Algérie

LE FEUILLETON DES LECTEURS



Par Mohamed-Seddik LAMARA
Ammi Abdallah, une des dernières reliques ayant le patriotisme chevillé au corps, considérait ces derniers comme une espèce au visage lisse et dérapant.
A juste titre, il précisait : «Sur lequel glisserait un paquebot ne rencontrant aucun récif.» Ici, le récif fait allusion au «nif», à la dignité qui a, depuis longtemps, déserté la conscience humaine. Chameau-Planton faisait, mensuellement, le point de la situation du parc immobilier et parvenait à concocter des cas de faux contentieux qu'il se pressait de formaliser par des mises en demeure à l'adresse des malheureuses victimes aspirant à récupérer leur logis détourné à la faveur de la situation de fait accompli suscitée par le débarquement yankee. Une fois le délai de la mise en demeure écoulé et foulant aux pieds le principe du recours, Chameau- Planton se presse «d'activer» Camelote transformé en une sorte d'androïde pour monnayer, à plus de cinq fois son prix de cession officiel, le logement du pauvre désemparé. La rondelette différence générée par cette transaction souterraine est, évidemment, partagée en trois parties égales entre le trio de «Hef-Lef». Les victimes de cette supercherie se comptaient par dizaines de milliers. Il est aisé donc de comptabiliser les fortunes fabuleuses amassées par ces prédateurs. Du fait même de cette course effrénée à la compromission au bout de laquelle s'érigent des fortunes mirobolantes, les années passaient comme une procession de nuages affligés annonçant le déluge. Apre était la quête du bonheur matériel, féroces étaient les moyens utilisés pour y accéder. «Hef-Lef» est devenue un empire n'obéissant à aucune tutelle. La seule norme étant le pouvoir de l'argent. De l'argent sale surtout, grâce auquel, et outre leur maître Melh-Kim propulsé au firmament du pouvoir absolu, le domestique Chameau-Planton et le gueux de Camelote, sont devenus de puissants satrapes respectés et adulés. Moins discret que ses acolytes et nanti de l'appui et de la protection de plusieurs représentants de l'autorité locale, Camelote, un inculte avéré, affichait ostentatoirement sa réussite autour de lui. A BRC, Il est devenu le modèle et l'archétype de la nouvelle bourgeoisie urbaine spontanée. En un tour de main, il a construit un manoir dans une cité pourtant réservée au gratin de BRC et réussi à avoir pignon sur rue en multipliant ses activités dans une multitude de créneaux : restauration, vente et location de véhicules, agences immobilières, agences de voyages, fermes aquacoles, bureaux d'affaires, et comble de l'affront, des écoles privées de management où l'on enseignait l'art de l'entourloupette et les milles et une recettes pour s'enrichir sans coup férir. BRC, ex-Boumerdès, ex-Rocher-Noir, une ville que d'aucuns considéraient sans Histoire mais avec beaucoup de petites histoires ne sentant pas le jasmin et dont on se délectait, le soir venu, dans les chaumières des piémonts oubliés, est devenue en moins d'un siècle, une gigantesque mégapole grouillante d'hommes et de femmes fortunés, de golden-boy et de golden-girl englués dans le lucre et la lassitude entretenue par une sorte d'invariant à géométrie variable, une maladie pernicieuse : la «béercionopathie».




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)