Algérie

Le miroir aux alouettes


«La seule vraie science est la connaissance des faits», disait une maxime à l'aube de l'industrialisation de l'Europe. Les objectifs assignés à notre industrie, principalement agroalimentaire pour réduire les importations et consolider notre indépendance alimentaire, ont-ils été atteints 'Les théoriciens de l'économie, les experts de toutes les disciplines et les ministres se suivent aux tribunes pour nous faire resplendir le miroir aux alouettes, nous faisant croire qu'il est après chaque discours un peu plus proche et qu'en termes de prospective les objectifs sont à portée de main. A les écouter, on serait tenté de conjecturer que l'Algérie, d'ici à 2020, réglera ses missiles de croisière sur les investissements indispensables à dégager pour conquérir des marchés qui n'attendraient que l'offre de nos surproductions agricoles. Il y a quelques années, il avait été décidé que le recentrage de la politique agricole algérienne était une stratégie indispensable pour atteindre l'autosuffisance alimentaire, puis, dans la même foulée, il aurait fallu mettre en branle la modernisation des outils de production, notamment ceux concernant l'industrie agroalimentaire. Bien entendu, le propos politique s'articulait autour de la souveraineté alimentaire et de la sécurité alimentaire, lesquelles devaient se faire à partir d'une production nationale. Dans ce sens, il aurait fallu dégager des enveloppes budgétaires, annuler la dette des fellahs, favoriser l'investissement et l'accompagnement bancaire, débroussailler les terres en jachère, revoir les méthodes et les moyens utilisés jusque-là dans le cadre du programme national agricole. Pour atteindre ces objectifs, il était nécessaire de mettre le paquet sur trois volets importants de la multiplication de la production dont le consommateur algérien est plus que glouton : le lait, la pomme de terre et les céréales. Des années plus tard, le constat est amer et le fruit des investissements s'est volatilisé en un projet mal pensé. Il est apparu que l'autosuffisance alimentaire n'était qu'un mythe et, comme tous les mythes, il faut s'atteler uniquement à l'espoir, qui, dit-on, fait vivre. Entretemps, le démantèlement tarifaire avec l'Union européenne qui s'était engagée en 2005 à moderniser nos outils de production ne s'est pas fait. L'ensemble des échanges commerciaux n'ont profité qu'aux entreprises européennes. Les effets attendus de la tendance haussière des prix sur les marchés extérieurs des produits agricoles qui devaient donner aux exportateurs et autres transformateurs algériens la possibilité de glaner des contrats pour vendre facilement, car plus concurrentiels à l'international, leurs produits ne s'est pas réalisé. L'industrie de transformation et de conservation agricoles est toujours aussi sinistrée et l'Institut national de recherche agronomique peine à développer de manière rentable les filières stratégiques. L'Algérie a énormément investi pour s'apercevoir, des années après, qu'au lieu de voir ses importations baisser, ces dernières ne cessent d'augmenter dans des proportions démesurées. La hausse des prix des produits agricoles sur le marché mondial, au lieu de réduire les importations, les boostent ; au lieu de freiner la consommation locale, celle-ci double les factures. La saignée de nos réserves de change est devenue problématique en raison d'une politique préoccupante des pouvoirs publics qui veut, et ce, depuis l'indépendance, soutenir les prix des aliments de base. Il était prévu qu'en considération de la hausse généralisée des prix à l'import, les producteurs chercheraient à favoriser l'investissement dans la production locale. Or, ce que nous constatons va dans le sens opposé des prévisions faites par les experts les plus éminents. Le consommateur algérien, loin d'être découragé par la cherté des produits agricoles, consomme plus et se permet même de s'adonner au gaspillage en dépit de la décroissance de l'offre mondiale depuis 2006. Notre dépendance des marchés extérieurs s'est accrue considérablement, voire d'une façon hors normes. Non ! Aucun spécialiste n'est en mesure de trouver une explication scientifique à l'éternelle problématique qui veut que la consommation double en l'espace d'une année, alors que la démographie est restée en l'état. A moins, à moins que... l'Algérie ne soit devenue une terre de transit. A moins que l'Algérie n'honore ses commandes en produits à l'import et oublie de facturer à l'export.
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