerre, ou l’ont vécue alors qu’ils étaient enfants, qui s’en trouvera de son côté ponctuellement satisfaite.
Un combat propre à inspirer ou conforter présentement encore l’espoir en un avenir de paix, de démocratie et de prospérité pour les générations d’aujourd’hui comme pour celles de demain. Celui qui permit la libération du pays et auquel, du reste, les Ath Yenni avaient eu, à l’instar de la plupart des localités du pays, à sacrifier des dizaines de leurs enfants : plus de cent soixante noms de chouhada sont recensés sur la stèle commémorative dressée à l’entrée du village de Taourirt Mimoun et parmi eux, une dizaine de femmes. Et ce, naturellement, outre les dizaines de moudjahidine ou de résistants civils dont, hélas, la mémoire locale ne cultive pas, comme partout ailleurs sans doute, l’intense souvenir que pourtant tous méritent ! Tel celui que, pour le défunt Si Tahar, le présent écrit voudrait évoquer aujourd’hui tant l’itinéraire patriotique de cet homme ne fut nullement quelconque puisque même des sources écrites ont pu en témoigner au passage.
La fédération de France du FLN
En effet, déjà, au milieu des années 1980, le premier livre d’Ali Haroun sur La VIIe wilaya, ou la Fédération de France du FLN, signalera que l’intéressé prit la pleine responsabilité de l’OS aussitôt que son compagnon, Aït Mokhtar Nacereddine dit Madjid, avait été contraint de s’exiler en Allemagne pour échapper à une arrestation. Suite à la parution de cet ouvrage, un ancien cadre du PPA/MTLD qui fut en relation avec les maquisards du Djurdjura des années 1945 (Krim Belkacem et Ouamrane) et l’un des premiers militants du FLN en France — Si Saïd Ouali Mouzarine — signera une notice-critique d’une vingtaine de pages dans laquelle il formulera ses observations sur le contenu de l’édition considérée.
A ce titre, l’auteur de l’écrit rappellera que les «groupes de choc» créés dès le début de l’année 1956 ont constitué la matrice de l’OS. Il citera parmi leurs premiers membres et aux côtés de Teklal Kaci, Slimane Amirat, Arezki Haddad, Mohamed Ouramdhane Saâdaoui, Cherif H’Rioui, Abdel Kader Ould Hamou, Aouli Brahim dit Bouboul, Tahar Benyahia, lequel fera donc partie de ce premier noyau de militants armés dont émergea l’encadrement de base de la future Organisation spéciale.
Des éléments convaincus et pétris déjà d’expérience que viendront renforcer, à la fin de l’année 1957, plusieurs jeunes étudiants sélectionnés au sein des Sections universitaires (SU) du FLN implantées en France. Et pour justifier à la fois d’une bonne connaissance du terrain et d’un niveau scolaire appréciable pour un travailleur émigré, Si Tahar se trouvera tout naturellement propulsé, très tôt même, aux avant-postes du groupe de militants qui organiseront et superviseront sur le terrain l’exécution des opérations du 25 août 1958 dont le coup le plus spectaculaire fut, tout le monde le sait, l’incendie des dépôts de carburants de Marseille dont s’honorera Abderrahmane Chérif Meziane, celui qui, dans les années 1990, deviendra ministre de l’Intérieur de l’Algérie après avoir été wali d’Alger et de Béjaïa.
Tahar-Ali Benyahia opérait, au départ, au niveau de la rive droite de la Seine à Paris. Omar Saâdaoui, un cadre très connu de l’OS, ami fidèle de la famille Benyahia présent aux Ath Yenni le jour de l’inhumation, aurait pu en dire beaucoup sur ce que fut l’apport personnel du défunt à la réussite de cette guerre surprise qui ébranla la France durant l’été 1958 si, en la circonstance, lui le témoin et l’acteur de l’événement d’alors, ne s’était davantage préoccupé de mettre en exergue les qualités de son compagnon. A ce titre, l’intéressé soulignera, outre celles de courage, de maîtrise de soi et d’endurance dont au départ chaque élément de l’OS devait faire preuve, le sens élevé de l’organisation et de la précision qui caractérisait en particulier Si Tahar…
De façon toute discrète, un autre hôte des Ath Yenni avouera de son côté que son ami «Ali» se distinguait surtout par son intransigeance sur le respect des principes et des règles régissant le fonctionnement de l’organisation. Une vertu qui, donc, expliquera les rapports difficiles que, selon d’autres sources, Tahar Benyahia avait pu avoir avec de hauts responsables du FLN en France ! Ce sera sans doute cette même disposition d’esprit qui conduira l’homme, d’abord, à refuser de se joindre aux arrangements auxquels avaient vite céder, au lendemain de l’indépendance, de nombreux cadres du FLN et, ensuite, à se décider de quitter au milieu des années soixante le pays que, comme tout autre sincère patriote, il chérissait tant. N’étant ni un homme de salon, ni également un Don Quichotte et encore moins un opportuniste, l’ancien choquiste avait de fait préféré s’éloigner du pays.
Peut-être avait-il nourri le secret espoir qu’un jour il y reviendrait pour y couler des jours heureux ? Au lieu de cela, l’homme finit par n’avoir aucun contact avec quiconque de ses plus proches parents ni de ses amis intimes. Non, ce n’était pas pour des raisons personnelles… peut-être avait-il décidé de plonger une nouvelle fois dans une clandestinité que le temps passé lui avait appris à aimer ! Mais ne nous attardons pas trop sur ces aspects, assurément dépassés à présent, pour revenir au passé strictement militant de l’ancien résistant lequel aura, de notoriété, fait preuve sur le terrain des opérations armées d’une efficacité reconnue. Indéniablement, l’homme avait fait partie de l’élite de la «Spéciale» qui permit de transporter la guerre sur le territoire même de la France.
Une entreprise absolument inédite dans l’histoire des guerres révolutionnaires du vingtième siècle ! Et ce, dans la mesure où ses promoteurs avaient eu la force et le génie, d’une part, de réussir à obtenir une mobilisation massive, organisée et consciente, sinon enthousiaste, des dizaines de milliers d’Algériens composant, alors, la communauté algérienne émigrée en France et, d’autre part, de susciter l’engagement exceptionnel de dizaines de citoyens français, militants sincères et désintéressés de la cause de l’indépendance des peuples colonisés, lesquels prendront souvent des risques multiples à convoyer ou cacher les femmes et hommes du FLN, à transporter les armes…
Son arrestation fut annoncée par la radio parisienne
C’est donc dans de ce contexte général, et sur le terrain des actions armées, qu’aura émergé la personnalité transcendante de Si Tahar Benyahia lequel parviendra, dès la fin de l’année 1958 sinon tout au début de 1959, à devenir un des premiers adjoints de Rabah Bouaziz dit Said — le membre chargé du domaine militaire au sein du Comité Fédéral du FLN en France. Il est loisible de retrouver l’information considérée dans le livre de Lyes Hamdani sur les Services Secrets algériens lequel a pu, en même temps, préciser que, à ce titre, l’intéressé avait assuré aux côtés du responsable précité la représentation en France du redoutable MALG d’Abdelhafidh Boussouf (cf. le livre considéré page 17).
L’information est corroborée par celle que donne Daho Djerbal, l’historien-universitaire auteur du remarquable livre dédié à L’Organisation Spéciale de la Fédération de France du FLN paru aux éditions Chihab au milieu de l’année 2012. C’est sans doute à ce titre que Tahar Benyahia put participer, en compagnie d’Ait Mokhtar mais aussi de Rabah Amroun et de Larbi Driss, à la réunion tenue au début du deuxième trimestre 1959, sous la direction d’Omar Boudaoud, par le Comité fédéral du FLN en France élargie aux chefs de wilaya — cf. page 317 de l’ouvrage cité — et dont la session fut consacrée à la révision des modes de fonctionnement ainsi que de l’organisation des structures du FLN en métropole.
Faisant, de notoriété, tandem avec Nacereddine Ait Mokhtar dit Madjid, celui que dès le début de l’année 1961 la police française considérait comme le «terroriste FLN» le plus dangereux de la métropole — le futur spécialiste de neurologie qui décédera lui aussi dans l’anonymat il y a plusieurs années —Tahar Benyahia ne réussira pas à survivre très longtemps dans la clandestinité. De fait, et en dépit de son expérience éprouvée de l’action secrète ainsi que de son sens élevé de l’organisation qui le fit durer aussi longtemps dans le combat, l’intéressé ne parviendra pas à sortir de la nasse qu’avaient patiemment tissée, autour de lui et de ses fidèles compagnons de l’OS, les fins et redoutables limiers des services français de sécurité…
Son arrestation fut annoncée par la radio parisienne laquelle affirma que la mise hors d’état de nuire du «redoutable terroriste du F.L.N», Tahar Benyahia, apportera un grand «soulagement à la population parisienne». Le commentaire fit, en son temps, une forte impression sur les membres de sa famille qui ont pu l’intercepter. Aujourd’hui, en pensant à tout ce qui a pu s’écrire dans les journaux d’outre mer et se dire sur les ondes radiophoniques au sujet de l’épopée de notre émigration en France, on est en droit de s’interroger sur la parcimonie des informations qui sont données sur les innombrables femmes et hommes qui ont fait la guerre, chose inédite, sur le territoire même de l’ennemi. On parvient dès lors à déplorer que fussent omis ou carrément ignorés les noms de patriotes qui, un jour ou l’autre, firent partie de ce qui s’apparente vraiment à la célèbre «Armée des ombres» pour reprendre le titre du livre que Joseph Kessel, le membre de l’Académie française, donna au palpitant ouvrage qu’il dédia aux membres de la Résistance française contre l’occupation allemande.
A l’instant, je pense particulièrement à l’un d’entre eux, un vétéran, feu Slimane Amirat ! Pour en rester toujours à l’itinéraire personnel du disparu dont l’on se remémore, ici, ce sera dans le témoignage qu’en fit, un Français acquis à la cause de l’indépendance de l’Algérie — Diego Masson — celui qui fut le convoyeur et l’agent de liaison de Said Bouaziz que nous pourrons également trouver matière à se convaincre de la force et de la permanence de l’engagement de Tahar Benyahia dans la lutte armée du F.L.N en France.
Ce fils d’un républicain espagnol anti-franquiste dira avoir retrouvé à Fresnes ce patriote qui, purgeant sa peine à la prison de Fresnes aux côtés d’autres moudjahidine, Saâdaoui et Ali Zamoum — un homme du premier Novembre — le convaincra d’assurer, dès sa sortie de taule, le transport d’armes dans Paris pour le compte de l’OS(cf. Jacques Charby pages 143 à 146 du livre Les porteurs d’espoir Les réseaux de soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie : les acteurs parlent). Par ailleurs, dans le livre intitulé 7 ans de guerre en France, quand le FLN frappait en métropole, Raymond Muelle citera à plusieurs reprises Tahar Benyahia.
A ce titre, les lecteurs intéressés pourront se reporter aux pages 257, 259 et 261 de l’ouvrage précité où ils pourront, en l’occurrence, relever que le défunt n’était pas, s’il en était peut-être, un supplétif ou un simple intérimaire, puisque sa «mise hors d’état de nuire» n’aura pas manqué d’affecter gravement le moral des troupes de l’OS et ce, de l’aveu même d’un des cadres de l’OS arrêté après son chef Tahar ! Un des hôtes des Ait Yenni venu se recueillir sur la dépouille du moudjahid se rappellera du fait et avouera que le défunt fut indéniablement un «grand chef».
Craignant, peut-être de n’être pas bien compris de chacun, l’ancien choquiste jugea utile de préciser sa pensée par une formule indéniablement éloquente : «A la limite, il importe vraiment peu de savoir quand Tahar avait effectivement atteint le sommet de la chaîne de commandement de ‘‘l’ALN de France’’. Pour nous les hommes de terrain, Tahar fut toujours le chef parce qu’il était chaque fois à nos côtés lorsque nous passions à l’action ! » Dans le même sens de cette appréciation, il me revient de suite à l’esprit la réflexion d’un autre moudjahid de France, celui-là disparu au milieu de la première décennie du siècle qui commence : Mohamed Hocine Benyahia, un citoyen de Barbacha en Petite Kabylie, celui que les hommes de la «Spéciale» appelaient «Texas».
A entendre d’un coup cet ancien condamné à mort se remémorer de façon élogieuse son compagnon d’armes, Tahar Benyahia, on reste saisi autant par la sincérité que la spontanéité de l’hommage. Tout bonnement, Texas put, en effet, affirmer devant plusieurs témoins présents à la cérémonie de remémoration d’Abou Bekr Belkaid organisée à El Alia que, lui Mohamed l’ancien de la «Spéciale», se sentait toujours en état «d’exécuteraujourd’hui encore, disait-il quel qu’ordre qui puisse émaner de son ami de jadis, Tahar-Ali !»
avait-il émis le voeu d’y être enterré ?
A présent, bien des années après, le propos de celui qui fut un dur parmi les durs ressemble à un hommage pré-mortem pour celui qui, récemment, s’éteignit en Allemagne. A l’évidence, tous les éléments de la «Spéciale» furent braves; et tous furent des «chefs». Chacun mérite la reconnaissance qui est due à tous. La brève relation qui est faite ici de l’itinéraire d’un des leurs se voudrait être juste une ligne supplémentaire au grand livre de l’histoire de l’arme de guerre du FLN en France dont le récent ouvrage phare de Daho Djerbal a écrit, à n’en pas douter, un des plus éloquents chapitres.
L’auteur précité avait eu l’audace d’ouvrir des pistes de réflexion à travers plusieurs questions pertinentes émaillant la dernière partie de son bouquin. Dont notamment celle relative aux raisons profondes de l’éparpillement, sinon de l’isolement, qui au lendemain de l’indépendance fut finalement le destin irrévocable de l’encadrement de l’OS. A cet égard, l’interminable exil de l’homme récemment inhumé aux Ait Yenni, et surtout l’assourdissant silence qu’il s’était imposé durant tout le temps — plus de quarante ans, mon Dieu — qu’avait duré son absence du pays peuvent résonner aujourd’hui comme un écho poignant à l’une des interrogations de l’historien. Car, il est impensable, il est même inadmissible, que ce fût pour des motifs strictement personnels que Tahar Benyahia eut choisi de couper tout contact avec la patrie qu’avec des milliers d’autres il avait contribué à libérer.
Un demi-siècle plus tard n’avait-il pas émis le vœu d’y être enterré ? Peut-être bien que les proches du regretté disparu parviendront-ils, en reconstituant jusqu’à la plus récente séquence de son passé, faire vivre de nouveau un personnage décidément devenu attachant par le fait même de son tragique destin ? Déjà, on confirme à partir de l’Association des anciens moudjahidine de la Fédération de France du FLN de la wilaya de Tizi Ouzou que l’ancien responsable au sein de l’OS n’est nullement inscrit sur le fichier local ou national des moudjahidine ! Sa famille le pressentait bien, elle qui s’est précipitée à rapatrier, aux modestes frais de son frère Omar et de ses neveux, la dépouille de son aîné. Ses parents tiennent à témoigner toute leur reconnaissance aux amis du MAE et aux autorités consulaires algériennes de Bonn en Allemagne.
Selon ses pairs, il n’aurait jamais accepté de se voir décerner quelque insigne titre de reconnaissance institué par la République. Il est vrai que, de ce point de vue, Belkacem Benyahia — un ancien militant du PPA/MTLD en France et l’un des premiers cadres du FLN de l’ex-métropole, celui qui fut le directeur de l’hebdomadaire El Moudjahid au lendemain de l’indépendance avant d’assumer longtemps les fonctions d’ambassadeur d’Algérie en Afrique et en Europe décédé il y aura bientôt vingt ans — avait précédé son cadet dans ce choix. Que Dieu couvre de sa Sainte miséricorde le regretté disparu.
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Posté Le : 20/02/2017
Posté par : chouhada
Ecrit par : Belkacem Achite : un citoyen des Ath Yenni
Source : http://www.forcesdz.com/