Une semaine après la mort atroce du marchand de poissons Mohcine Fikri, la contestation ne faiblit pas au Maroc.Epicentre de la colère populaire, Al Hoceïma (Rif) d'où est originaire la victime, bat au rythme d'une révolte sociale sans précédent depuis le Mouvement du 20 février de 2011. Chaque soir des milliers de citoyens, femmes et hommes, investissent la place centrale pour crier leur indignation et dénoncer en termes forts les agissements du makhzen.Durant la nuit de vendredi à samedi, pas moins de 50 000 personnes ont marché avec des bougies en signe de deuil. Brandissant des drapeaux berbères et ceux de la République de Abdelkrim El Khettabi, les manifestants exigeaient fermement la «traduction devant la justice des responsables» de la mort de Mohcine Fikri, mais également «la justice sociale, la fin de la hogra». La revendication d'un «Maroc réellement démocratique» se faisait fortement entendre. Parfois, fait rare, des slogans hostiles au roi ont été entonnés.La région du Rif est historiquement frondeuse, rebelle et hostile au régime. L'éphémère République (1921-1927) reste dans l'imaginaire des Rifains comme un marqueur historique.Depuis une semaine, d'autres villes du royaume ne sont pas restées à l'écart de la contestation, qui commence à prendre des allures d'«insurrection». Une cinquantaine de villes ont connu des marches et des rassemblements. Ni les promesses du ministre de l'Intérieur, Mohamed Hassad, de faire «toute la lumière» sur les circonstances du drame, ni le silence des partis politiques toutes tendances confondues, à l'exception de la Fédération de la gauche démocratique, ni même la campagne d'intox, ni les prêches du vendredi n'ont pu ramener le calme. Tirant les enseignements de l'expérience du 20 Février, les protestataires jurent de ne pas «lâcher».La mobilisation, qui se généralise commence à toucher la diaspora et à prendre forme, se déroule sans heurts. Les manifestants tiennent au caractère pacifique et moderne de la contestation. Jusque-là, le pari est réussi. Ils ont même déjoué les tentatives «démoralisatrices» de ceux qui estiment que la mobilisation est «synonyme de fitna».Hier soir, de nombreuses marches et rassemblements ont encore été observés dans plusieurs villes du pays, alors que le Premier ministre islamiste, Abdelillah Benkirane, multiplie les appels en direction des militants de sa formation, le Parti de la justice et du développement (PJD), à ne pas rejoindre les manifestants.De son côté, le roi Mohammed VI, qui a tenté d' «absorber» la colère en présentant ses condoléances à la famille de la victime et en dépêchant sur place son ministre de l'Intérieur, est resté silencieux. D'après le site d'information Le Desk, Mohammed VI se trouve à Libreville et il sera aujourd'hui à Dakar où il prononcera un discours.Sur sa page facebook, le journaliste et critique Ali Anouzla s'interroge : «Où passé le roi '» «Ces événements ont fait disparaître la démocratie marocaine, fait taire les partis et leurs leaders et paralysé ses institutions. La vérité a éclaté : le peuple est dans la rue, il conteste. L'Etat, ses institutions, ses partis, ses médias et ses élites sont sur le banc des accusés. Le roi se trouve face à la rue en colère», indique-t-il.En somme, cette mobilisation qui défie ouvertement le palais, fait planer son ombre sur le rendez-vous climatique international qu'organisera le Maroc. Le sommet de la COP22, qui se tiendra à partir du 16 novembre à Marrakech, voulu par Rabat comme une démonstration diplomatique, risque de connaître quelques couacs. De toute évidence, le Premier ministre, Abdelillah Benkirane, qui peine à former son gouvernement, se trouve déjà cerné par la colère de la rue marocaine. Un sérieux avertissement pour le palais royal.
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Posté Le : 06/11/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Hacen Ouali
Source : www.elwatan.com