On boucle trois mois et la crise est toujours là. Il semble que la fièvre de changement, qui a fait trembler tout le corps de la société, n'ait pas encore touché ces têtes têtues du sommet qui tentent toutes les méthodes pour anesthésier l'ardeur des foules. Certes, jusque-là, c'est un clash sans violence entre le pouvoir et la rue, une première dans l'histoire récente de l'Algérie, mais il n'en reste pas moins qu'il y a trop de jeu avec les nerfs. C'est pourquoi, l'issue du bras de fer risque de prendre de la durée. Dans ces circonstances-là, seul le dialogue peut nous sauver et désarmer toutes les violences, réelles ou psychologiques soient-elles. Le dialogue peut nous aider à prendre les décisions politiques qui s'imposent pour changer les choses avant qu'il ne soit trop tard, à condition, bien évidemment, qu'il soit valable et constructif. Autrement dit, la nomenklatura gagnera à éviter le pire si elle prend langue avec le mouvement populaire, en dévoilant dès le départ des engagements sérieux et des règles bien strictes. Pour fertiliser les revendications citoyennes, le chef d'état-major devrait, par exemple, donner un engagement solennel devant le peuple que la grande muette restera dans ses casernes et ne se mêlera jamais de la politique. En ce sens, celle-ci s'astreindra à ses missions constitutionnelles, dans le respect des lois de la République, sans aucune intrusion dans le jeu politique en cours. Il est évident que mettre en ?uvre cette dynamique de dialogue qui sommeille depuis longtemps dans l'esprit de la société sera réparateur, si les décideurs savent bien lui épargner les magouilles, les piratages odieux et les détournements populistes. Pratiques qui sont monnaie courante durant les décennies de dictature. En gros, l'Etat devrait être un lieu de reconstruction et de réconciliation sociale, créateur de surcroît de consensus et de compromis, et non pas un espace de luttes claniques, provocateur de divisions. Pour qu'il réussisse, un dialogue doit être entrepris en cohérence avec ce principe-là. Or, la peur du peuple aujourd'hui, c'est de voir les errements du passé revenir en force et saper leur élan pour la liberté.En résumé, les Algériens craignent que le pouvoir ne soit prêt à dialoguer que pour tromper l'autre partie et saboter le mouvement porté, à tour de bras, par tout un peuple. Bien entendu, ceux qui s'acharnent à un tel jeu, en haut lieu, ne se rendent jamais compte de «l'effet boomerang» qu'il provoque et les dangers qu'ils font peser sur la cohésion de la nation.
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Posté Le : 02/06/2019
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kamal Guerroua
Source : www.lequotidien-oran.com