Il y a dix mois, photos à l'appui, nous signalions dans Arts & Lettres les graves détériorations de la fresque du peintre Choukri Mesli qui se trouve en contrebas de la Grande-Poste d'Alger, près de l'entrée du Parc Sofia (voir El Watan du 13 septembre 2007, « L'art arraché »). Nous appelions à une intervention de la wilaya d'Alger et du ministère de la Culture, à une mobilisation des artistes ou tout au moins à l'expression de leur indignation. Silence radio sur toute la ligne. Pas le moindre frémissement. Rien.Depuis, l'état de l''uvre s'est aggravé. D'autres panneaux parmi ceux qui la composent ont été défoncés, arrachés, jetés au sol. Seule réaction enregistrée, celle de ce lecteur qui s'est présenté à nous avec un morceau de la fresque, nous déclarant qu'il le conservait chez lui jusqu'à ce qu'une restauration soit entreprise. La perte d'une 'uvre qui fait partie du patrimoine artistique urbain de la capitale, pourtant bien limité, et qui est entrée dans le paysage affectif de ses habitants et visiteurs, n'est sans doute pas une « urgence vitale ». Mais à force de ne considérer que ces prétendues urgences qui s'étalent d'ailleurs sur des décennies, jusqu'où doit aller la perte de notre âme 'Dans le texte ci-contre, Benamar Médiène nous dit son attachement à l''uvre du grand artiste et nous signale comment, dans son exil, il fait le bonheur des galeries d'Europe et de leurs visiteurs. Depuis son départ en 1993, il a fallu attendre octobre 2007 pour qu'une de ses toiles soit exposée dans le cadre de l'Art contemporain arabe. Une autre est accrochée présentement dans l'exposition au Mama sur la peinture et la révolution algérienne. Cette considération peut-elle avoir quelque crédit quand une de ses 'uvres les plus importantes et les plus visibles est vouée à la décrépitude dans l'indifférence générale 'Né en 1931 à Tlemcen, il est entré à l'école des Beaux-Arts d'Alger en 1948 où il fut l'élève de Mohamed Racim. En 1953, il entre aux Beaux-Arts de Paris où il poursuit sa formation tout en activant dans les milieux nationalistes. En 1956, à l'appel du FLN, il observe la grève des étudiants et renonce à ses études comme aux expositions. En 1960, il doit se réfugier au Maroc. A l'indépendance, il se met au service de l'enseignement artistique et participe en 1963 à la création de l'UNAP (Union nationale des arts plastiques) puis, en 1967, du groupe Aouchem. En 1969, il participe activement à l'organisation du Festival Panafricain d'Alger. Quelle indignité peut donc bien cacher sa biographie ' Quelle tare bien secrète marquerait sa vie et son 'uvre 'C'est bien ce que l'on peut se demander car il n'est pas meilleur moyen d'achever un artiste que de tuer ses 'uvres. Pas meilleure folie aussi que d'anéantir toute trace de beauté autour de nous. Pas meilleur chemin vers le pire.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 26/06/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ameziane Ferhani
Source : www.elwatan.com