La disparition suivie de l'assassinat du militant marocain de gauche,
Mehdi Ben Barka, n'en finit pas de poursuivre le régime marocain. Le
gouvernement de Sarkozy, après avoir bloqué en 2007 les mandats d'arrêt contre des
responsables marocains, a donné son feu vert à Interpol. Punition pour le
renoncement marocain aux Rafales ?
L'actuel chef de la gendarmerie marocaine, le général Housni Benslimane,
devra désormais faire très attention avant de voyager à l'étranger. Lui, ainsi
que le général Abdelhak Kadiri, ancien patron de la Direction générale des
études et de la documentation (DGED, renseignements militaires), Miloud Tounsi,
alias Larbi Chtouki, un membre présumé du commando marocain auteur de
l'enlèvement, et Abdelhak Achaachi, agent du Cab 1, une unité secrète des
services marocains, sont désormais «wanted». Quatre mandats d'arrêt
internationaux émis en octobre 2007 par le juge parisien Patrick Ramaël, mais
bloqués par le gouvernement français, viennent d'être «libérés» par le
ministère de la Justice français. Les mandats, qui ont été déjà diffusés au
niveau du territoire français, avaient été bloqués au niveau européen et mondial,
a indiqué l'avocat de la famille Ben Barka, Me Maurice Buttin. Le feu vert du
ministère français de la Justice a permis désormais la diffusion internationale
du mandat d'arrêt international. La décision a été précédée, trois jours
auparavant, d'une visite au Maroc du ministre de l'Intérieur français, Brice
Hortefeux. Il s'est notamment entretenu avec son homologue marocain Chakib
Benmoussa. Une chronologie qui ne relève pas de la coïncidence. Le gouvernement
français, qui avait de la peine à bloquer davantage la procédure, a décidé d'en
informer préalablement les autorités marocaines dans un souci apparent de
désamorcer leur colère. Hier, les autorités françaises ont invoqué des «motifs
de procédure» pour justifier le retard pris dans la diffusion au niveau
international des mandats d'arrêt contre les responsables marocains pour
l'enlèvement de Mehdi Ben Barka, le 29 octobre 1965 à Paris.
Embarras français
La diffusion a été rendue possible après que les services spécialisés ont
«achevé des échanges sur des points techniques, sans appréciation de la
validité des mandats d'arrêt», a indiqué Guillaume Didier, porte-parole de la
ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie. En réalité, le juge français a
signé, en octobre 2007, les mandats d'arrêt alors que le président Nicolas
Sarkozy se trouvait en pleine visite officielle au Maroc. Leur diffusion a donc
été bloquée. Le «déblocage» du dossier est salué par la famille de Ben Barka.
Le fils de l'opposant assassiné, Bechir Ben Barka a salué la diffusion des mandats
d'arrêt par Interpol. «Enfin ! Ces mandats d'arrêt avaient été lancés il y a
deux ans. Ce sont deux années perdues, 44 ans après la disparition de mon
père... Or chaque année compte car les témoins vieillissent et nous n'aimerions
pas que la vérité parte au fond d'une tombe. Tout laisse à penser que mon père
a été assassiné mais ce qui nous intéresse, c'est de connaître la vérité». Leur
avocat, Me Maurice Buttin, l'a qualifié de «victoire importante». Il s'est dit
prêt «à demander au juge français la levée des mandats d'arrêt internationaux
si ces personnes acceptent de s'expliquer devant la justice de leur pays en
présence du juge français... Plus ils tardent, plus cela démontre la
responsabilité du Maroc et du roi Hassan II».
Une réplique au rejet marocain des Rafales ?
L'avocat affirme avoir relancé ses démarches après le départ en juin de
Rachida Dati, du ministère de la Justice. L'ancienne ministre, en partie
d'origine marocaine (elle a aussi une part algérienne), était hostile, selon
lui, à la relance du dossier. Le plus étonnant est que maître Buttin n'hésite
pas à évoquer la possibilité que la relance du dossier ne se fait pas par amour
de la justice. Selon lui, en demandant à Interpol de diffuser des mandats
d'arrêt bloqués depuis presque trois ans, la France punit le Maroc pour avoir
renoncé, en 2007, à acheter des Rafales au profit des F16 américains. Le régime
marocain, décidément hanté par le fantôme de Ben Barka, n'a pas réagi
officiellement. Une source au ministère de la Justice marocain a déclaré à
l'AFP, sous le sceau de l'anonymat, que «C'est une surprise mais aussi une
ancienne histoire qui revient à la surface chaque fois qu'une ‘partie occulte'
veut salir les relations excellentes entre le Maroc et la France». Une autre
source a ajouté: «Nous nous demandons qui est derrière cette annonce, qui
ressemble à celle diffusée en 2007». L'Association marocaine des droits humains
(AMDH) a appelé les autorités marocaines «à communiquer les informations en
leur possession pour faire toute la lumière» sur cette affaire.
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Posté Le : 03/10/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : M S
Source : www.lequotidien-oran.com