Algérie

Le ministre de la Justice à Oran



Le ministre de la Justice à Oran
Deux annonces ont été faites par Tayeb Louh lors de sa visite éclair, hier à Oran. La généralisation de la signature électronique aux notaires et la création d'un lien sécurisé, via Internet, entre ces officiers publics et les services des finances. Pour le second projet, surtout, la modernisation n'est, a priori, qu'un « habillage».En projetant de transmettre par voie de réseau Internet, mais de manière « sécurisée et hautement confidentielle », les données liées aux transactions qui se font par devant notaire, aux canaux officiels de l'administration des finances, l'Etat a une « arrière-pensée » selon toute vraisemblance : soumettre ces « auxiliaires de justice » aux dispositions de lutte contre le blanchiment et les crimes économiques, en général. « De par son statut d'officier public, le notaire est plus que jamais au centre du dispositif juridique des transactions immobilières et des actes de sociétés qui comptent parmi les canaux les plus importants des opérations de blanchiment. Il représente donc un rouage important dans la chaîne des actions étatiques de lutte contre le blanchiment. Le projet d'interconnexion entre les cabinets notariaux et les services des finances (fisc, centre national du registre de commerce, direction générale du domaine national…), qui ne consiste pas seulement à télécharger des imprimés, intervient dans cette optique », révèle au Quotidien d'Oran une source qui a requis l'anonymat, en marge de la 27ème édition du Congrès des notaires d'Afrique, qui s'est ouvert hier à Oran, en présence du ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Tayeb Louh. C'est au détour d'un discours prononcé au lever du rideau de ce congrès organisé par la Chambre nationale des notaires en coordination avec la commission des affaires africaines de l'Union internationale du notariat (UNIL), que le ministre de la Justice et par ailleurs président du Conseil supérieur du notariat (CSN) a dévoilé ce projet, quoiqu'à grands traits et de manière laconique. Et, surtout, sous l'angle étroit de la réforme et de la modernisation de la justice, de manière générale, et du notariat, en particulier. Néanmoins, son nota bene : « c'est pour lutter contre certaines infractions », insérée entre les lignes du morceau de son discours évoquant cette réforme donne, un tant soit peu, de crédit à l'interprétation tournant autour du mobile de la prévention contre le blanchiment. « Nous avons déjà installé une cellule de réflexion regroupant des cadres de la justice, des représentants des notaires ainsi que des cadres du ministère des Finances, en vue de mettre en place une interconnexion entre les notaires et les services des finances », a-t-il précisé. « Le rôle du notaire est d'autant plus important en la matière que les autorités ont constaté une tendance des blanchisseurs à recourir aux professions non financières pour réaliser leurs opérations de blanchiment. En outre, le recours à des sociétés-écrans, immobilières notamment, constitue l'un des principaux modes opératoires qu'ils utilisent. Dans la lutte contre le blanchiment des capitaux, le notariat offre la capacité inhérente à sa fonction : la transparence de l'acte authentique et l'obligation d'enregistrement dans la circonscription où exerce le notaire permettent l'irrévocabilité de l'opération et des fonds utilisés et facilitent les enquêtes. On peut savoir qui possède quoi et comment est financée cette opération.Il est un gardien des points d'entrée dans les circuits de la légalité, à partir desquels peuvent être identifiés les signaux d'alarme», indique encore la même source, sous couvert de l'anonymat.L'ACTE NOTARIE ELECTRONIQUE ARRIVEL'autre annonce faite par le ministre concernait la généralisation, « prochainement », de la certification et la signature électronique au notariat. Ainsi, l'acte authentique passé devant notaire sera bientôt signé de façon électronique et stocké au format numérique. Concrètement, les parties se rendront toujours à l'étude du notaire pour signer un acte authentique. Mais, et c'est l'évolution majeure, elles le feront désormais de manière électronique en apposant leur signature sur un Tablet PC. Il faut savoir qu'un acte authentique (pour une vente, pour un prêt, etc.) est un document qui a force probante et est garanti par le notaire qui assume l'entière responsabilité de sa rédaction, après s'être assuré que ceux qui le signent sont bien informés des conséquences de leurs engagements. «Le lancement de l'acte authentique électronique marquera l'aboutissement d'une mutation technologique volontariste de la part du notariat algérien », se félicite déjà un notaire. En pratique, pour lancer chaque procédure de signature d'un acte authentique électronique, chaque notaire doit détenir une clé REAL, une sorte de clé USB personnelle dont l'accès est sécurisé par un code PIN qu'il doit insérer dans le port USB de son ordinateur. Elle contient l'ensemble des éléments d'identification du notaire ainsi que sa signature numérique.L'officier ministériel et ses clients sont rassemblés dans une salle où sont installés plusieurs ordinateurs. Il leur est donné lecture de l'acte. Après, chacune des parties est invitée non pas à parapher le document à l'aide d'un stylo sur une feuille de papier, mais à l'aide d'un stylet sur un Tablet PC dédié. Les documents sont ainsi transmis instantanément pour archivage légal au « minutier » central électronique, au Centre de personnalisation de la puce pour la signature électronique, hébergé au niveau du ministère de la Justice, à Alger, lequel centre avait été mis en service en septembre 2014, rappelle-t-on.NOUVEAU PALAIS DE JUSTICE: LES RESERVES DU MINISTREPar ailleurs, et au cours d'une visite -plutôt éclair- de travail et d'inspection, se limitant à un seul point parmi plusieurs projets d'infrastructures en cours de réalisation à l'indicatif du secteur judiciaire local, le ministre a eu l'engagement du maître d'ouvrage délégué, la direction des équipements publics (ex-DLEP), pour la livraison du nouveau Palais de justice d'Oran, le 5 juillet 2016. Ayant démarré le 29 septembre 2011, les travaux de ce nouveau siège de la cour d'Oran, réalisée par l'entreprise chinoise ZIEC, auront comme échéance de livraison, le 1er semestre 2013. Tayeb Louh n'est pas venu sur site pour faire des reproches quant à ce glissement de délai, par rapport en tout cas au calendrier de livraison présenté alors à son prédécesseur Tayab Belaïz, tant il cernait bien les tenants et les aboutissants de ce chantier, longtemps mis à mal par un manque de couverture financière, avant d'être secoué par un avenant conséquent. Néanmoins, des reproches ministériels, il y en a eu quand même, mais ceux-ci n'étaient pas liés au retard, mais d'ordre technique. En fait, le ministre n'a pas compris comment a-t-on pu avaliser une conception architecturale donnant lieu à une salle d'audience de 1 000 m2. « C'est une salle de sport et non un prétoire.Comment voulez-vous que le juge puisse tenir un procès et diligenter un débat dans cet immense espace de je ne sais combien de places. La justice a besoin de sérénité, il y a des normes universelles pour chaque compartiment de tribunal ou de cour, notamment la salle d'audience. Ne savez-vous pas ces fondamentaux ' ». Répliquant avoir reçu des ordres de la Chancellerie d'alors pour voir en grand la salle d'audience (au fort de la polémique qui avait eu lieu, en 2006, suite aux difficultés de la tenue du fameux procès BCIA-BEA à cause de l'indisponibilité d'un prétoire spacieux au niveau de tout Oran), les responsables, réprimandés par le ministre, ont trouvé la solution simpliste : diviser la grande salle de 1 000 m2 en deux lots. Le ministre n'a pas vu objection, à condition, a-t-il rétorqué, « de ne pas dépasser d'un seul jour la date convenue, le 5 juillet 2016 »




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