Algérie

LE DRAME SANS FIN



Malgré les tracas quotidiens et les difficultés éprouvées à enjamber les soucis parsemés par le parcours du temps, une curieuse satisfaction probablement bassement humaine caresse l'esprit quand on se surprend mieux lotis dans la vie en comparaison avec les autres. On prend conscience que les problèmes soumis à de nombreux concitoyens sont sommaires au regard des véritables chocs que nous livrent les images de nombreux peuples engloutis dans leurs enfers.Notre anxiété et notre mauvaise humeur ne sont pas justifiées quand la faim et la soif étranglent des milliers d'humains en Afrique, en Asie, dans les deux Amériques et en Europe et elles nous paraissent d'une exagération décapante quand nous sommes astreints nous-mêmes à vivre des coupures d'eau ou d'électricité momentanées. A nous les soupirs et les grises mines passagers. Aux autres le râle permanent. Il est trop facile d'accuser l'incompétence et la corruption quand le colonialisme a dévié le parcours de la terre et a donné un sens contraire à sa naturelle rotation.
Des âmes bien nées pourraient pester contre un tel sentiment de satisfaction. Elles ignorent sans doute que sur les boulevards de pays affublés du titre de puissance africaine, il arrive de buter sur un cadavre humain abandonné par terre depuis des jours et auquel personne ne prête attention. Elles ne savent pas non plus que de larges populations africaines ou sud-américaines mettent deux jours pour aller d'un village à un autre distants seulement d'une cinquantaine de kilomètres. Le drame y est sans répit et sans fin et ce ne sont là que deux traits du parcours des sociétés entières qui notifient l'écart entre vivre et survivre.
Hier encore, pas très loin dans le temps, des êtres humains pieds et mains enchainés étaient la propriété des négriers. Aujourd'hui, pour des millions d'entre eux, seule la nature des chaines a changé.
Sociétés en voie de développement dit-on pour tromper la perception sur des émergences égarées dans de dramatiques directions. Le monde entier, vrais pauvres et faux riches sont sur le même palier. Il n'y a que les cultures et les forces d'adaptation qui diffèrent.
Pour leur part, les Algériens ont bien de sérieuses raisons d'être heureux.


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