L'appartement que
j'avais loué pour mon séjour à Istanbul était juché au quatrième étage d'un
vieux mais noble immeuble construit en haut de la colline de Galata.
L'emplacement était stratégique : à quelques minutes de la célèbre place Taksim et de la bouillonnante et insomniaque avenue Istiklal.
Mais le spectacle
le plus saisissant s'offrait dès qu'on ouvrait la fenêtre d'une des chambres.
D'un seul regard, il était possible d'embrasser tous les joyaux architecturaux
du quartier Sultan Ahmet et de suivre la courbe de l'illustre Corne d'Or. En
fin de journée, un éclairage particulier transformait le paysage en un tableau
de maître orné d'innombrables minarets pointus et élancés vers le ciel. Il est
vrai qu'Istanbul, poumon économique du pays, respire la prospérité et la réussite.
À cheval entre l'Asie et l'Europe, cette ville est la vitrine d'une Turquie en
pleine croissance.
Cependant, mon
réel envoûtement par cette ville et ce pays a rapidement cédé la place à un
scepticisme motivé par deux évènements révélateurs.
Le premier a eu
lieu à ma première navigation sur Internet. Ayant reçu un courriel m'invitant à
visionner une vidéo sur Youtube, quelle ne fût ma
surprise de constater que l'accès à ce site était interdit par décision de
justice depuis 2007. Le motif invoqué était : «diffusion de clips
irrévérencieux à l'égard du fondateur de la République turque, Mustafa Kemal Ataturk » [1]. Il est vrai que cette interdiction a été
levée en octobre 2010 [2] mais, en mars 2011, la plate-forme «Blogger» a été, elle aussi, bannie de la toile [3].
Le second
évènement dont j'ai été témoin se déroula sur l'avenue Istiklal,
une soirée de fin de semaine. Alors que l'artère vitale grouillait de monde, un
homme légèrement éméché s'approcha de deux jeunes demoiselles, leur faisant des
avances avec insistance, mais sans les toucher. La scène n'a pas échappé à deux
hommes en civil (probablement des policiers) qui déambulaient parmi les
badauds. Apostrophé manu militari, le malheureux essaya de se débattre tant
bien que mal. Quelques dizaines de secondes plus tard, une fourgonnette de
police arriva et l'individu fut tabassé en public et jeté comme une vulgaire
marchandise à l'intérieur du véhicule. Après un moment de curiosité, les
passants continuèrent leur promenade dans le brouhaha ambiant, comme si la
scène à laquelle ils venaient d'assister était banale.
Serait-ce
possible que cette indiscutable réussite économique n'ait pas été accompagnée par des progrès dans les domaines de la liberté
d'expressions et les droits de la personne?
Est-il pensable
que l'arrivée au pouvoir des islamistes de l'AKP (Adalet ve Kalkýnma
Partisi ou Parti de la justice et du développement)
puisse donner un remarquable élan à l'économie (11% de croissance au premier
trimestre 2011 [4]) et être en retard sur les libertés fondamentales du
citoyen?
ERDOGAN, LE
PADISHAH
Recep Tayyip Erdogan,
l'actuel Premier ministre de la
Turquie et président de l'AKP a été
maire d'Istanbul de 1994 à 1998. À ce poste, il gagne le respect des
Stambouliotes en améliorant considérablement les services (distribution d'eau
et d'électricité) et en luttant contre la corruption, de sorte qu'il est
surnommé le «Padishah» (sultan) de la ville [5,6].
«Pour sa bonne gouvernance, notamment pour les travaux de rénovation urbaine
qu'il a entrepris durant son mandat de maire d'Istanbul», il reçut une
récompense du Programme des Nations unies pour les établissements humains [7].
Lors d'un meeting
en 1998, Erdogan récita un poème jugé subversif et
contraire à l'esprit laïque du kémalisme, l'idéologie
fondatrice de la Turquie
moderne de Mustafa Kemal Ataturk. En voici un extrait
: « Les minarets seront nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées
seront nos casernes et les croyants nos soldats ». Cela lui a valu d'être
destitué de sa fonction de maire et condamné à dix mois de prison (mais n'en
accomplira que quatre) [8]. Il faut dire, qu'à ses débuts, Erdogan
avait été le chef des jeunes du Milli Gorus, un
mouvement islamiste turc antioccidental, nationaliste et théoriquement djihadiste [6].
Erdogan fonde l'AKP en 2001, parti qui
remporte les élections législatives de 2002 auxquelles il ne peut participer à
cause de sa condamnation. Cependant, la loi ayant changé, il réussit à se faire
élire dans une élection complémentaire en 2003. Dès son arrivée au parlement,
il est nommé Premier ministre et le restera pour trois mandats successifs.
À la tête de l'AKP et du gouvernement turc, le «Padishah»
est crédité de nombreuses et importantes réformes, parmi lesquelles :
l'autorisation de la langue kurde dans les médias, l'abaissement de l'âge
d'éligibilité (de 30 à 25 ans), l'abolition de la peine de mort, etc. [5].
Cependant, depuis
un certain temps, des voix discordantes se font entendre au sujet d'Erdogan et de son style de gouvernance. On n'hésite pas à
mettre de l'avant son autoritarisme, ses attaques contre les journalistes [9]
et la «poutinisation» du régime [6]. En fait, ce qui
est remarquable chez ce chef charismatique est son excellente maîtrise du
double jeu : l'art de prôner, selon les circonstances, une chose et son
inverse.
ERDOGAN ET LES
LIBER TES FONDAMENTALES
Se faisant
publiquement le chantre de la laïcité, de la démocratie et des libertés en
Turquie, le bilan d'Erdogan laisse perplexe, c'est le
moins qu'on puisse dire.
Deux articles
parus il y a moins d'un mois donnent le la : «la démocratie turque en danger»
[10] et «le tournant liberticide turc» [11]. On y apprend que de nombreux
journalistes et universitaires ont été poursuivis et emprisonnés pour avoir
donné des conférences sur des sujets controversés de l'histoire ou de la
politique turque.
On peut y lire :
«L'acharnement du pouvoir contre les médias indépendants osant aborder la
situation kurde ou la domination de l'AKP est devenu
grave, comme l'a souligné Reporters sans frontières dans un communiqué du 26
octobre» et aussi : «Depuis 2009, près de 8 000 personnes ont été arrêtées pour
des faits d'exercice de la liberté d'expression. En cela, la Turquie d'Erdogan révèle son vrai visage, celui d'un pouvoir qui a de
moins en moins à envier au régime des généraux des années 1980. Rien à voir en
tout cas avec la démocratie islamique tant vantée ces dernières semaines».
L'ouverture d'un
procès, le 22 novembre 2011, contre les deux célèbres journalistes Nedim Sener (lauréat 2010 de
l'Institut international de la presse) et Ahmet Sik a
vu la mobilisation d'environ 200 journalistes et défenseurs des droits de
l'homme, réclamant leur libération. Les deux journalistes sont accusés d'avoir
Å“uvré dans la branche média du réseau «Ergenekon»,
organisation soupçonnée de préparer un coup d'état militaire contre le
gouvernement d'Erdogan. Il est à noter que N. Sener a publié un livre sur le meurtre d'un journaliste
dans lequel il critiquait l'enquête de la police. Ahmet Sik,
quant à lui, a vu ses brouillons être saisis sur ordre du tribunal : il
travaillait sur un essai portant sur l'infiltration de la police par les
milieux islamistes. Alain Franchon, journaliste et
directeur éditorial du Monde, commente ainsi l'affaire : «Avec d'autres, Sik et Sener ont mené des
enquêtes qui embarrassent le gouvernement : corruption, affaires, pénétration
de la police par des militants islamistes. Ils gênent. Comme des dizaines
d'autres journalistes eux aussi emprisonnés, à l'heure où le pouvoir mène une
campagne d'intimidation contre tous ceux qui osent le critiquer» [12].
À ce sujet,
Johann Bihr de Reporter sans frontières (RSF) a
déclaré que «quelque 70 journalistes sont actuellement emprisonnés en Turquie,
dont au moins 15 ou 20 pour leur activité journalistique» [13].
D'ailleurs, le
classement mondial RSF 2010 place la
Turquie à une position peu enviable en matière de liberté
d'expression: 138e sur 178. Elle se classe loin derrière des pays qui ne
connaissent pas le boom économique turc tels que la Tanzanie (41e), le Burkina
Faso (49e) ou le Sénégal (93e). Considéré comme un «pays sous surveillance»
dans la catégorie «Ennemis d'Internet», RSF explique le mauvais rang de la Turquie «par la
multiplication frénétique des poursuites, incarcérations, condamnations de
journalistes. Parmi eux, nombre de médias et de professionnels, soit kurdes,
soit abordant la question kurde» [14].
Finalement, la
consultation des rapports annuels de l'Human Rights Association montre que le nombre de cas de torture
et de mauvais traitements en Turquie est passé de 876 en 2002 (date de
l'accession au pouvoir de l'AKP) à 1835 en 2009 (soit
plus du double) [15].
ERDOGAN ET ISRAËL
Lorsqu'en 2009 Erdogan quitta en colère un débat public avec le président
israélien à Davos, il est instantanément devenu le héros des arabes et des
musulmans. Je lui ai même personnellement consacré un article élogieux, vantant
la témérité et la bravoure de son coup d'éclat en faveur du peuple palestinien
qui venait de vivre le massacre de Gaza par l'armée israélienne [16]. Par la
suite, l'épisode de la flottille de la liberté qui a coûté la vie à neuf
citoyens turcs en mai 2010 a
envenimé les relations entre les deux pays et un état de quasi-rupturee des relations diplomatiques est actuellement en
vigueur.
Mais qu'en est-il
vraiment des relations entre Erdogan et l'état
sioniste?
En fait, la
position d'Erdogan à l'égard d'Israël était claire
dès son accession au pouvoir. Contrairement à son prédécesseur islamiste Necmettin Erbakan, il ne contestait pas l'alliance de son
pays avec Israël [17]. Rappelons qu'en 1996, Erbakan avait refusé de ratifier
un accord de coopération avec Jérusalem et tenta de suspendre des manÅ“uvres
navales turco-israélienne, contre l'avis de ses
militaires.
La reconnaissance
d'Israël par la Turquie
ne date pas d'hier. C'est même le premier pays musulman à l'avoir fait dès
1949, ce qui fait dire à Noémie Grynberg
: «…depuis près de 60 ans, les deux pays entretiennent des relations
diplomatiques et coopèrent dans de nombreux domaines. Israël et la Turquie partagent beaucoup
d'intérêts communs : économique, énergétique, stratégique, militaire,
politique» [18].
Quant à Erdogan, il a largement favorisé et dynamisé les relations
entre les deux pays. Entre 2002 et 2009, la plupart des groupes israéliens renforcent
leur présence en Turquie et les contrats bilatéraux atteignent 2,5 milliards de
dollars. En parallèle, l'armée israélienne a activement contribué à la
modernisation des forces armées turques, en particulier l'aviation [19].
D'autres
«incongruités» sont à signaler dans la politique turque actuelle vis à vis
d'Israël. La première, médiatisée, concerne l'acceptation en octobre 2011 de
l'aide israélienne lors du récent séisme qui a touché la région turque de Van.
La seconde, passée sous silence, est en relation avec l'incendie du Carmel, en
Israël. La Turquie
avait envoyé deux avions pour lutter contre l'incendie en décembre 2010, alors
que les relations «officielles» étaient au plus bas [20].
Mais le geste qui
réjouit probablement le plus Israël est l'acceptation par la Turquie d'accueillir
l'installation antimissile américaine que l'OTAN va déployer dans le territoire
turc pour contrecarrer les éventuelles attaques iraniennes [12]. En plus, selon
le journal turc Hurriyet, les données recueillies par
les radars seront directement transmises aux Israéliens, décision qui a
enchanté Ehoud Barak, ministre israélien de la
défense : «La Turquie
n'est pas en train de devenir un ennemi d'Israël» a-t-il déclaré. Sur ce même
sujet, un haut responsable américain a reconnu que «le déploiement du bouclier
antimissile est la plus grande coopération entre la Turquie et les États-Unis
au cours des vingt dernières années» [21]. Le récent déploiement de drones
américains Predator en Turquie et la vente imminente
d'hélicoptères d'attaque pour lutter contre les séparatistes kurdes du PKK (Partiya Karkerên Kurdistan ou
Parti des travailleurs du Kurdistan) [22] est certainement une forme de
remerciement pour la collaboration turque dans le dossier du bouclier
antimissile.
Cette décision a
fait bondir aussi bien l'Iran que la Russie. Le premier a prévenu qu'elle attaquerait
les installations turques en cas de menace [23]. La seconde a déclaré qu'elle
songeait à déployer ses missiles vers le site antimissile turc [24].
La politique
turque du «zéro problème avec nos voisins » vient d'en prendre un sacré coup.
Et ce n'est pas le seul.
ERDOGAN ET LE
NEO-OT TOMANISME
En créant la Turquie moderne, Mustafa
Kemal Ataturk a non seulement enterré l'empire
Ottoman, mais a aussi tourné le dos au Moyen-Orient. « Messieurs et citoyens
!... Sachez bien que la République turque ne peut pas être le pays des cheikhs,
des derviches, des disciples, des adeptes. Le chemin le plus droit est celui de
la civilisation» disait-il. Cette situation à prévalu avec tous ses successeurs
et s'est poursuivie jusqu'à la prise du pouvoir par l'AKP
qui va opter pour un repositionnement géostratégique, mais sans jamais renoncer
au rêve de voir un jour la
Turquie faire partie de l'Union Européenne. L'esclandre d'Erdogan à Davos en est certainement un acte hautement
symbolique mais probablement aussi un geste médiatique à saveur populiste. Ce
revirement turc vers les pays de l'ancien empire Ottoman s'explique par le
fiasco du panarabisme, «la faiblesse du bloc arabe qui se dispute le leadership
(Égypte, Arabie saoudite et Syrie), l'échec du projet US du grand Moyen-Orient
remodelé, la quasi inexistence de l'Europe dans la région et les difficultés
actuelles du régime iranien» [25].
Le changement de
cap de la politique étrangère de la
Turquie a été initié par Erdogan,
mais s'est accéléré avec la venue d'Ahmet Davutoglu,
un universitaire très respecté, nommé ministre des Affaires étrangères en mai
2009. Surnommé «M. Zero Problems»
par la presse anglophone, il prône la doctrine de «zéro problème» avec son
voisinage proche.
Cette politique
d'ouverture vers le monde arabo-musulman nommée
«néo-ottomanisme» marque un changement considérable par rapport à l'idéologie
kémaliste.
La récente
participation de la Turquie
à un forum arabo-turc organisé au Maroc, en marge
d'une réunion de la Ligue
arabe consacrée à la Syrie,
en est une illustration.
Pourtant, en plus
d'avoir des relations privilégiées avec les États-Unis, la Turquie est membre de
l'OTAN, du Conseil de l'Europe et frappe toujours à la porte de l'Union
Européenne. D'ailleurs, n'avait-il pas cité Ataturk,
en 2002, le soir même de la première victoire de l'AKP
[17]?
ERDOGAN ET LE
«PRINTEMPS ARABE»
C'est
probablement une application éclairée de la politique «zéro problème» avec les
voisins qui a motivée la relative indifférence d'Erdogan
au commencement des révoltes de la rue arabe. En effet, ce n'est que le premier
février 2011, entre le départ de Ben Ali et celui de Moubarak, qu'il a apporté
son soutien aux manifestants arabes. Quelques jours plus tard, il atténua cette
timide déclaration en «affirmant qu'il n'avait pas non plus l'intention de
s'immiscer dans les affaires intérieures des pays arabes» [26].
Même son
implication dans la guerre civile libyenne fut précédée d'une longue
hésitation, mais il finit par «suivre» la France et la Grande-Bretagne
[12].
Cette hésitation
est compréhensible car les échanges avec ce pays étaient si importants que 26
000 turcs y étaient présents. Mais une autre raison, plus «sentimentale» celle-là,
peut être avancée : le 1er décembre 2010, il a reçu, à Tripoli, le prix Kadhafi
des droits de l'homme décerné par le colonel Kadhafi, soit quelques mois à
peine avant l'engagement de la
Turquie en faveur des rebelles du Conseil national de
transition libyen (CNT) qui ont fini par assassiner sauvagement le «guide»
libyen [27].
Le 3 juillet
2011, le chef de la diplomatie turque, M. Ahmet Davutoglu,
reconnaissait le CNT, lui offrit un prêt de 100 millions de dollars et prit le
contrôle de la banque turco-libyenne A&T Bank dont la Libyan Foreign
Bank possède environ les 2/3
des parts.
«M. Zero Problems» venait d'enterrer
une seconde fois sa politique de «bon voisinage».
Pragmatique et
soucieux de maintenir un taux de croissance dans les deux chiffres, Erdogan effectua, entre le 12 et 16 septembre, un voyage
dans les pays du «printemps arabe» : l'Égypte, la Tunisie et la Libye. Il était
accompagné d'une imposante délégation composée de 280 hommes d'affaires, sept
ministres et de nombreux conseillers. Sans états d'âme, le néo-ottomanisme
passe nécessairement par le «business» [28].
L'implication de la Turquie dans les
évènements syriens est autrement plus épineuse car, dans ce cas, il s'agit d'un
réel «voisin» avec lequel il partage une frontière, une histoire et un
contentieux territorial.
Le rapprochement
entre la Syrie
et la Turquie
s'est matérialisé en 2004 lors d'une visite officielle de Bachar
El-Assad qu'Erdogan
considérait, jusqu'à naguère, comme un ami personnel. Cette visite fut suivie
par la signature, en septembre 2009, d'un accord de coopération bilatérale et
l'institution d'un Conseil de coopération stratégique [25]. Le conflit
territorial concernant la province du Hatay,
actuellement sous domination turque mais revendiqué par la Syrie, a constitué la pomme
de discorde entre les deux pays. Ironie du sort, c'est dans cette province que
quelques milliers de réfugiés syriens sont actuellement cantonnés, sous
protection turque.
Comme dans le cas
libyen, la décision de rompre le dialogue et de soutenir les insurgés contre le
régime en place n'est pas venue naturellement. Elle a été prise le 21 septembre
2011, aux États-Unis, à l'issue d'un entretien avec le président Obama et en «coordination» avec l'administration
américaine. Moins d'un mois après, Davutoglu
rencontra officiellement à Istanbul le Conseil national syrien (CNS), organisme
représentant les différentes sensibilités de l'opposition syrienne qui compte
dans ses rangs des Kurdes syriens [29]. Étrange partition que joue «M. Zero Problems», hébergeant des
Kurdes syriens «révoltés» contre le gouvernement syrien et bombardant, pendant
une bonne partie de l'été dernier, les Kurdes du PKK «révoltés» contre le
gouvernement turc!
Le rôle actif de la Turquie dans la
déstabilisation du régime syrien et dans son aide inconditionnelle aux
dissidents syriens se concrétise de jour en jour.
Comme une
intervention de l'OTAN sous l'égide de l'ONU n'est pas envisageable à cause des
vetos russe et chinois, une autre solution est en
préparation.
En effet, des officiers
français de la DGSE
(Direction générale de la sécurité extérieure) et britanniques du MI6 (Service
de renseignements extérieurs) sont actuellement en Turquie, dans la région
frontalière avec la Syrie,
pour former les premiers contingents de l'Armée syrienne libre à la guérilla
urbaine. D'autre part, les trafics d'armes aux frontières de la Syrie sont tolérés, voire
favorisés par les Français et les Turcs [30].
Il est clair qu'Erdogan a mené son pays sur la voie de la prospérité
économique et lui a donné une indéniable importance géostratégique. Cependant,
force est d'admettre que cela n'a pu se faire qu'en pratiquant une politique de
«double jeu». Prôner la liberté d'expression et persécuter les journalistes; se
lancer dans des diatribes contre Israël et continuer, en catimini, à commercer
avec ce pays; prêcher une politique de «bon voisinage» et Å“uvrer dans la
déstabilisation des voisins; se proclamer néo-ottomaniste
et continuer à être kémaliste; se tourner vers l'Orient tout en gardant des
relations privilégiées avec l'Occident (en particulier les États-Unis, la France et la Grande Bretagne);
considérer les autocrates arabes comme des amis et accepter leurs prix tout en
n'hésitant pas à les laisser tomber lorsque le moment de choisir son camp se
fait sentir.
Est-ce de la
clairvoyance, du réalisme politique ou de l'opportunisme? Je vous laisse le
soin d'en tirer les conclusions.
Au fait, j'ai
omis de vous dire que mon voyage sur les rives du Bosphore s'est très bien
déroulé. La Turquie
est réellement un beau pays et, en ce temps, même les boules de cristal les
plus omniscientes ne pouvaient prédire ce fameux «printemps arabe».
Montréal (Canada)
Références
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Insults to Ataturk », The New York Times, 7 mars
2007,
http://thelede.blogs.nytimes.com/2007/03/07/youtube-banned-in-turkey-after-insults-to-ataturk/
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octobre 2010, http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2010/10/30/97001-20101030FILWWW00435-youtube-bientot-accessible-en-turquie.php
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2011,
http://www.lemonde.fr/technologies/article/2011/03/04/la-plate-forme-blogger-bloquee-en-turquie_1488224_651865.html
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http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2011/06/30/97002-20110630FILWWW00407-turquie-croissance-de-11-au-t1.php
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http://www.electionseneurope.net/2011/05/recep-tayyip-erdogan-biographie.html
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http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/11/11/erdogan-l-homme-du-nouvel-ordre-turc_1599162_3232.html
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http://www.susam-sokak.fr/article-esquisse-n-19-erdogan-destitue-et-incarcere-1998-1999-86268686.html
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Forces et faiblesses de l'AKP de Recep
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http://www.lemonde.fr/international/article/2011/06/12/forces-et-faiblesses-de-l-akp-de-recep-tayyip-erdogan_1534702_3210.html
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http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/11/11/le-tournant-liberticide-turc_1602422_3232.html
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http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=53:la-valse-a-quatre-temps-de-amr-moussa-ou-levanescence-de-larabite-politique-&catid=37:societe&Itemid=75
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20. Gérard Fredj, «Turquie - Israël : l'aide humanitaire aux cotés de
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21. Infos d'Almanar, «Presse turque : la data du bouclier anti-missile
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si menacé, prendra pour cible la
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27. Daniel Pipes,
«Erdogan accepte «le prix international Al-Kadhafi pour les droits de l'homme» », Daniel Pipes.com,
28 février 2011, http://fr.danielpipes.org/blog/2011/02/erdogan-prix-kadhafi
28. Joséphine Dedet, «Printemps arabe : Erdogan
superstar », Jeune Afrique, 21 septembre 2011,
http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2645p010-011.xml0/
29. AFP, «La Turquie a rencontré
officiellement le Conseil national syrien », L'Express.fr, 18 octobre 2011,
http://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/la-turquie-a-rencontre-officiellement-le-conseil-national-syrien_1041732.html
30. Claude Angeli, « Une intervention limitée préparée par l'OTAN en
Syrie », Le Canard Enchainé, 23 novembre 2011.
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Posté Le : 15/12/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ahmed Bensaada
Source : www.lequotidien-oran.com