Dans cette interview, Ali Brahimi, porte-parole du Mouvement citoyen pour les libertés et le développement (Mcld) explique les raisons du silence des deux partis au pouvoir (FLN et RND) dans cette conjoncture politique. Il soutient que les initiatives du FFS et de la Cnltd sont privées du rapport de force nécessaire pour imposer la négociation avec le régime politique.L'Expression: Comment peut-on expliquer le silence du FLN et du RND de la scène politique nationale en ces temps de doute politique'Ali Brahimi: Vous voulez sûrement dire silencieux et absents sur les questions stratégiques qui se posent avec acuité au pays, car les relayer publiquement, certaines querelles de ménage ne font pas un cap politique ni une vie publique. En fait, les deux formations ne sont pas des partis au sens classique. Ce sont des appareils totalement englués dans les clans et coteries du régime. Tant que les féroces et sourdes luttes des clans internes au régime n'arrivent pas à faire retrouver à celui-ci un point d'équilibre durable, ces deux appareils demeureront neutralisés par les incertitudes qui pèsent sur l'issue des affrontements mafieux et l'identité des vainqueurs. Les états-majors souvent ignorants des évolutions internes aux vrais décideurs, louvoient sur les stratégies et objectifs en place, ressassent les thématiques rhétoriques communes de l'allégeance au Président et surtout divertissent les troupes du sérail et si possible, ce qu'il est maintenant convenable d'appeler le public.Lorsque vous les entendrez s'essayer à exister comme des formations politiques, cela veut dire que les clans ont trouvé un modus vivendi autour d'un partage plus consensuel des diverses rentes et pouvoirs pour un autre cycle plus ou moins long de gouvernance oligarchiquemafieuse.Pourquoi, à votre avis, les initiatives politiques dont celles du FFS et de la Cnltd, ont soit échoué soit risquent d'échouer'Pour ne pas être en mesure ou avoir évité d'impliquer le peuple, les deux initiatives sont privées de l'avantage du rapport de force nécessaire à toute négociation politique. Plus qu'aucun autre, le régime en place n'est pas aussi naïf pour changer volontairement des habitudes si fécondes ou s'associer des acteurs sans rapports de force, encore moins remettre les clés d'El Mouradia. En revendiquant la «blancheur» de sa feuille de route, et en troquant sa mission d'opposition contre une fonction de «facilitateur» que personne au demeurant ne lui a officiellement et publiquement demandé d'offrir, le FFS prend le risque de semer le doute quant à l'objectif poursuivi et celui de voir le pouvoir se servir de son initiative comme d'un écran de fumée divertissant. La Cnltd prétend construire l'union entre les mouvances islamiste et démocrate, sans avoir débattu et sans compromis sur les questions qui fâchent, telles que la reconnaissance définitive de jure et de facto de la complexe et multiforme problématique amazighe, la place de la religion, la condamnation du terrorisme, la citoyenneté, les libertés et droits de l'homme fondamentaux comme les libertés de culte et de conscience, l'égalité homme-femme...etc... a fortiori lorsque l'on sait que ces divergences sont les registres sur lesquels le pouvoir arrive toujours à les diviser. Malgré les déceptions et adversités que lui ont occasionné la violence terroriste, le fanatisme religieux et l'affairisme d'une longue et incolore participation gouvernementale, le courant islamiste possède encore de solides relais dans la société. Son avenir est cependant tributaire de sa capacité à larguer les catégories de croyant, d'imam, de chariaâ au profit de celles de citoyen, de leader politique et de démocratie séculaire. C'est pour cela que l'alliance la plus féconde et vitale pour le pays, demeure celle qui regrouperait les partis du courant démocratique en un grand mouvement populaire, qui forcerait pouvoir et islamisme à un compromis historique vers la démocratie séculaire et la modernité politique. C'est dire, qu'en l'absence d'union des démocrates et d' implication des forces patriotiques et citoyennes dans le bras de fer avec le régime et en l'absence d'une qualification courageuse de la nature militaro-policière du régime, les deux initiatives sont condamnées à s'effilocher et se désagréger ou intégrer les tranchées de clans étrangers à leurs proclamations démocratiques originelles.
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Posté Le : 18/02/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Karim AIMEUR
Source : www.lexpressiondz.com