Les promesses faites par les autorités publiques de venir à bout du commerce informel restent sans suite. Depuis des années elles multiplient les annonces et les visites sur le terrain, les résultats tardent à venir. C'est que les actions engagées sont peu efficaces et le fléau a atteint des degrés tels qu'il devient difficile à contourner. La situation est d'autant plus critique que ces mêmes autorités publiques persistent dans leur politique de laisser-aller, se murent souvent dans le silence, incapables de faire face aux conséquences et aux facteurs à l'origine de l'amplification de ce phénomène. Parfois, elles sont carrément complices, justement par leur silence ou en s'impliquant directement ou indirectement dans les réseaux (achat et vente, détails et gros). C'est une véritable menace pour l'économie nationale.Partout dans le pays, dans la capitale, les petites et grandes villes, dans les villages et les localités éloignées, les marchés et les marchands ambulants sont présents, de plus en plus sollicités par les ménages. Leurprésence est salutaire pour de nombreuses familles, celles-ci y trouvent leur compte du fait qu'il y a de tout et à des prix abordables. Rien à voir avec les prix affichés dans les magasins et les grandes surfaces. Avec la flambée actuelle des prix de tous les produits, engendrée notamment par la baisse de la valeur du dinar, l'informel promet de s'inviter davantage dans les foyers pour les besoins du quotidien en alimentation, en habillement... jusqu'au trousseau de mariage et autres.L'informel vient à la rescousse de centaines de familles, en ces temps de dépenses de toutes sortes. Les petites bourses, les bourses moyennes, mais aussi des familles de cadres et de hauts fonctionnaires. Tous s'y rendent pour de bonnes affaires. Et les bonnes affaires il y en a toujours, à toutes les périodes de l'année. «C'est un gros mensonge cette histoire d'éradiquer les marchés informels. Ce ne pourra jamais se faire. Pour que cela marche, il faut assurer de l'emploi aux vendeurs, autrement dit lutter efficacement contre le chômage. Créer de l'emploi et développer des entreprises créatrices d'emplois. Ce n'est pas le cas présentement... », relèvent deux pères de familles. Ces derniers affirment que c'est sur leur route vers Gué de Constantine, à leur sortie du travail à Alger-centre, qu'ils font leurs achats, en légumes notamment. «Il y a des camionnettes sur la route. Et il y a de tout. La carotte à 25 DA le kilo, alors que dans le magasin près de chez nous, elle est à 50 DA. La pomme de terre à 75 DA, alors que dans le magasin, elle est à 95 DA. Il est vrai que je trouve des difficultés pour le stationnement, mais je préfère prendre le risque de m'arrêter et de bloquer parfois la circulation plutôt que de jeter mon argent là où je passe. En ces temps de dévaluation du dinar et de cherté des prix de tous les produits, il faut savoir gérer son budget.» Au marché de la Place des Martyrs, rétréci pour cause des travaux du métro, les jeunes femmes ne ratent pas leur tournée dans les différents espaces. «J'y viens régulièrement. Il faut justement venir régulièrement pour repérer ceux qui vendent mieux en qualité et en prix. Il faut aussi connaître les bonnes périodes pour les bons achats», dit une jeune femme, la trentaine.Elle est cadre dans une entreprise privée : «Je travaille et je perçois un bon salaire parce que j'occupe un poste de responsable, mais cela n'est pas une raison pour que je gaspille mon argent. Je suis d'une taille moyenne, je ne trouve pas de difficultés à trouver l'habit qui correspond à ma taille. Pourquoi ne pas en profiter' D'autant qu'il y a de tout, absolument de tout. Et cela me permet d'économiser pour d'autres dépenses.» Une femme, la cinquantaine, confie, sans gêne, que c'est de ce marché qu'elle a acheté pratiquement tout ce qui est nécessaire pour le trousseau de mariage de sa fille. «Non, non, je ne souhaiterais jamais qu'ils fassent partir ces jeunes vendeurs. Nous faisons de bonnes affaires et eux aussi ont besoin de gagner leur vie. Ils ne travaillent pas que pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs familles. Il faut penser aux milliers de familles qui vivent de ce commerce informel», dit une autre femme, soulignant au passage que mêmes des femmes, sans ressources activent aux côtés des hommes dans ces marchés. «Il le faut, c'est mieux que de mendier ou de faire autre chose... », dit-elle. Ce qui est regrettable, au niveau de ces marchés, c'est le travail des enfants. Des enfants travailleurs que l'on retrouve également sur l'autoroute menant vers Tipasa et autres. «C'est ça qu'il faut condamner. Le travail des enfants ne pourrait être toléré quelle que soit la raison», lancent deux automobilistes. Les services du ministère du Travail, en collaboration avec d'autres secteurs, effectuent des enquêtes sur le sujet, constatent la gravité de la situation, mais ne réagissent pas de la bonne manière. Que des promesses ! Que des constats d'échecs !Le marché informel a encore de beaux jours devant lui tant que les pouvoirs publics ne prennent pas les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité financière de chaque citoyen et la stabilité des familles. L'économie algérienne est à la traîne. La présence de ces marchés n'arrange pas que les petites bourses. La disparition de ces marchés, de surcroît en ayant recours à la force publique, est loin d'être une solution à l'heure actuelle. L'expérience passée en la matière a bien montré combien la chose est difficile. Partout où il y a eu des tentatives d'éradiquer ces espaces dits non autorisés -alors qu'ils le sont par la force des choses- il y a eu échec. Les marchands protestaient avec force contre la décision, mais aussi contre l'utilisation de la force dans son application. De violentes confrontations se sont produites et risquent de se produire encore entre les preneurs de ces espaces et les agents de police déployés en grand nombre. Le problème n'est pas dans la prolifération de ces espaces, mais dans la persistance du chômage et l'absence d'une véritable politique de relance économique. Même l'Ugcaa (Union générale des commerçants et artisans algériens), qui ne cesse de les dénoncer, est complice dans cette situation. Entre les paroles et les actes, il y a un large fossé. Pour dégager sa responsabilité, l'Union plaide carrément pour la reconnaissance de cet informel. Pour son intégration officielle dans le commerce légal.K. M.
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Posté Le : 18/03/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Karima Mokrani
Source : www.latribune-online.com