Il y a six mois que le règne de dix ans de Chakib Khelil a pris
fin. Les rares déclarations du "nouveau" ministre de l'Energie et des
Mines, Youcef Yousfi, ont laissé les observateurs sur leur faim. La politique
énergétique de l'Algérie tarde à se dessiner.
Quatre enjeux attendent toujours des engagements plus clairs : la
politique de l'amont pétro-gazier, le management de Sonatrach, le chantier des
énergies renouvelables et le modèle de consommation énergétique.
Quelqu'un a-t-il compris ce que veut faire exactement Youcef
Yousfi, le ministre algérien de l'Energie et des Mines ? Pas sûr. Les
déclarations sont rares, parcellaires et parfois même contradictoires, comme
dans le cas de l'ambition algérienne dans les énergies renouvelables. Dans un
tel contexte, le constat des spécialistes tombe comme un couperet :
"L'Algérie n'a pas aujourd'hui véritablement de stratégie énergétique à
moyen long terme". Les six mois de Youcef Yousfi à la tête de ce
département sensible n'ont en rien contribué à mettre fin à la confusion
actuelle sur la démarche à entreprendre face à quatre enjeux principaux :
l'essoufflement des principaux champs de gaz de l'Algérie, la stratégie de
Sonatrach à l'amont et à l'international, les énergies renouvelables et le
modèle de consommation énergétique national.
La tension sur l'offre de gaz "sous gérée"
Première urgence : rassurer les clients de Sonatrach sur sa
capacité à honorer ses livraisons de gaz naturel sur les cinq prochaines années
- en attendant l'arrivée de quantités additionnelles (10 à 15 milliards de
m3-an) de la nouvelle province gazière du Touat Gourara. La démarche à ce
propos du ministère de l'Energie et des Mines (MEM), est jugée insuffisante.
Pendant que la presse s'inquiétait de l'essoufflement du champ super géant de
Hassi R'Mel, la principale zone de production du pays, le ministre s'est
contenté de rassurer les compagnies internationales sur le potentiel
énergétique algérien et d'un déplacement pour s'enquérir de la situation sur
place. "C'est d'une réponse globale que nous avons besoin, un plan qui
montre à nos partenaires notre volonté d'intensifier l'exploration, d'améliorer
les conditions de développements de gisements découverts et non encore
exploités" explique une source près de Sonatrach. En somme Chakib Khelil
avait des objectifs "irréalistes et aventuriers" notamment
d'exportation de 85 milliards de m3 de gaz naturel dès 2011. Au sein de la
communauté des experts du secteur, le souhait est de voir le MEM fixer de
nouveaux objectifs plus en conformité avec la réalité de l'amont gazier et de
l'expansion de la demande domestique de gaz. "Il faut d'ailleurs rendre
rapidement un arbitrage en matière de développement de la pétrochimie afin
d'éliminer les projets énergivores. La chasse aux gaspillages d'énergie doit
commencer". L'Algérie est le pays du Maghreb le plus faible en matière
d'efficacité énergétique entre autres à cause d'une politique de bas prix
intérieure du carburant et de l'électricité.
Le redéploiement du management de Sonatrach en stand-by
Tous les spécialistes s'accordent sur un point : la stratégie de
Sonatrach à l'amont doit être révisée. Elle doit entre autres prendre le
contrepied de celle "hyper extractive" adoptée par Chakib Khelil.
Pour ces experts, la priorité devrait aller au renforcement du management de
Sonatrach, "laminé par l'ex-ministre". Ce dernier ayant favorisé
l'incompétence à la tête de la compagnie pétrolière nationale pour mieux
asseoir son emprise sur le groupe au nom d'intérêts particuliers. "La
priorité pour Sonatrach est de rétablir la chaîne de commandement, de renforcer
son top management, en faisant appel aux cadres compétents éjectés par Chakib
Khelil", souligne Mourad Preure , expert des questions énergétiques. Par
ailleurs, Sonatrach devrait recouvrer sa dynamique à l'international. Paz un
mot de l'actuel ministre sur ce point. Depuis le départ, en 2004 de Ali Hached,
alors vice-président chargé de la commercialisation, aucun accord de
partenariat n'a été signé. Le dernier arrangement, la prise de participation de
Sonatrach dans le groupe portugais EDP remonte à 2007. En ce sens, La
reconstruction par Sonatrach des équipes de commerciaux efficaces relève de
l'urgence.
Des ambitions dans le renouvelable non mises à jour
Concernant les énergies renouvelables, le département de Yousfi par
la voix de son secrétaire général vient de confirmer que l'Algérie n'a pas de
grandes ambitions en la matière. En effet, ce dernier a déclaré à l'occasion du
salon international sur le sujet que l'Algérie table sur 6% de renouvelables
dans son bilan énergétique à l'horizon 2020. Le Maroc, il est vrai dépourvu de
gaz naturel, se fixe 20% d'électricité verte dans son mix de 2020. L'Algérie
hésite encore à se prononcer au sujet des opportunités d'avenir que lui tend
l'Union européenne et notamment l'Allemagne en matière de solaire via entre
autres, le projet Desertec, mais aussi le plan solaire méditerranéen. L'Algérie
n'a inscrit aucun projet d'énergie renouvelable dans le plan solaire
méditerranéen pour d'obscures motifs de " souveraineté " qui ressemblent
autant à de vrais cas d'indécision et d'absence de cap. Les appels d'offres
pour les deux nouvelles centrales électriques hybrides (Solaire-Gaz naturelle)
de Naâma (sud-ouest) et de El Meghair (sud-est) n'ont toujours pas été lancés,
alors que la première centrale hybride va entrer en production à Hassi R'mel en
janvier prochain. La réalisation d'une ferme éolienne à Adrar a été reportée.
Une logique qui va à l'encontre de l'avis des experts. " On peut
rapidement en deux ans développer le solaire en Algérie L'apport du solaire va
permettre de préserver les ressources fossiles et d'exporter du gaz pendant une
période plus longue ", observe Mourad Preure
Consommation : un milliard de dollars de perdu en un an
Enfin, l'Algérie n'a toujours pas de véritable modèle de
consommation énergétique. Pas un mot en six mois du ministre de l'Energie sur
la question. Alors que la tendance à la diésélisation du parc automobile et la
lente progression du GPL et du Gaz naturel carburant entraînent un énorme
gaspillage de ressources non renouvelables. Du coup, les importations d'essence
depuis la fin des années 2000 évoluent dans un cycle haussier. " La chute
des exportations de produits raffinés due à une montée significative des
besoins domestiques en essences a fait perdre à l'Algérie 1 milliard de dollars
en 2008 . L'APN a bloqué la hausse des prix du gas oil. En 2009, la Présidence
de la république s'est opposée à toute hausse des prix du gas-oil. "
confie un ancien responsable dans le secteur ; une conséquence de la hausse de
la demande et du retard dans la mise en service de la raffinerie de Tiaret.
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Posté Le : 19/10/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salim Dali
Source : www.lequotidien-oran.com