Nous étions bien
dans notre innocence dans ce que nous avions alors comme fin de semaine,
c'est-à-dire le samedi après midi et la journée du dimanche. Nous travaillions
les cinq jours et demi et à partir de samedi à midi, c'était le repos
hebdomadaire. Tout était clair, simple et facile pour de gens comme nous qui
venions à peine de sortir d'une longue période coloniale et qui, plus est,
comptions un taux important d'analphabètes. Les lycéens et écoliers avaient en
plus, pour leur part, le jeudi après midi histoire de se dégourdir les
méninges. Et ceux qui étaient au travail ne pouvaient pas accomplir la prière
du vendredi en son temps. Selon la culture d'alors cela n'offusquait personne.
Ni ceux directement concernés ni ceux qui n'avaient aucun rapport avec la
chose.
En haut lieu, cependant, on décida de changer
les jours de repos hebdomadaire. Jeudi à la place de samedi et vendredi à la
place de dimanche, et voilà notre fin de semaine revue et corrigée. Au début ce
fut un peu compliqué mais, les jours passant, les choses redevenaient tout
aussi normales qu'elles le furent. Cinq jours et demi de travail et dès que
jeudi midi est là, c'est le repos de fin de semaine. Les lycéens et écoliers
avaient, pour leur part cette fois, le lundi après midi pour se décrasser la
cervelle et, en prime, la possibilité pour ceux qui prient d'aller à la mosquée
accomplir la prière du vendredi. Selon la culture d'alors, rien n'offusquait
personne. Ni le repos du jeudi et vendredi, ni la prière dans la mosquée, ni le
lundi après midi pour les lycées et collèges. Tout était parfait pour tous.
Certains, on pourrait savoir pourquoi, se sont soudain sentis victimes d'un mal
de vendredi terrible. Dès qu'ils entendent parler de vendredi, ils se mettent à
se plaindre de nausée, de mal de tête, de vertiges et on en passe... D'autres, on
peut aussi savoir pourquoi, se sont mis à éprouver d'un coup des sensations
d'étouffement quant au jeudi après midi.
Rien qu'en se rappelant que le week-end
commence le jeudi à midi, ils voient pousser sur leur peau si sensible à ce
jour, de gros boutons et éprouvent une grande sensation de démangeaison. Ils se
mirent à demander que le week-end soit changé, surtout que maintenant,
disent-ils, nous n'avons pas autant d'analphabètes qu'avant et cela fait
longtemps que nous ne sommes plus colonisées !!!.
D'autres coururent à l'appel. Avec nos deux
jours d'arrêt de travail et le week-end des gens normaux, soutiennent-ils, cela
fait quatre jours d'inactivité par semaine. Drôle de calcul, il faut en
convenir car s'il était question de quatre jours cela aurait concerné aussi nos
partenaires mais, à priori ils n'en furent point affectés, pas plus que nous en
tout cas.
Cédant à la pression ou bien voulant donner
l'impression de céder quelque chose, ceux d'en haut décidèrent de changer le
week-end. La décision fut prise et l'application ne tarda pas sauf que personne
ne sut ce qu'il faut appliquer.
Ni ceux qui se cachant derrière un islam dont
ils ne saisissent que peu de choses, ni ceux accrochés ç une fausse conception
de la modernité ne surent ce qu'il y lieu de faire. D'aucuns optent pour jeudi
après midi et vendredi, c'est-à-dire pour aucun changement. D'autres optèrent
pour jeudi après midi et vendredi, c'est-à-dire un changement fictif. D'autres
préfèrent parler de vendredi après midi et samedi tout en signifiant leur
mécontentement parce qu'ils continuent à être soulevés par leur mal de vendredi
et ne savent pas quoi faire pour s'en débarrasser. D'autres rêvent de samedi et
dimanche pour mieux ressembler aux autres, des autres rives.
Les écoles ne savent plus où donner de la
tête. Avoir sept jours dans la semaine et ne pas savoir lequel choisir pour se
reposer, cela nous est vraiment typique. Avoir une prière à effectuer vendredi
à la mosquée et se demander quand la faire, c'est aussi bien de chez nous. Même
les écoles ne savent plus comment faire. Il paraît que pour résoudre ce
problème le ministère de l'éducation nationale aurait donné feu vert aux
établissements pour se débrouiller. Qu'un établissement prenne son week-end le
jeudi et vendredi, ce sera bien vu, qu'un autre le prenne le vendredi et
samedi, cela aussi sera bien vu, qu'un troisième le prenne le dimanche et le
mercredi, ou le «mardredi» et le «mercranche», ce sera tout aussi bien, pourvu
que cesse, semble dire le ministère de l'éducation nationale, ce couic-end !
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Posté Le : 29/10/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Aissa Hireche
Source : www.lequotidien-oran.com