Algérie

Le mollah et les dessous féminins



Qu'elle soit espionne ou adultère, la femme reste l'ennemi numéro un des mollahsLa randonnée est un sport très à la mode. La marche, l'air pur, la nature, tout concourt pour attirer des citadins envahis par le stress vers ce loisir très branché. C'est, en outre, un sport qui demande très peu de moyens. Il suffit en effet d'avoir des chaussures adaptées et un sac à dos bon marché pour le pratiquer. Cette simplicité a-t-elle fini par lasser certains pratiquants ? Il faut le croire, car les Américains, avides de sensations fortes, ne pouvaient plus se contenter d'un sport devenu banal. C'est ce qui les a poussés à y introduire de nouveaux ingrédients, en vue de rendre ce sport plus attractif. Et qu'y a-t-il de plus excitant que d'introduire du danger, du vrai danger, pour rendre la pratique du sport réellement excitante.

 C'est ainsi que les Américains ont inventé la randonnée en zone de guerre. On ne sait encore si des entreprises se sont lancées dans la promotion de ce sport si dangereux, plein de risques. Par contre, on sait d'ores et déjà que les amateurs se bousculent pour trouver une place vers les destinations les plus prisées : Irak, Iran, Afghanistan, Pakistan, et bientôt Corée du Nord, ainsi que la zone frontalière entre le Venezuela et la Colombie.

 C'est dans ce cadre innocent et pédestre qu'une ressortissante américaine, Sarah Shroud, s'est égarée. Elle a quitté la piste pour cueillir quelques fleurs, mais elle n'a pu retrouver son chemin. Elle faisait partie d'un groupe qui avait choisi cette une région particulièrement paisible pour une balade mi-sportive, mi-culturelle : la région orientale de l'Irak, près de la frontière iranienne, là où la guerre entre l'Irak et l'Iran avait duré huit ans et fait un million de morts dans les années 1980. Quoi de mieux que la marche à travers champs pour prôner la fraternité en temps de guerre ?

 Sarah Shroud s'est donc égarée, et s'est malencontreusement retrouvée en territoire iranien. Mais comme, au pays des mollahs, on se méfie de tout, et particulièrement des femmes, elle a été arrêtée, jetée en prison, et finalement gardée en otage, en espérant obtenir quelque chose en contrepartie de sa libération. Les mollahs ont bien sûr inventé une histoire absurde pour justifier la prise d'otage. Ils prétendent qu'elle serait vaguement une espionne, et affirment qu'une ressortissante américaine ordinaire n'avait rien à faire dans une zone aussi dangereuse. C'est que les mollahs ignorent ce qu'est l'esprit d'aventure américain, comme ils ignorent la témérité des femmes américaines.

 Les mollahs n'étaient pas à leur première affaire d'espionnage inventée de toutes pièces. Leur phobie des étrangers et la répulsion que leur inspirent les femmes les ont déjà poussés à s'en prendre à une autre occidentale, la française Clotidle Reiss, accusée elle aussi d'être une espionne. Cette innocente étudiante de 24 ans, belle comme une fleur et fraîche comme la brise de la Mer Caspienne, avait été arrêtée par les autorités iraniennes sous la même accusation d'espionnage. Peut-on trouver accusation plus stupide ?

 Que pouvaient retenir les Iraniens contre cette étudiante ? Rien, ou presque. Ils l'accusaient d'avoir fait des études de sciences politiques, de s'intéresser à l'Iran au point de se trouver dans les endroits les plus chauds du pays au moment des manifestations contre le président Mahmoud Ahmadinedjad, et d'avoir rédigé un mémoire sur le nucléaire iranien. Pas plus !

 Il faut bien admettre que pour l'Iran, les femmes constituent une véritable malédiction. Comme cette Sakina, condamnée à mourir par lapidation, et transformée en symbole de la persécution des femmes en Iran et dans le monde musulman. Et sur ce terrain, il faut bien admettre que les dirigeants iraniens offre à leurs ennemis toutes les armes nécessaires pour être trainés dans la boue. Bernard Kouchner et Bernard-Henry Lévy se frottent les mains. Ils ont déjà pris la tête de la campagne visant à libérer cette femme martyre, condamnée pour adultère.

 Mais il fait avouer que, pour une fois, les Occidentaux ont raison. Car s'ils prennent leurs propres concitoyens pour des cons, selon la formule de Daniel-Kohl Bendit, quand ils leur font croire que Sarah Shroud est une innocente randonneuse et Clotilde Reiss une tout aussi innocente étudiante, les occidentaux ont, cette fois-ci, raison quand ils disent que condamner à mort une femme pour adultère, et l'exécuter par lapidation, est un acte doublement barbare. Et de plus, c'est un acte stupide.




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