Algérie

Le droit du travail face au droit religieux Des travailleurs suspendus pour avoir fait le ramadhan



Le droit du travail face au droit religieux                                    Des travailleurs suspendus pour avoir fait le ramadhan
Suspendus pour cause de Ramadhan. C'est la mésaventure de moniteurs de colo dans la banlieue parisienne, à Gennevilliers.
France.
De notre correspondant
Cette mesure du maire Jacques Bourgoin a suscité beaucoup de réactions sur internet depuis mardi, jour de la décision controversée. Mardi soir, l'élu revenait sur ses pas en expliquant que les quatre personnes concernées ne seraient pas contraintes, en août, de manger pour conserver leur poste d'animateur. Il n'appliquera pas l'article 6 du contrat de travail signé par les animateurs, selon lequel le moniteur «veille à ce que lui-même ainsi que les enfants participant à la vie en centre de vacances se restaurent et s'hydratent convenablement, en particulier durant les repas» et doit être «en pleine possession de ses moyens physiques».
Ce qui serait du simple bon sens en toute période de l'année, sauf pendant le Ramadhan' Les réactions virulentes ont accablé ainsi le maire et parlé de nouvelle manifestation antimusulmane. Ainsi, le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) prévoit d'organiser un iftar symbolique, samedi soir, devant la mairie de Gennevilliers, tandis que le Conseil français du culte musulman envisage toujours d'attaquer la ville de Gennevilliers pour discrimination. Cette situation inédite en France pose clairement le problème de la laïcité telle que voulue par les législateurs français et sur laquelle s'appuie toute la jurisprudence et que la présence musulmane de plus en plus forte en France vient perturber, comme l'avait été le port du voile dans la sphère publique ou encore la prière sur le lieu de travail.
Les preuves médicales qu'on peut exercer en jeûnant '
Pourtant, en ce qui concerne ce «dossier» de Gennevilliers, plus que «le droit à la liberté religieuse, le droit du travail est à convoquer». Ainsi, un inspecteur du travail, sur nouvelobs.com, estime que «toute la question ici est de savoir si le jeûne est compatible avec le travail de moniteur de colonie, qui implique probablement l'encadrement d'enfants dans des conditions difficiles (soleil, activité physique...). Il faudra déterminer si on peut considérer que, dans ces conditions, le jeûne altère le discernement des salariés. La première chose que cet employeur aurait dû faire est de saisir le médecin de travail afin d'avoir un avis médical fiable ('). Si l'employeur possède la preuve médicale que le jeûne et l'activité professionnelle ne sont pas compatibles, il est juste qu'il ait sanctionné les salariés qui se seraient maintenus dans leur insubordination». Un avocat spécialisé, Malik Draoui, confie au journal Le Figaro la notion de risque qui fige beaucoup d'activités, ces dernières années, au niveau des écoles notamment, car les élus et les enseignants craignent des accidents : «A quel point un moniteur qui fait le Ramadhan n'est pas en mesure d'accomplir ses tâches et de veiller à la sécurité des enfants ' Cette appréciation est forcément subjective. Dans la présente affaire, il s'agit de l'intérêt des enfants. S'il y avait un accident lié au malaise d'un animateur, la responsabilité de la commune serait directement engagée.»
Le recteur de la Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, reste pour sa part sur un registre uniquement religieux. Dans un communiqué reçu par notre rédaction, il indique que «le Ramadhan est une obligation religieuse qui répond à des considérations théologiques bien précises, prévoyant des exemptions dans certains cas, notamment pour les femmes enceintes ou les personnes malades ne pouvant observer le jeûne sans prendre le risque d'aggraver leur état. Le fait de porter atteinte à cette liberté religieuse par des décisions intempestives aurait été mal perçu par les musulmans de France». Les internautes ont des avis tranchés sur ce sujet. Ainsi l'un d'eux poste : «Dans cette affaire de moniteurs, on est plutôt dans le cadre de l'application d'un contrat de travail, avec des astreintes et des contraintes physiques précises et à respecter afin de ne pas mettre en péril la sécurité d'enfants confiés. La question de la religion n'est donc pas la priorité de ce débat, ni la suspension des moniteurs, car seul l'intérêt général dans la défense du plus faible, à savoir des enfants, a prévalu.»
Au plan politique, le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, (droite, opposition) défendait hier matin les animateurs : «Les pratiques religieuses, dès lors qu'elles sont tout à fait conformes à la laïcité, c'est-à-dire subordonnées aux lois de la République, doivent être pleinement respectées. Personne n'a jamais démontré que la pratique du Ramadhan empêchait nos compatriotes de confession musulmane de travailler.»
Pour un parti qui a instrumentalisé l'islam pendant deux ans, entre 2010 et 2011 sans compter la campagne présidentielle de 2012, cette contrition paraît drapée d'hypocrisie pour se défaire de l'image d'extrême droite, s'éloignant ainsi du Front national qui applaudissait le maire communiste' Bienvenue dans la France post-traumatique de 2012 !


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