Le flamenco au bonheur des enfants malades

Sollicité par la psychologue et le responsable du service de pneumologie où des enfants sont traités pour la mucoviscidose, Yacine Bouha, un passionné de flamenco, a accepté l'invitation.Il n'est guère surprenant que le flamenco résonne et vibre à Oran, cette ville qui a connu près de deux siècles d'occupation espagnole et qui fut une terre refuge pour les républicains espagnols exilés alors que l'Algérie était encore une colonie française. Encore faut-il également rappeler que les origines du flamenco se situent en Andalousie, avec ses influences arabes si évidentes. Aussi, c'est une chose toute banale si le flamenco a ses ambassadeurs à Oran, à l'image du jeune musicien Yacine Bouha, amoureux, passionné et habité par ce genre musical et qui sait si bien transmettre cette fibre autour du flamenco.
On l'a rencontré la première semaine de juin, lorsqu'il devait se rendre à l'hôpital pédiatrique de Canastel pour une exhibition au profit des enfants malades. Sollicité par la psychologue et le responsable du service de pneumologie où des enfants sont traités pour la mucoviscidose, une maladie génétique les obligeant très souvent à rester branchés à une source d'oxygène, Yacine a accepté l'invitation sur-le-champ, sans se poser de questions. Pour ce faire, et comme un symbole fort, Yacine a demandé à l'un de ses élèves particulièrement doué, Mehdi, 10 ans, de l'accompagner pour une première prestation pour ce jeune garçon qui ne "gratte la guitare" que depuis peu.
À l'entame des premières notes de guitare, la magie a vite opéré avec les enfants très réactifs, prenant rapidement à leur compte le rythme des battements des mains pour la cadence du flamenco, version locale, comme indiqué par Yacine. Mehdi, du haut de ses 10 ans, a été intimidé ? ce qui est tout à fait normal ? mais réussira à suivre son professeur quelques instants. Le plaisir du flamenco a été là pour les enfants hospitalisés, pour leurs parents présents à cette fête et le personnel médical. Ces derniers tentent de saisir chaque occasion pour apporter aux enfants des moments différents leur permettant d'oublier les soins, la douleur, la peur. Les sourires étaient beaux à voir, comme quoi la musique, quelle que soit son origine, a ce pouvoir d'apaiser les souffrances, les peines et répandre un peu de bonheur.
Pour notre musicien, qui est en même temps professeur de flamenco, avec des groupes d'élèves de différents âges, y compris des personnes dites "âgées", le flamenco est une passion qui l'habite depuis le début des années 2000. Ce fut l'époque où lui-même rencontra et apprendra à jouer de la guitare et du flamenco avec un autre maître, Malik Hannouche, à l'IRFM (Institut régional de formation musicale), se remémore Yacine.
Bien qu'ayant déjà participé à des concerts de flamenco, aux instituts Cervantès et français d'Oran, c'est via les vidéos sur les réseaux sociaux que Yacine Bouha a touché des dizaines de jeunes et moins jeunes qui l'ont sollicité.
Aujourd'hui, Yacine est toujours avec sa guitare, à développer sa technique, son art, et s'apprête même à franchir un pas en éditant un ouvrage sur comment apprendre à jouer du flamenco. "L'idée m'est venue le jour où je me suis rendu compte que la plupart des manuels didactiques pour la guitare flamenco étaient faits pour les niveaux avancés, alors que pour ceux qui débutent en guitare il n'y a rien de cela", explique-t-il. "Alors quand j'ai commencé à publier la musique algérienne version flamenco, j'ai reçu beaucoup d'encouragements et de sollicitations de la part des amateurs pour que je leur explique ce que je joue pour qu'ils puissent faire des reproductions", ajoute-t-il. Aujourd'hui, Yacine Bouha, avec des collaborations d'autres artistes, se dit prêt à enregistrer un disque qui mixera le patrimoine musical algérien avec du flamenco.

D. L.