Algérie

Le gaz de schiste, un pari difficile à atteindre



Avec 22 milliards de mètres cubes, l'Algérie détient le troisième plus grand gisement de gaz de schiste au monde. Une richesse, toutefois, qu'elle ne pourra pas exploiter de sitôt.C'est ce qu'explique un article livré hier par l'agence Reuters, affirmant que l'exploitation du gaz de schiste en Algérie «prendra du temps et nécessitera des réformes difficiles». Malgré l'annonce de pourparlers avec l'entreprise italienne ENI et la française Total, il n'est pas dit que l'exploitation se fera rapidement.
«Les nouveaux projets de gaz de schiste ne se concrétiseront pas du jour au lendemain, car seules des données géologiques limitées existent sur le potentiel algérien, et l'Algérie doit modifier sa législation pour offrir des conditions plus attrayantes aux entreprises étrangères, qui sont sélectives sur les investissements à bas prix de l'énergie.» Les trois dernières concessions présentées à l'exploitation du schiste n'ont pas attiré une foule de soumissionnaires. L'exploitation du schiste en Algérie est présentée comme la réponse à l'augmentation de la consommation locale d'énergie qui a plus que triplé, mais aussi comme un moyen de mieux honorer les exportations vers l'Europe, qui ont souffert ces derniers temps des retards.
Les acheteurs européens de gaz craignent même que Sonatrach puisse avoir des difficultés à remplir ses obligations et se demandent s'il faut renouveler certains contrats. C'est dire la délicate situation dans laquelle se trouve la compagnie nationale. Il est d'ailleurs attendu que le bilan des exportations de l'année 2017 affiche une vente de 54 milliards de mètres cubes, contre 57 milliards en 2016. Selon Reuters, les compagnies étrangères attendent de voir de quoi seront faites les réformes dans le secteur pour se prononcer sur d'éventuels contrats de coopération. «Les principales compagnies occidentales sont inquiètes au sujet de l'approvisionnement en gaz et la chute des exportations algériennes.
Elles veulent aussi faire pression et briser le lien de l'indexation des prix du gaz sur ceux du pétrole qui leur entraîne des pertes importantes en cas de prix du brut élevé», indique l'article en question, qui note que le principal défi auquel doit faire face le PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour, est de secouer la compagnie pétrolière algérienne, «ce qui est une tâche difficile dans un pays, qui, connu pour se méfier des influences étrangères, pourrait résister aux réformes». Selon l'expert énergétique Geoff Porter, directeur du North Africa Risk Consulting, l'Algérie a pris du retard dans l'exploitation du schiste. «Elle aurait dû lancer son exploitation il y a des années, mais elle manquait de leadership cohérent et coordonné», déclare-t-il à Reuters. Et de noter que ce que «veut faire Ould Kaddour, c'est de réveiller Sonatrach de son sommeil...
Mais les changements peuvent être douloureux. Ils entraîneront une perte de prestige pour certains acteurs de Sonatrach et cela signifiera aussi des heures supplémentaires de travail pour certains employés».
La compagnie nationale subit une pression importante du fait de l'obligation d'augmenter sa production, faire face à la consommation locale et affronter sereinement la concurrence de plus en plus féroce sur le marché du gaz en Europe. Troisième fournisseur de gaz de l'Europe après la Russie et la Norvège, l'Algérie se doit d'honorer la totalité de ses livraisons vers le vieux continent au risque de voir ses parts de marché changer de main et accroître la dépendance de l'Europe vis-à-vis du gaz russe. Selon une source citée par Reuters, «l'Algérie a besoin des recettes d'exportation pour soutenir le budget de l'Etat, mais le manque d'investissements et la baisse des tendances de production sont très préoccupants». Un importateur français de gaz a déclaré aussi à Reuters que «la baisse de la production en Algérie menace sa capacité à maintenir les flux». Et d'ajouter : «Nous regardons cela de près, et ce, depuis un certain temps.»
Une stagnation a frappé la production de gaz et de pétrole en raison du manque d'investissements étrangers. «Même avec de nouveaux champs prévus en 2020, l'Algérie ne maintiendra la production actuelle de gaz à 94 milliards de mètres cubes que si elle arrive à faire de grands progrès dans l'exploitation du schiste», affirment à Reuters des sources de Sonatrach. Pour faire face à la nouvelle donne du marché, des sources de la même compagnie affirment aussi que Sonatrach est «prête à proposer à l'avenir des contrats à court terme plus souples».
Des incertitudes demeurent posées de ce côté de la Méditerranée sur le schiste. Un ancien ministre de l'Energie a déclaré à Reuters qu'il était nécessaire de s'assurer du potentiel de schiste en Algérie en allant au-delà des résultats de la Commission géologique des Etats-Unis. Un ingénieur de Sonatrach estime, quant à lui, que «le schiste ne fonctionne efficacement aux Etats-Unis que pour le moment, quand ils auront besoin de sept jours pour mettre en ligne un puits, nous aurons besoin de 70 jours minimum».
La nouvelle loi sur les hydrocarbures est donc très attendue par les majors pétrolières pour voir dans quelle direction soufflera le vent en Algérie.


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