Algérie

Le gaz en conclave à Moscou


Finalement, c?est à Moscou que les discussions préliminaires sur les contours d?une future organisation des pays exportateurs de gaz vont se tenir au mois de juillet prochain. Pouvait-on espérer plus ou mieux ? II n?y a pas si longtemps, l?évocation même de cette idée nous avait entraîné sur le bûcher pour « sorcellerie » y compris par certains de nos compatriotes qui, au pire, criaient à l?hérésie et au mieux ne comprenaient pas son utilité. Le 7e forum des pays exportateurs de gaz (FPEG, c?est certainement le nom qu?il prendra) a été annoncé au forum économique mondial de Davos, en Suisse (tout un symbole), par le ministre de l?Energie du... Qatar, ce pays même qui était le plus réfractaire à cette idée, il y a six mois à peine ! Comme écrit dans ce même journal, il y a trois mois environ, la mise en ?uvre d?une organisation de concertation des pays producteurs et exportateurs de gaz n?est pas une vue de l?esprit, mais l?aboutissement normal d?une maturation d?intérêts convergents à moyen et long termes. Encore une fois, les arguments développés pour affirmer l?inutilité d?une telle organisation des pays exportateurs de gaz ont tous montré leurs limites et leurs faiblesses. En effet, que ce soit la durée des contrats (entre 10 et 15 ans), le niveau des prix relatifs indexés aux prix du pétrole1 ou la régionalisation des marchés (hors GNL), nous avons démontré que ces arguments factices n?étaient en fait qu?un écran de fumée utilisé par de gros lobbies qui n?entendent pas voir une organisation de pays exportateurs de gaz défendre ses intérêts légitimes. Cette évidence est enfin entre les mains d?une expertise internationale qui débouchera très certainement sur la conclusion (intuitivement établie) de l?utilité d?un tel organe de concertation non seulement pour les pays exportateurs, mais également pour ceux consommateurs. En effet, le temps où le gaz était tout simplement brûlé et servait de décor à un champ pétrolier, est révolu. Energie non renouvelable par excellence, le gaz naturel mérite un traitement spécifique pour ses qualités et son apport dans le bilan énergétique mondial. Les problèmes de sa prospection, de sa production, de son transport, de son utilisation et de son prix nécessitent une concertation entre producteurs dans un premier temps et avec les consommateurs de manière à trouver les solutions appropriées qui satisfassent les besoins et intérêts des deux parties. II faut ajouter à cela les industries gazo-chimiques en aval de ce produit brut qui commencent à prendre progressivement leur place et se développent dans cette branche en pleine expansion. Le défi n?est pas simple à relever car l?harmonisation des politiques gazières des différents pays va nécessiter des efforts considérables aux pays potentiellement membres, comme la Russie, l?Iran, le Qatar, le Pérou, l?Argentine, le Venezuela, la Bolivie, la Norvège et l?Algérie...2 II est clair que les articles qui vont constituer l?ossature de la charte constitutive seront empruntés à celle de l?Opep, mais le travail essentiel réside dans le fait que les pays exportateurs de gaz devront se pencher sur tous les éléments concourant à la structuration du marché gazier et les conditions de son expansion. En effet, devront être abordés les problèmes technologiques, de transport, les conditions contractuelles et l?élaboration d?une politique des prix relatifs du gaz ainsi que la monnaie de référence (une déconnection du dollar US n?est pas à exclure). Ce n?est donc pas une rencontre de dilettantisme qui se profile cet été à Moscou, mais bien la mise en ?uvre d?une organisation complexe qui aura des missions très précises, des délais à respecter et en bout de course des obligations de résultats. Sous le contrôle des pays membres, cet instrument devra éviter les politiques de défiance et de confrontation avec les pays consommateurs, que certains pays redoutent (comme ce fut le cas durant les premières années après la création de l?Opep), pour s?orienter vers une stratégie de concertation entre partenaires. II ne faut pas retomber dans les tendances cycliques de chute ou d?augmentation des prix, néfastes pour tous, et notamment celles motivées par la spéculation. De même que la préservation de cette énergie non renouvelable devrait retenir l?attention des producteurs et des consommateurs. Les investissements dans le secteur gazier étant colossaux (sur terre comme sous les mers), il est bien entendu que le problème du financement et de la rentabilité se pose avec acuité. S?agissant d?investissements à très long terme, des produits financiers appropriés devraient être développés sur ce segment de marché. Les problèmes de la sécurité des approvisionnements, celle des sites et des voies de transport devront faire l?objet d?âpres discussions et négociations avec tous les partenaires du débat, les pays exportateurs et consommateurs. La distribution du produit, jusqu?aux consommateurs finaux, doit également figurer dans les agendas aux fins de concertation et également de prise en charge. II va sans dire que d?autres considérations, d?ordre géopolitique et stratégique, sont à prendre en ligne de compte dans la phase de démarrage de la création de cette organisation. On ne peut occulter les dépendances relatives que ce produit génère sur le long terme et ses répercussions sur les équilibres instables dans certaines régions et en particulier en Europe occidentale et orientale. Cette dépendance relative doit nous encourager à favoriser le dialogue et la concertation, d?où la nécessité de création d?un cadre approprié devant l?abriter afin de sortir d?une logique de défiance et de confrontation. La recherche d?un équilibre entre les intérêts objectifs de chacun des partenaires est un objectif stratégique qui s?impose à tous. Le gaz joue déjà un rôle de force économique de convergence au Maghreb comme furent le charbon et l?acier dans la construction européenne avec le traité de 1957 de la CECA. Cette situation va se densifier dans cette aire géographique et également dans d?autres espaces homogènes. Nul doute que le rendez-vous de cet été au bord de la Moscova va porter ses fruits. L?auteur est : Membre fondateur de l?Association des universitaires algériens pour la promotion des études de sécurité nationale (Asena)  (1) Un niveau de prix relatif de 120 $ le baril n?est plus un fantasme  (2) La Libye vient de déclarer son intention de rejoindre le club des pays exportateurs de gaz, il y a quelques jours
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)