Algérie

Le gaz algérien et le responsable anonyme



La presse française, fondant ses arguments sur un article publié par la «Tribune», un quotidien français, n'arrête pas d'évoquer des pseudo-réserves des autorités algériennes quant à l'option de la fusion du groupe gazier GDF avec l'entreprise nationale Sonatrach. Les observateurs en Algérie s'interrogent sur les tenants et les aboutissants d'un tel acharnement médiatique sur un sujet, au demeurant tout à fait banal mais qui suscite tant d'intérêt pour les médias français. Le plus curieux, c'est que ce journal valide ses commentaires sur les déclarations d'un haut responsable de l'entreprise Sonatrach et qui, le plus amusant, ayant requis l'anonymat. Selon ce responsable fantôme, ce mariage avec le groupe français est économiquement irréalisable et politiquement incorrect et ceci sans pour autant expliquer le pourquoi de l'impossibilité de sa réalisation ni vis-à-vis de qui cette opération reste politiquement incorrecte, même s'il insinue les accords avec l'Union Soviétique sur la soi-disant OPEP de gaz. Comme d'habitude, le terrain étant vide, l'entreprise Sonatrach n'a fait aucun commentaire sur ces déclarations qui pourtant la concernent en premier lieu. Cette attitude passive de communication a laissé la porte ouverte aux spéculations des médias en France pour déduire et interpréter cette attitude de Sonatrach comme la confirmation de la position officielle des autorités algériennes. En fait, on essaie d'envoyer un message aux plus hautes autorités françaises que les déclarations de ce responsable anonyme tout haut, c'est ce qu'on pense en Algérie tout bas comme si les Algériens ont quelque chose à cacher. Pourtant, et c'est tout à fait public, la position officielle de l'Algérie à ce sujet, et qui ne pouvait venir que de son ministre de l'Energie et des Mines. Devra-t-on comprendre que ce ministre verrouille les informations ou terrorise les responsables au point qu'ils sont contraints de s'exprimer anonymement ? Le ministre ne rate pas l'occasion pour répondre d'une manière tangentielle à cette question: l'Algérie vend son gaz à celui qui lui offre quelque chose de spécifique et particulier. Quant à l'entreprise Sonatrach, elle reste, selon le ministre, intéressée par l'accès à la technologie et surtout à d'autres marchés. On en déduit que le gaz constitue une réserve stratégique pour Sonatrach et à travers elle toute l'Algérie, elle ne l'échangera que contre d'autres réserves stratégiques pour garantir l'avenir de ses générations futures. La voie officielle confirme que la Sonatrach ne s'associe dorénavant qu'avec des entreprises qui offrent des intérêts chez eux. Il faut vraiment être animé d'une volonté de vouloir occulter la réalité pour ne pas comprendre que la position officielle de l'Algérie ne s'écarte pas du tout de cette orientation. De l'autre côté par contre, les positions sont claires et ne souffrent d'aucune ambiguïté. Les opérationnels comme le PDG de GDF penchent plutôt pour une fusion avec le groupe Suez et évoquent des raisons industrielles sans pour autant donner le moindre argument pour étayer sa thèse non seulement pour les Algériens mais pour ses propres actionnaires. Le candidat Sarkozy a affiché durant la campagne présidentielle en France sa préférence d'adosser GDF au géant algérien sans exclure la première possibilité. Enfin, le Premier ministre français est revenu à la charge le vendredi dernier pour d'abord confirmer la position de son président, ensuite d'évoquer la notion d'option qui renvoie sans aucun doute à un calcul de rentabilité et partant évacuer totalement l'aspect politique de dette opération. Si un responsable exécutif de ce rang n'exclut pas la possibilité de ce mariage avec le géant algérien, ce n'est certainement pas par amour pour ce pays. En fait, Suez est un groupe privé dont les actions semblent au beau fixe et qui est actuellement menacé d'une OPA de l'italien Enel. Les arguments qui consistaient à sauver Suez de cette OPA, avancés par les responsables des deux groupes, ne semblent convaincre ni le gouvernement français ni encore plus les syndicats et les actionnaires de GDF. Pour ces raisons et bien d'autres, qu'il est inutile d'évoquer ici, la date de cette fusion ne cesse d'être différée depuis plus d'une année. Quant à GDF, le préalable de ce mariage reste sa privatisation qui est fortement controversée et ces controverses favorisent les axes tracés par le président de la République française dont l'idée reste très claire à ce sujet. D'autre part, l'Algérie, qui compte se lancer dans la construction de centrales pour le dessalement d'eau de mer et la production de l'électricité à partir du nucléaire civil, pourrait tirer un grand profit de cette fusion si elle se réalise, par le transfert du savoir et du savoir-faire dans ce domaine, ce qui est justement l'objectif recherché et qui rentre dans ses axes stratégiques. En contrepartie, la France aurait une relation privilégiée dans la fourniture du gaz pour assurer non seulement son approvisionnement mais celui des autres pays européens dont elle revendique le leadership. Sonatrach assure presque le 1/5e de la consommation européenne en gaz, derrière la Russie avec 23 % et la Norvège avec 30 %. Les problèmes que rencontrent actuellement Sonatrach avec les entreprises espagnoles n'est qu'un orage d'été qui va vite se dissiper. Aucune des parties n'a un intérêt à revenir sur un projet comme celui de Medgaz qui a fait l'objet de plusieurs années de réflexion. Il se trouve désormais que le moindre trouble dans les pays de la rive méditerranéenne ne laisse pas indifférents les Américains pour sauter sur l'occasion. Il faut dire que l'idée de liquéfier notre gaz pour le vendre dans d'autres marchés n'est pas de nature à rassurer. Ceci devra contraindre l'Algérie à se lancer dans la construction des usines de liquéfaction qui fera fondre la manne pétrolière. Il y a des signes non trompeurs qui montrent que des forces occultes tentent de convaincre l'Algérie pour larguer les amarres vers le Henry Hub. Est-ce vraiment raisonnable ? Tous les pays de cette rive ont intérêt à régler leur contentieux de la manière la plus simple et sans passion. N'est-il pas plus raisonnable de prioriser les difficultés pour pouvoir surmonter les divergences politiques ? En tout cas cela coûterait moins cher qu'une relation commerciale durable avec les Etats-Unis. * Consultant


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