Algérie

LE DOCUMENTAIRE "TA'A MARBOUTAH" D'EHAB ALKHATIB Coupables pour un crime qu'elles n'ont pas commis



LE DOCUMENTAIRE
Projeté avant-hier à la Cinémathèque d'Oran, dans le cadre de la compétition documentaires du Fofa, Ta'a Marboutah du Jordanien Ehab Alkhatib explore en 48 minutes la problématique de l'octroi de la nationalité jordanienne par la mère aux enfants issus de mariage mixtes. Ta'a Marboutah donne la parole à un échantillon de femmes, qui ont épousé des non-Jordaniens (Egyptiens, Syriens, Turcs, Irakiens, etc.), mais qui n'ont pas réussi à obtenir la nationalité jordanienne pour leurs enfants. Le film, organisé autour de portraits de femmes, s'appuie sur un mode de narration "à la manière de Shehérazade" (comme relevé par le réalisateur), dans le sens où chaque récit est embouteillé dans un autre, et chaque histoire ouvre sur une autre.Dans Ta'a Marboutah (un titre ingénieux qui pointe du doigt la situation de ces femmes, enchaînées), il y a les mères qui prennent la parole, mais également les enfants qui affirment haut et fort leur appartenance à la Jordanie. Par les cas qu'il expose et les exemples concrets qu'il donne, Ehab Alkhatib nous met face à la détresse de ces femmes qui subissent humiliation et attente interminable devant les guichets de l'administration et essuient des refus injustifiés. L'absurdité n'est jamais loin dans ce genre de situations, et les histoires sont poignantes, notamment celle de la femme à qui l'on a demandé de céder son héritage, étant la seule héritière de ses parents, elle ne peut le transmettre à ses enfants issus d'un mariage mixte. Il y a également les enfants qu'on retire de l'école parce qu'on ne peut justifier leur nationalité. On retrouve également l'histoire d'une femme qui a épousé un Turc qui lui a caché son mariage en Turquie. Lorsqu'elle se renseigne sur lui à l'ambassade de son pays, on lui annonce qu'il est déjà marié, et la Turquie étant un Etat laïque, elle ne reconnaît pas son mariage avec elle, et par conséquent son enfant avec lui n'existe pas. Il y a, en outre, dans ce documentaire, des femmes qui en viennent à remettre en question, ou pire, à regretter leur union avec des étrangers. Elles expriment une culpabilité pour un crime qu'elles n'ont pas commis. Ta'a Marboutah aborde la discrimination envers les enfants issus d'un mariage mixte. Ce rejet et cette forme de racisme sont très mal vécus par les femmes et leurs enfants. À la fin du documentaire, des personnalités célèbres, comme les comédiennes Saba Mbarek et Nadera Omrane, transmettent leurs témoignages, d'autant qu'elles aussi se sont mariées à des non-Jordaniens. Ehab Alkhatib a estimé, à l'issue de la projection, que le film ' produit dans le cadre de l'atelier Maâmal 612 d'une association qui dépend du ministère de la Culture jordanien et qui tend à développer des projets cinématographiques ' est un hommage à "la femme militante dans les détails du quotidien". Il a aussi évoqué le Festival Karama qu'il a fondé et qui s'intéresse justement à des thèmes liés aux droits de l'homme, en soutenant que le cinéma peut avoir un impact sur les gens, et ce, pour amorcer un changement. Au fil des témoignages qui interpellent le spectateur, on s'interroge sur le fondement même de l'identité. Qu'est-ce qui fait que l'on appartienne ou pas à un pays ' Est-ce que la nationalité se mérite ' Et dans ce cas peut-on retirer la nationalité à ceux que l'on considérerait comme étant de "mauvais citoyens" ' Des interrogations qui ne trouvent pas encore de réponses en Jordanie.
S. K.
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