Les «affaires »
continuent de rythmer la vie du pays. Et ce sont désormais les « fils de » qui
tiennent le haut du pavé.
Il n'y aura pas de
répit sur le front des scandales cet été. Nipendant le Ramadhan. L'Algérie a
décidé de maintenir une cadence effrénée de révélations concernant les «
affaires », devenant ainsi un territoire « quart-mondisé », où se côtoient
violence, corruption et mauvaise gestion.
L'affaire
nouvellement révélée concerne encore une fois le ministère de l'énergie, un
secteur où la gestion est particulièrement opaque. On apprend ainsi que
l'Algérie aurait vendu des actions détenues dans la compagnie américaines
Anadarko et Duke Energy. Simple opération commerciale ? Non. Car on trouve mêlé
à ce nouveau scandale le fils d'un ancien notable du régime, M. Mohamed
Bedjaoui, ancien ministre des affaires étrangères, ancien président du conseil
constitutionnel, et ancien président de la fameuse commission de surveillance
des élections présidentielles, laquelle commission avait apporté sa caution à
la réélection de M. Abdelaziz Bouteflika.
Il ne s'agit pas
d'évoquer l'opportunité de la vente des actions Anadarko, ni de vérifier si l'opération
fut rentable.
Ceci devrait
relever d'institutions spécialisées, qui agiraient en conformité avec une
politique définie par le gouvernement. L'Algérie pourrait ainsi choisir
d'investir massivement dans les compagnies pétrolières internationales pour
rentabiliser ses réserves de change, comme elle peut décider de vendre ces
actions dans une autre conjoncture. Cela ne pose pas de problème. La difficulté
vient du fait que l'opération a été confiée au fils d'un ministre qui venait de
créer opportunément une entreprise spécialisée dans le domaine. Les choses
étant ce qu'elles sont en Algérie, il est impossible de ne pas avoir des doutes
sur un tel choix. La suspicion est la règle. Et elle est souvent fondée.
Quelques semaines plus tôt, c'est le fils du ministre de la justice qui était
mis en cause dans une affaire de drogue. Il y eut bien un démenti, mais dans le
fond, l'affaire a laissé des traces. D'autant plus qu'une nouvelle mode en
Algérie veut que ce sont désormais les « fils de» qui sont impliqués dans les
scandales.
A Sonatrach déjà,
c'était déjà le fils du patron de l'entreprise qui était mis en cause dans une
affaire antérieure. Mais le plus célèbre « fils de » reste évidemment
Abdelmoumène Khalifa, héritier d'un ancien baron du système. Navigant entre les
réseaux de son père, joutant tantôt au mécène, tantôt à l'homme influent,
symbole d'une nouvelle Algérie qui réussit, Abdelmoumène Khalifa avait réussi à
monter un immense château de sable qui a donné lieu à la plus grande
escroquerie de l'Algérie indépendante. Pour le moment du moins, car le scandale
qui entoure la réalisation de l'autoroute est-ouest risque de prendre une
ampleur encore plus importante par les chiffres qui y sont évoqués. On a ainsi
découvert récemment que le seul volet concernant la révision d'un avenant sur
la qualité du goudron utilisé par l'entreprise chinoise chargée de réaliser le
tronçon ouest de l'autoroute a coûté à l'Algérie 600 millions de dollars pour
rien! Enumérer toutes ces affaires ne relève pas d'une volonté de caricaturer
la vie politique et judiciaire du pays. Ce n'est pas non plus un discours d'un
opposant aigri, soucieux de noircir le tableau pour s'attirer les faveurs de
l'électorat. Ce n'est même plus une critique. C'est simplement un constat.
C'est la réalité de l'Algérie de 2010, la réalité de la société algérienne, de
ses institutions, des comportements de ses responsables politiques et
administratifs. Le discours pompeux sur le nationalisme n'y changera rien.
L'Algérie fonctionne désormais d'une manière très particulière. C'est
désormais au sommet de l'Etat, dans des cercles d'initiés, que les dérives sont
les plus graves et les plus dangereuses. Les dénoncer reste une obligation
politique et morale, mais cela ne suffit plus. Il s'agit d'un phénomène de
société dont il faut comprendre les causes, les mécanismes, et les moyens
éventuels d'y mettre fin, si possible ou, à défaut, d'en atténuer la dérive.
Car ce qui se passe en Algérie est assez banal dans les systèmes autoritaires.
Beaucoup de pays ont connu cette évolution. Certains ont fait l'effort pour se redresser,
et y sont parvenus au prix d'immenses sacrifices. Mais d'autres ont été
emportés.
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Posté Le : 19/08/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abed Charef
Source : www.lequotidien-oran.com