Algérie

Le moment de sonner l'alarme '



Les résultats de l’étude annuelle 2011 du Conseil mondial de l’énergie (CME) sur la perception, par les leaders de l’industrie énergétique, des problèmes affectant leur secteur, ont montré que l’incertitude essentielle aujourd’hui est l’absence d’un cadre législatif climatique défini. Cette incertitude, d’ordre critique, se positionne devant celles générées par l’instabilité politique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et dépasse également l’inquiétude provoquée par les risques qui découlent de la crise financière et économique. Cela signifie que le secteur mondial de l’énergie commence à sérieusement douter du fait que les dirigeants mondiaux finiront par entreprendre des actions concrètes et significatives dans le but d’enrayer le processus de réchauffement climatique. En réalité, le manque évident de cadres internationaux et nationaux, concernant le changement climatique, freine toute action positive. Dans un monde paralysé par les incertitudes, la nécessité, pour les décideurs politiques, d’agir et de pallier  ce manque est devenue aujourd’hui absolument critique. Les récentes déclarations de l’AIE : «La fenêtre des opportunités est en train de se refermer» ne font que renforcer cette idée. Une position que nous, au Conseil mondial de l’énergie, partageons pleinement.
Par conséquent, si nous devons nous attaquer aux problèmes liés au changement climatique, nous devons nous concentrer, dès maintenant, sur les certitudes existantes et les défis à long terme. Nous ne pouvons plus nous offrir le luxe de prendre notre temps,  nous devons concentrer toute notre attention sur le développement économique et social, sur l’acceptabilité environnementale et sur l’éradication de la pauvreté énergétique. Parallèlement, nous devons accepter le fait que le défi principal, qui se pose au secteur de l’énergie à long terme, est l’acceptabilité, y compris des problèmes environnementaux, de protection climatique, mais aussi des questions de sécurité. En effet, les récents événements du Golfe du Mexique et de Fukushima ont placé les accidents à grande échelle au sommet des préoccupations des leaders de l’énergie, mais nous ne devons pas laisser ces événements nous détourner des problèmes essentiels. Nous devons admettre que les préoccupations grandissantes générées par des situations complexes, telles que des mégapoles polluées et surpeuplées ou encore le lien entre énergie et eau, ont une véritable importance stratégique qui ne fait que s’accroître. Nous sommes conscients du défi posé par le fait que nombre de nouvelles technologies, actuellement en cours de développement pour répondre à la demande croissante en énergie, dépendent en grande partie de la disponibilité en eau. Avec une population mondiale qui a dépassé les 7 milliards et qui continue de croître, nous voyons également la tension entre énergie et alimentation s’intensifier. Comme l’a fort justement souligné l’AIE, la mobilisation internationale ne peut plus être repoussée. C’est maintenant qu’il faut investir pour générer des ressources en énergie propre et développer des systèmes qui permettront non seulement d’alimenter le monde en énergie, mais aussi d’assurer une croissance économique durable au-delà de l’horizon 2030. Cependant, dans le tableau, tout n’est pas si sombre, et de bonnes nouvelles apparaissent du côté des ressources et de la technologie, avec de formidables opportunités à saisir. L’ingéniosité de la race humaine continue de déverrouiller de nouveaux domaines et de nouvelles idées. De nouvelles ressources, telles que le gaz de schiste, donnent à ce secteur le dynamisme d’une renaissance. Le gaz est aujourd’hui vu comme une source d’énergie valable pour la transition vers un système à carbone zéro et potentiellement capable de compléter les nécessités d’améliorations en efficacité énergétique ou le développement des énergies renouvelables. Mais il existe aussi de nouveaux défis et de nouvelles opportunités à la fois en ce qui concerne l’innovation technologique et l’innovation sociale. A vrai dire, ce ne sont pas les ressources qui manquent, ni les technologies. Les vrais défis résident dans notre volonté, notre organisation et nos sociétés. Pour les énergies renouvelables, comme pour les mesures d’efficacité énergétique, les progrès ne viendront pas simplement des investissements en capitaux. Ces progrès dépendront également de l’éducation et des cadres institutionnels permettant de promouvoir les comportements adéquats et les solutions pour empêcher les effets de rebond et les surcoûts. Il s’agit-là de quelques-uns des résultats qui sous-tendent l’évaluation 2011 des politiques énergétique et climatiques dans le monde que nous venons de publier. Un dialogue clair et honnête est nécessaire si nous voulons assumer nos engagements. Assurer la sécurité énergétique dans un contexte d’incertitude croissante nécessite des cadres réglementaires nationaux forts. En l’absence d’un cadre au niveau mondial, ce sera la seule façon de fournir aux investisseurs une vision rassurante à long terme. Ces cadres doivent être transparents en ce qui concerne la réalité des coûts, la valeur implicite du CO2 et une évaluation précise des technologies nécessaires pour assurer leur succès. Peut-être plus fondamentales encore sont la protection environnementale, la sécurité de toutes les infrastructures en énergie, mais aussi l’accès universel à l’énergie. Ces trois impératifs exigent de façon urgente la mise en place d’une gouvernance internationale accrue qui imposera à tous des standards, normes et processus communs. A ce stade de l’innovation technologique et sociale, le monde est à l’aube d’une nouvelle révolution. Nous ne devons pas choisir cette révolution par crainte du changement climatique et de l’épuisement des ressources. Nous devons plutôt nous engager dans ce processus et agir avec la conviction qu’il permettra de créer des industries durables, de nouveaux emplois et plus de bien-être pour tous. Réaliser ce processus à son plein potentiel nécessitera un dialogue accru et plus profond, mais aussi une prise d’action immédiate. Lorsque les leaders se réuniront à Durban, ils devront reconnaître que pour récupérer pleinement du chaos financier, encore omniprésent dans l’esprit de nombreux participants, ils devront s’attaquer aux problèmes fondamentaux qui permettront d’assurer croissance et prospérité pour tous. Ce raisonnement guidera sans nul doute les aspirations et discussions des leaders de l’énergie lors de l’assemblée exécutive du Conseil mondial de l’énergie qui se tient cette semaine à Oran.    
(*) Président de l’Organisation des leaders de l’énergie, et du Conseil mondial
de l’énergie (CME).
Président honoraire d’Electricité de France (EdF)
 


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