Algérie

Le gaz de schiste inquiète: Sonatrach se lance dans un projet très controversé



Sonatrach va engager, au début de l'année prochaine, ses premières explorations de gaz de schiste dans le sud-ouest du pays. Nordine Cherouati, le PDG du groupe public, a confirmé un «agenda» déjà annoncé par le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, en mars dernier à Houston, au Cera Week 2011 (Cambridge Energy Research Associates), une importante conférence annuelle des acteurs des hydrocarbures. Le domaine du gaz de schiste reste très controversé…

 Le ministre algérien y avait «fait sensation», selon la formule du New York Times, en indiquant que l'Algérie disposait de réserves en gaz de schiste aussi importantes que ceux «de certains des champs américains majeurs». M. Yousfi avait indiqué qu'un programme pilote était en cours de préparation. «Nous sommes en train de choisir une région où toutes les conditions sont réunies. Le programme sera réalisé par la société nationale Sonatrach et un partenaire étranger», avait-il déclaré. Ce programme pilote va être engagé. Selon Cherouati, des mémorandums d'entente ont été déjà signés en ce sens avec des compagnies internationales spécialisées pour mettre en application les techniques permettant l'extraction du gaz contenu en profondeur dans la roche mère, a-t-il indiqué. L'une des premières missions de ce programme sera de vérifier le potentiel en gaz de schiste et de «s'assurer s'il est possible d'extraire ce gaz dans des conditions économiques acceptables, le coût étant fonction de différents paramètres tels que la profondeur du gisement et l'éloignement par rapport au centre de consommation».

Les propos du PDG de Sonatrach restent marqués par la prudence. A juste titre. Aux Etats-Unis, là où l'activité est la plus développée, des doutes sur la rentabilité du gaz de schiste se sont exprimés récemment. Le coût bas du gaz rendrait l'investissement peu rentable et la tendance est de s'orienter vers le «pétrole de schiste» qui offre des marges beaucoup plus substantielles. Outre la question de la rentabilité de l'investissement, il y a un coût environnemental de l'exploitation des gaz schisteux qui suscite l'inquiétude et la mobilisation des mouvements de défense de l'environnement. Pour les responsables algériens, le gaz de schiste peut être une option pour l'avenir afin de rester acteur du marché. Il reste à tenir compte aussi bien des questions de rentabilité et des coûts environnementaux

Des techniques d'extraction contestées

Pour le moment, le développement, aux Etats-Unis notamment, de l'extraction du gaz de schiste a une incidence sur les prix du gaz sur le marché libre et conforte une tendance au découplage entre le prix du gaz et celui du pétrole. Une perspective plutôt inquiétante pour les équilibres macro-économiques de l'Algérie, selon une étude réalisée par deux experts du FMI.

Mais la rentabilité du gaz de schiste est désormais sujette à controverse. En juin dernier, un article de New York Times a mis en doute cette rentabilité et évoque une bulle spéculative. Et le gaz de schiste pourrait être dépassé par le pétrole de schiste qui a l'assurance d'une rentabilité plus certaine. Selon des projections de l'AIE, la production en pétrole de schiste atteindrait 1,4 million barils/jour dans cinq ans aux Etats-Unis. Avec un prix du pétrole aux Etats-Unis 4 fois plus élevé que le gaz, alors que les techniques d'extraction sont les mêmes, le gaz de schiste risque de perdre de son attrait.

Mais que ce soit le gaz ou le pétrole de schiste, le rejet des défenseurs de l'environnement ne fait que se renforcer. En France, une loi promulguée le 13 juillet dernier interdit la technique de la fracturation hydraulique pour exploiter les gaz de schiste. Il s'agit de la technique la plus couramment utilisée pour extraire les hydrocarbures piégés dans d'étroites fissures de schiste. Et c'est la raison qui amène le gouvernement français, selon Le Figaro, à abroger les permis d'exploration de gaz de schiste accordés à Total à Montélimar et à la compagnie américaine Schuepbach en Ardèche et dans le Larzac. Autant dire que le «programme pilote» de Sonatrach pour le gaz de schiste ne s'engage pas dans un domaine pavé de certitudes.

Une technique menaçante pour les nappes phréatiques

L'exploitation d'un puits de gaz de schiste commence par une opération de forage, d'abord vertical, puis horizontal, pour atteindre la couche de schiste, généralement à une profondeur de 1 à 3 kilomètres. On procède ensuite à la fracturation de la couche de schiste par l'injection d'eau sous très forte pression, avec un mélange de sable et d'additifs. Cette pression fracture le schiste, une roche ayant acquis une structure feuilletée sous l'influence de contraintes tectoniques, et libère les gaz emprisonnés dans la roche. Le gaz est projeté dans le puits à très haute pression, puis remonte à la surface avec les liquides de fracturation. Le puits est normalement protégé par une gaine de ciment. Toutefois, s'il y a des fissures dans cette gaine à l'endroit où se trouve la nappe phréatique, le gaz et le liquide contaminés peuvent y migrer et contaminer l'eau souterraine. Le mélange peut ensuite remonter par les puits artésiens et contaminer l'eau résidentielle (source Radio-Canada).




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