Algérie

"Le Hirak ne mourra pas..."



Et c'est un Lakhdar Bouregâa, bon pied bon ?il, et le verbe facile, qui nous reçoit chez lui. Sans protocole aucun. Loin du ballet des visiteurs qui ont accouru à son domicile à sa sortie de prison.Sous un soleil de plomb agrémenté d'un haut taux d'humidité donnant à Alger un air de serre, le 20 août vient d'être célébré. Sans festivités officielles. Ou timidement si l'on excepte son caractère populaire marqué par un afflux exceptionnel vers le "sanctuaire" d'Ifri.
C'est dans cette atmosphère particulière, qu'est venue l'idée de "revisiter" ? et c'est le cas de le dire ? quelques séquences de l'histoire de la Révolution et des événements de la période post-indépendance, avec le commandant Lakhdar Bouregâa, un acteur emblématique de ces deux "calendriers" hautement symboliques.
Bien entendu, il était à Ifri, cet autre lieu historique réapproprié par de véritables opposants, rejoints ces dernières années par une nouvelle génération que l'on croyait "amorphe" et complètement détachée de ces faits qui ont fait l'Algérie d'aujourd'hui. Mais Lakhdar Bouregâa ne s'y attarde pas trop.
Il opte pour une discussion où se rejoignent quelques faits datant de la période de la lutte avec les luttes actuelles ; sur un ton anecdotique.
Et c'est un Lakhdar Bouregâa, bon pied bon ?il, et le verbe facile, qui nous reçoit chez lui. Sans protocole aucun. Loin du ballet des visiteurs qui ont accouru à son domicile à sa sortie de prison.
"Nombreux sont ceux de tous les courants et de toutes les tendances politiques qui sont venus me rendre visite", dit-il sur un ton un tantinet amusé. Ce n'est qu'un intermède ou une entrée en matière. L'on retiendra particulièrement les manifestations du 11 Décembre 1960 à Alger, un événement décrit comme spontané par certains et dont Lakhdar Bouregâa détaillera l'organisation.
Cette manifestation a été "improvisée" à la hâte pour contrer les partisans de l'Algérie française qui avaient planifié de saborder le discours de De Gaulle en le recevant à coups de tomates et en le chahutant. Et ce sont surtout les femmes qui ont été au premier plan de cette manifestation.
Une manière pour M. Bouregâa de récuser "la classification" des combattants de la Révolution. D'une manière ou d'une autre, tout le peuple a participé, chacun à sa manière et selon ses moyens, à la Guerre de libération.
Les harkis qui ont choisi l'autre camp ; on les connaît, raconte-t-il. Ne manquant pas d'humour pour agrémenter son "récit", il relève, toujours avec le sourire, le détail de ces uniformes impeccablement repassés avec lesquels "certains" ont pris des photos pour prouver leur présence au maquis. Eclat de rire !
Comme si on pouvait être bien sapé au maquis ! Et Si Lakhdar de s'étonner de la propension de certains à essayer par tous les moyens de prouver qu'ils ont rejoint les moudjahidine au maquis. "Chacun a pris part au combat à l'endroit où il était et non pas uniquement ceux qui ont pris le maquis", précise-t-il. Mais vite le présent s'impose dans ce "délicieux" échange qu'on ne voudrait surtout pas voir s'achever.
Et en cette circonstance, la première image qui s'impose est celle de ces jeunes du Hirak qui font preuve d'une "incroyable" conscience et d'un grand génie en "adoptant" et en rendant hommage aux figures de la Révolution. "Une troisième génération en laquelle on doit avoir confiance et à laquelle on doit donner sa chance", assène-t-il avec une pointe de regret que des responsables continuent de s'accrocher au pouvoir et refusent de passer le témoin.
"Il faut écouter ces jeunes. Ils ont des choses à dire. Ils ont des idées et une conception de l'Etat et de ses institutions", résume-t-il en précisant que le Hirak, ce mouvement populaire né dans le sillage du refus du 5e mandat, "n'est pas une ambition politique, ni un projet de société. C'est une démarche".
"Le Hirak est une idée", ajoute-t-il. Un concept, au sens philosophique du terme. Raison d'ailleurs pour laquelle Lakhdar Bouregâa demeure optimiste quant à l'avenir de ce mouvement. "J'ai une pomme, vous me la demandez, je vous la donne. Vous aurez une pomme et moi, rien.
Mais si j'ai une idée et que je vous la donne, nous serons deux à l'avoir et elle ne disparaîtra pas", indique-t-il pour argumenter son optimisme. Une idée qui va survivre d'autant plus qu'elle n'ambitionne pas au leadership, mais s'exprime simplement pour le changement. Aussi, regrette-t-il que les autorités du pays s'écartent du Hirak au lieu de l'écouter et d'aller à sa rencontre.
La recette de l'ancien combattant et opposant Lakhdar Bouregâa est pourtant simple et pleine de bon sens : comme le mouvement ne prétend pas avoir un leader ou des chefs, il suffit d'aller discuter, à travers les régions du pays avec les figures locales en vue, d'entendre leurs revendications, de prendre, par la suite, des mesures pour apaiser le climat et attendre de leur côté une attitude de souplesse qui peut aboutir à un processus pour désamorcer la crise.
Ce qui ne semble pas être dans les cordes du pouvoir ou de pans de ce pouvoir qui privilégie la man?uvre, comme ce fut le cas au début du Hirak où l'on a essayé de l'orienter vers la violence "pour instaurer", selon ses dires, l'état de siège ; l'anéantir de toute velléité de révolte future. Grâce à son caractère pacifique, le Hirak a déjoué les plans et les pronostics des tenants du pouvoir.

Djilali B.


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