Algérie

Le «mange-oignon» de Sarkozy



Trop forte, l'exhalaison est de plus en plus acre et gagne en pestilence à mesure que se vide la partie haute du sablier. A un mois et demi de l'élection présidentielle, la très légère remontée dans les sondages du président sortant français paraît être plus l'effet d'un ajustement mécanique que d'intentions de vote qui sortiraient du deuil une popularité toujours en berne. Le candidat adverse maintenant toujours la distance et l'avance, la panique s'empare de l'état-major de campagne de Sarkozy. Dans son équipe, les «baroudeurs» qui ouvraient les hostilités font désormais piètre figure, même s'ils font un effort de contenance en n'affichant pas ouvertement un profil bas. La ministre Nadine Morano, remarquable de propos insipides et contre-productifs, a dû être invitée à la mettre en sourdine. Il restait Claude Guéant et ses outrances verbales très ciblées et particulièrement stigmatisantes mais qui, pour le malheur de celui qu'elles étaient censées relever dans les sondages, n'ont pas eu de meilleur effet. Ou alors si peu. Sa dernière trouvaille serait loufoque et tout juste ridicule, si elle n'était une nouvelle insulte de trop pour des millions de Français et d'étrangersmusulmans. La polémique sur la traçabilité de la viande hallal ouverte par la candidate de l'extrême droite n'était pas encore retombée que le ministre de l'Intérieur et des? Cultes français est allé tirer du même caniveau des clichés racistes une autre boule puante pour empester davantage une atmosphère politique déjà très délétère. Le spectre qu'il agite est toujours celui de la peur. Le 2 février dernier, lors d'un meeting à Nancy, il établit un lien entre le droit de vote aux étrangers (proposition du candidat Hollande) aux élections municipales et les repas hallal dans les cantines scolaires. «Nous ne voulons pas que des conseillers municipaux étrangers rendent obligatoire la nourriture hallal dans les repas des cantines, ou réglementent les piscines à l'encontre des principes de mixité», a asséné le ministre, oubliant qu'il avait en charge la gestion des cultes en conformité avec les principes de la laïcité, c'est-à-dire sans sectarisme et sans interdits pour une pratique religieuse respectueuse des valeurs de la République. Quelques semaines plus tôt, l'ancien préfet secrétaire général de l'Elysée s'était publiquement laissé aller à une grave divagation sur les civilisations, établissant une supériorité entre elles pour mieux minorer et humilier la civilisation musulmane. Que ne ferait-il pour capter les voix du parti raciste de Le Pen ! L'homme s'est fait une solide réputation de provocateur au service de son chef, et il faut reconnaître que, pour un détenteur de portefeuille souverain, organisateur en chef des consultations électorales, le fait est assez inédit dans les annales politiques françaises.
Habitué à manger de l'oignon avec la bouche de Guéant pour que la sienne n'exhale pas de relents fétides (proverbe rural algérien), Sarkozy s'est empressé, cette fois, d'emboîter le pas à son ministre de l'Intérieur. Le lendemain, dans un meeting à Bordeaux, manifestement en proie au doute et à la panique des grandes incertitudes, il reprend à son compte les propos discriminatoires, sans même les nuancer. On le comprend, maintenant, le président sortant n'a pas d'autre choix que de mettre le cap à droite? toute.
La droite traditionnelle française étant en grande partie phagocytée par le parti de la majorité, c'est naturellement l'électorat du Front national qui est convoité. Le racisme ? il faut appeler les choses par leur nom ? comme socle et moteur de campagne principal d'une campagne électorale, Sarkozy a accepté de dépasser par le bas le degré zéro de la politique. En dessous de zéro, c'est le négativisme absolu, la flétrissure et la disparition d'une certaine morale au profit de l'instinct et de l'émotionnel qui tordent le coup à la raison. Tiens, la raison au pays de Descartes.
A. S.


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