«Le maximum de moments de joie»

Rencontre - Il est 18h. Mounir est au rendez-vous. Son véhicule est, sans surprise, une quatre-quatre luxueuse, d'une marque très connue.
Il n'est pas seul mais accompagné d'un autre garçon, qui s'est avéré ensuite être le fils d'un colonel de la Marine nationale, et de deux charmantes demoiselles très chic. Leur allure est digne de celle d'actrices hollywoodiennes. Elles ne portent pas beaucoup de bijoux, mais sont merveilleusement habillées. Notre fils de général a préféré ne pas nous présenter comme journalistes. Pendant le court laps de temps passé en leur compagnie, on s'est donc drapé dans une autre personnalité, on a emprunté un autre prénom et affiché une toute autre vision des choses. Nos «copains» avaient entre 25 et 28 ans.
«Les cercles se forment aussi selon l'âge», diront-ils. Première consigne : ne jamais donner beaucoup de détails sur son mode de vie. «Quelques billets de 1 000 DA en poche, un téléphone portable dernière génération et la fonction du papa ou de la maman, suffisent pour se faufiler entre eux comme un poisson dans l'eau», souligne d'emblée Mounir. Après les présentations, l'heure est à la fête. Destination : une villa pas très loin du littoral ouest de la capitale. Le rendez-vous est donné chez une amie qui fête à Staouéli son 24e anniversaire. Il est presque 19h quand nous nous retrouvons face à un grand portail «bien gardé». Des vigiles, sans trop de questions, préfèrent laisser passer. La cour d'une grande villa style anglais est déjà occupée par une dizaine de voitures de marques prestigieuses. De l'intérieur, une musique rap mêlée aux rires des invités, emplissait les lieux.
A les voir chanter et danser, l'on se demande vraiment si, ailleurs que dans cet endroit, des millions d'autres Algériens peinent à joindre les deux bouts. Il semble que ces fils et filles de riches n'ont aucun souci. Tout baigne. La fête continue. Toutes les marques de jus, de boissons gazeuses, desserts et chocolats occupent une bonne partie des longues tables posées ici et là. Pas de serveurs et encore moins de serveuses, chacun se sert selon son goût et ses préférences. Pas beaucoup de débats et chacun se donne à c'ur joie au rythme de la musique. Retranché, dans un coin, en train de discuter avec une fille, un garçon attire notre attention. Ces deux-là, contrairement à beaucoup d'autres, n'ont pas été du tout attirés par la musique. Assis l'un à côté de l'autre, ils avaient l'air trop intimes.
Donc, pas facile de les interrompre craignant leur réaction. Mounir n'a rien raté de ce manège. Conscient de l'objectif de notre présence, il a tout de suite «arrangé» une brève rencontre. Renseignement pris : Sofiane est fils d'un chef de daïra d'Alger «très proche» des hautes sphères politiques de notre pays. A en croire Mounir, il est également neveu d'un ex-commandant de l'ANP tué lors d'un accrochage avec les sbires du GIA en 1994. Il semble complètement désintéressé par la vie politique. En revanche, il connaît tout le territoire national.
Egalement bon nombre de capitales et villes maghrébines et européennes. «Ni les partis ni les associations ne m'intéressent, et encore moins ces élections qui suscitent tant de tapage. Ce qui m'importe moi, c'est de m'offrir le maximum de moments de joie et franchement j'en ai eu beaucoup dans ma vie. Je ne manque de rien. Je m'en réjouis, on ne choisit pas son papa et j'ai le meilleur au monde», nous dira Sofiane. Quant à son amie, elle s'est avérée être la petite-fille d'un sénateur du tiers présidentiel. Ilham s'est juste contentée d'affirmer qu'«elle mène une vie digne d'une princesse du Moyen-Orient». Pas du tout étonnant sachant qu'au moment où elle rigole et s'amuse, «son chauffeur» est cloué au siège d'une luxueuse berline française en train d'attendre qu'elle finisse de faire la fête.