Algérie

Le fichier électoral, l'enjeu de la transparence


Toute élection qui se déroule dans un climat politique, organisationnel ou juridique suspicieux voit sa crédibilité entachée et, par conséquent, la légitimité du ou des vainqueur(s) largement diminuée voire annulée. A ce propos, l'opposition algérienne ne manque pas d'arguments. L'un de ces arguments récurrents concerne la gestion du fichier électoral.Il est, en effet, devenu, au fil des scrutins électoraux, l'objet de la controverse et l'argumentaire des partis et des candidats de l'opposition algérienne pour dénoncer la fraude. Ces partis d'opposition ne cessent de fustiger l'administration qui, selon les protestataires, «en plus des inscriptions multiples, surtout en ce qui concerne les corps constitués, elle manipule ce fichier, à sa guise, au profit de partis politiques proches du pouvoir ou de personnages qui font allégeance à ce pouvoir. Par ailleurs, elle (l'administration) n'applique jamais l'article 22 de la loi organique 16/10 portant régime électoral l'obligeant à remettre aux candidats la liste des électeurs dans la circonscription où ils sont en compétition.» C'est ce que répètent, inlassablement, à la veille de chaque élection, les responsables des partis politiques. Les cas de dizaines de milliers d'inscriptions multiples est une réalité sur le terrain. Tous les observateurs ont eu à le constater.
Par ailleurs, pour les observateurs, cette opacité dans la gestion de ce fichier donne effectivement à l'administration la latitude pour manipuler, surtout, le taux de participation. Cette augmentation se fait à partir des manipulations des P-V de consolidation des résultats que certains fonctionnaires, agissant sur instructions verbales, gonflent au niveau des bureaux, centres de bureaux de vote, des commissions communales ou de wilaya.
En matière de gonflement du taux de participation, le général-major à la retraite, Ali Ghediri nous a fourni la preuve tangible. Il a en effet déclaré, lors du Forum de Liberté, du 27 janvier 2019, que le taux de participation à l'élection présidentielle de 2014 était de 10% alors que le ministère de l'Intérieur avait donné, à l'époque, un taux de 51,7%. C'est ce que dénonce constamment l'opposition «en augmentant ce taux de participation, l'administration reverse les gains en voix aux partis politiques ou aux candidats proches du pouvoir.Un candidat, bon dernier, se retrouve, grâce à ce procédé répréhensible, vainqueur du vote», se lamentent les perdants des élections. La haute commission de Derbal ne pouvait pas ignorer cet aspect des élections qu'elle a eu à superviser depuis sa création.
La transparence dépend de la volonté politique
Pour les militants de l'opposition, cette méthode ? gonflement du taux de participation au profit du ou des candidats du pouvoir ? est usitée, régulièrement, depuis les fameuses élections législatives et locales de 1997. Aux exigences des partis politiques pour l'assainissement de ce fichier électoral afin de le rendre fiable et le protéger des manipulations, le pouvoir invoque à chaque fois les difficultés techniques pour le mettre à jour.
Cet écueil technique n'a plus sa raison d'être. Explications. Nous avons assisté, il y a quelques semaines, à Boumerdès à un séminaire sur la mise en marche du guichet électronique. Les ingénieurs, les responsables des services de l'état civil de six wilayas étaient concernés. Désormais depuis début 2019, le passeport, la carte nationale d'identité (CNI) et le permis de conduire, tous ces documents biométriques seront délivrés aux administrés de tout le territoire national. C'est une avancée technique et administrative importante. Il est à noter que ce système est connecté au fichier national de l'état civil.
Dans ce fichier national de l'état civil, chaque bébé qui est inscrit à sa naissance se voit attribué, pour la vie, un numéro national d'identification.
Par ailleurs, tous les citoyens qui sont en possession d'un passeport biométrique ont chacun un numéro d'identification nationale. Ils peuvent avoir la CNI ou le permis de conduire électronique à point (PCEBP) sans fournir de documents d'état civil ou de photos sauf, bien entendu, le justificatif de la réussite de l'examen délivré par l'autorité concernée. C'est ce qui s'est passé avec la CNI qui a été délivrée systématiquement aux titulaires du passeport biométrique sans fournir le moindre document y compris des photos. Toutes les informations nécessaires à la confection de ces documents d'identité sont stockées dans la plateforme électronique. Nul ne peut être inscrit plus d'une fois dans cette plateforme. D'ailleurs, ce système conçu par des compétences algériennes, sera étendu à d'autres prestations comme la carte grise. S'agissant du fichier électoral «ce n'est qu'une prestation comme une autre pour le guichet électoral. Il suffit de basculer dans ce fichier les citoyens qui ont atteint l'âge de 18 ans», nous avaient confié plusieurs spécialistes.
En clair, les moyens techniques pour confectionner un fichier électoral fiable, expurgé des inscriptions multiples sont disponibles, il suffit d'avoir la volonté politique pour le faire et de donner les instructions aux techniciens pour agir.
Abachi L.
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