Algérie

Le flux de conjectures sur la dévaluation du dinarRepères éco : les autres articles



Le flux de conjectures sur la dévaluation du dinarRepères éco : les autres articles
La récente dévaluation du dinar, car c'est de cela qu'il s'agit, a alimenté l'actualité de toute la semaine et continuera probablement à entretenir des débats de plus en plus animés. Il est normal que les citoyens s'inquiètent en ces périodes d'incertitudes. Chacun y va de ses explications. A partir de dizaines de questions qui m'ont été posées par la presse, j'ai pu détecter de grandes confusions dans les analyses et les explications fournies. Les commentaires des pouvoirs publics ont rajouté au trouble. Certes, il n'est pas permis à tout citoyen de comprendre les causes, les mécanismes et les conséquences attendues d'une dévaluation. Mais des efforts de simplifications auraient dû être menés afin de toucher le plus grand nombre. Non seulement les raisons invoquées demeurent floues, mais les objectifs également. En effet, que signifie «contrecarrer les futurs chocs» ' De quels types de chocs parlons-nous et par quels mécanismes une dévaluation peut les amortir 'Les explications approximatives
Certaines explications sont sûrement l'œuvre de non-économistes. Elles sont proches de ce que l'on pourrait appeler du «charlatanisme économique». J'en donnerai deux, mais on en trouve des masses. Une première explication du genre spécule que l'on a dévalué parce que la banque centrale a émis des dinars sans contrepartie en or ou en devises étrangères. Cette interprétation est en décalage de plusieurs décennies. Depuis l'avènement des taux de change flottants (à peu près en 1973), aucun pays n'est tenu de mobiliser de l'or ou des devises pour émettre une monnaie nationale.
Par ailleurs, l'Algérie détient un record de réserves en monnaies étrangères et aurait pu émettre beaucoup plus de dinars que ce qu'elle a en circulation actuellement. L'explication est fantaisiste est n'est en rien proche du réel. Une seconde explication consiste à dire : au lieu de taxer les importations, ce qui va être combattu par le lobby des importateurs et les partenaires internationaux, on procède à la dévaluation du dinar. Ce qui obligera les importateurs à payer la devise plus cher et donc décourager l'importation. Certes, le plus souvent l'objectif d'une dévaluation est de réduire les importations et encourager les exportations. Mais il y a beaucoup d'autres outils pour le faire. La plupart des nations modernes utilisent des normes nationales, établies par un comité d'experts locaux, afin de limiter les importations sans donner l'impression d'être un pays protectionniste. La substitution d'une dévaluation à une taxe n'est qu'une conjecture. Mais il est vrai que l'objectif d'une dévaluation est de réduire les importations.
Des inquiétudes réelles ou exagérées '
Il y a de nombreuses explications bizarres qui circulent. Le citoyen moyen est perdu. Par ailleurs, des analyses alarmistes inquiètent de nombreuses personnes. Le premier est la conséquence sur l'inflation. Il est vrai que certaines inquiétudes sont réelles. Les patrons d'entreprises verront les matières premières et les équipements importés plus chers. Mais il faut négocier, au sein de la tripartite, des mécanismes compensatoires comme des taux d'intérêts moins élevés, des réductions de taxes, etc.
L'inflation trouble les citoyens
En premier lieu, les produits de première nécessité ne seront pas concernés. Les biens et services produits en Algérie seront, en grande partie, épargnés. Les loyers qui constituent pour les citoyens mondiaux une dépense importante sont isolés. Mais les autres types de produits et services importés connaîtront une hausse. Un calcul très approximatif et très pessimiste arriverait à un taux d'inflation supplémentaire de 1,5 à 2% par an sur deux à trois ans. Ce qui est loin d'être catastrophique par rapport aux gains que l'on peut tirer si certaines conditions sont réunies. Techniquement, on dévalue le plus souvent pour booster les exportations et réduire les importations. Pour notre cas, c'est surtout la réduction des importations qui est le grand enjeu.
Les exportations algériennes sont déconnectées de la logique des taux de change, le marché des hydrocarbures n'est en rien lié à la valeur du dinar. Mais, marginalement, cette opération peut donner un coup de pouce aux exportations hors hydrocarbures.
Les prix des biens et des services algériens vont baisser de 10% par rapport aux monnaies étrangères. Certes, ce n'est pas conséquent. Mais les professionnels du management n'ignorent pas qu'un gain de 10%, dans des marchés compétitifs, n'est pas négligeable dans la lutte féroce que se livrent les firmes. Mais l'encouragement à l'export doit toucher beaucoup de domaines : crédits, foncier, professionnalisation du management, développement humain et d'autres paramètres qui renforceraient cette mesure. La dévaluation du dinar est partiellement destinée à booster les exportations mais surtout à réduire les importations.
La dévaluation jouerait à fond pour réduire les importations si les politiques nationales rendaient l'offre élastique, c'est-à-dire qu'elle réponde rapidement à toute opportunité de marché. Mais là encore, faudrait-il qu'on ait un appareil productif réactif : c'est-à-dire que les banques, les entreprises et les administrations mettent rapidement des dispositifs qui vont prendre toutes les niches de marchés qui deviennent compétitifs, suite à la dévaluation.
Cela n'est pas gagné à ce niveau-là. Mais au-delà de ces considérations, il est utile de rappeler que le taux de change parallèle est de 50% décalé par rapport au taux de change officiel et que le taux d'inflation en Algérie a été supérieur à ceux des pays industrialisés depuis plus de six ans. Tous ces éléments nécessitent des ajustements. Le déficit du budget va se réduire car chaque dollar qui entre dans les caisses de l'Etat induit dorénavant 10% de recettes en plus en dinars. Même si les subventions des produits de première nécessité vont être plus conséquentes, au final le déficit budgétaire va se réduire. Et c'est un autre avantage de la dévaluation pour l'Etat. Les conséquences finales de l'opération dépendront de l'efficacité de l'appareil de production à jouer son rôle.


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