Algérie

Le french doctor et le Dr Folamour



La visite à Baghdad du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, n'est pas pour surprendre, tant depuis son arrivée à l'Elysée, le président Nicolas Sarkozy a multiplié les signes symboliques de sa volonté d'en finir avec la brouille franco-américaine, causée principalement par les divergences ayant opposé Paris et Washington sur l'affaire irakienne. L'ex-socialiste Bernard Kouchner est celui qui peut le mieux concrétiser ce rapprochement franco-américain voulu par le nouveau locataire de l'Elysée. L'ancien «french doctor» est en effet l'une des rares personnalités françaises de premier plan à avoir soutenu et défendu le principe de l'intervention contre le régime de Saddam Hussein, même quand il fut démontré que les raisons invoquées par George W. Bush pour la justifier étaient totalement mensongères. La nomination au Quai d'Orsay par le président Sarkozy trouve en partie sa justification dans le fait qu'il incarne la position de cette partie de la classe politique française «atlantiste sans restriction», n'ayant guère apprécié le refus d'alignement de Chirac sur la politique irakienne de l'Amérique. Officiellement, la France s'en tient encore sur la question irakienne au principe du refus de la gestion unilatéraliste de la crise, et il ne faut pas attendre de Paris qu'il renonce à son attitude, sinon que par des gestes symboliques. Pour aussi marquée que soit la volonté des nouvelles autorités françaises de «réchauffer» les relations franco-américaines, elle n'ira pas jusqu'à faire impliquer leur pays dans le bourbier irakien, alors même qu'aux Etats-Unis la politique et la stratégie de Bush et de son administration sont au banc des accusés. Il n'empêche que la présence de Bernard Kouchner à Baghdad, la première de ce niveau depuis l'invasion de l'Irak par l'Amérique, s'appréhende tout de même comme un acte de solidarité avec ce président et cette administration en grande difficulté sur ce terrain. La geste français a été apprécié à Washington, où George Bush a exprimé sa satisfaction de la présence du ministre français à Baghdad. Au-delà de la symbolique de son déplacement dans la capitale irakienne, Bernard Kouchner aura également constaté ce qu'il en coûte au peuple irakien par une politique dont il a été un fervent défenseur, au nom du principe du «droit d'ingérence» qu'il a contribué à rendre possible. Au nom de «ce droit et de la morale», l'ex-médecin «sans frontières» s'est distingué sur un certain nombre de problèmes internationaux par des positions radicales, ayant toutefois péché par leur caractère sélectif. Aujourd'hui ministre des Affaires étrangères de la France, il fait la démonstration en se «pliant» à ce que lui dictent les intérêts nationaux de son pays, que la sincérité de ses convictions, l'intransigeance de son «humanisme» sont à géométrie variable. Les sourires officiels qui ont accueilli Kouchner à Baghdad n'expriment en rien le sentiment populaire. Ce n'est pas de cet «émissaire» de la France qui a pris fait et cause pour l'invasion de leur pays, dont ils attendent l'espoir qu'il a prétendu être venu leur apporter. Les milliers de leurs concitoyens morts dans une guerre sans justification, leur pays dévasté et ruiné, leur interdisent de dire «bienvenue» au «french doctor» qui a fait alliance avec le «docteur Folamour» américain.


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