Le parcours commun sur les traces d'une histoire tumultueuse est peut-être une chance qui se perdrait si le projet montpelliérain était définitivement enterré.LyonDe notre correspondantA l'occasion de la Comédie du livre, événement littéraire de première importance, le maire de Montpellier, Philippe Saurel, président de la communauté d'agglomération, a eu fort à discuter ce week-end lorsqu'il croisait les défenseurs du projet du Musée de la France et de l'Algérie. Même si la rencontre culturelle de la ville jumelée avec Tlemcen avait cette année pour invitée la littérature nordique, après l'Algérie l'an dernier, le parfum de l'outre-Méditerranée flottait dans l'air. Il se murmurait alors que l'élu serait peut-être prêt à ouvrir le dialogue, avant qu'il ne prenne sa décision finale de remplacer ce musée, déjà bien avancé, par un musée d'art contemporain. Les signataires de la lettre ouverte au maire agissent en ce sens et espèrent avoir gain de cause. «La pétition l'a gêné», nous disait dimanche matin le professeur Jean-Robert Henry, président du comité scientifique du futur musée. «Le fait peut-être qu'il n'y ait eu aucune discussion avec les premiers intéressés avant son annonce», insiste-t-il, avant de rappeler l'objectif du projet. «Il s'agit pour nous d'insister sur le devoir d'histoire, plus que le devoir de mémoire qui peut être antagoniste. L'histoire d'un parcours commun. Pour cela, j'ai mis en ?uvre un réseau de gens que je connais depuis longtemps en France et en Algérie, tous des chercheurs qui se sont mobilisés bénévolement. Une question de liberté», ajoute-t-il.Au maire qui affirmait la semaine dernière que les autorités algériennes n'étaient pas concernées, ni n'avaient été mêlées au projet, l'universitaire, toujours proche de l'Algérie, s'inscrit en faux. «L'an dernier, lorsque l'Algérie était l'invitée de la Comédie du livre, nous avons eu des échanges avec la directrice de cabinet du ministère de la Culture. Nous avons eu aussi des liens avec le consulat de Montpellier et celui de Marseille, en présence du professeur Ahmed Mahiou. Des contacts toujours dans l'idée d'une logique scientifique, loin des interférences politiques, seule façon de réussir dans la liberté totale des chercheurs. Il ne s'agit pas d'avoir un discours algérien face à un discours français ni l'inverse. Il nous faut en même temps tout dire.»En un mot, «être autonomes face aux mémoires divergentes» Pour Paul Siblot, dont la carrière est attachée à l'Algérie, membre du comité scientifique, initiateur des échanges universitaires qui ont conduit au jumelage Montpellier-Tlemcen, le musée que le maire veut interrompre permettrait au contraire «au public français et algérien de dépasser le ressentiment et la répétition traumatisante pour ouvrir le regard sur l'avenir.»Du reste, insiste-t-il, «ce projet est à mon avis le seul pour l'instant d'une coopération franco-algérienne sur le sujet le plus difficile : l'histoire. La coopération existe déjà dans les domaines universitaire, culturel, économique, mais dans le domaine de l'histoire c'est vraiment le premier et je peux vous assurer qu'il est lancé dans les meilleures conditions d'échanges. Il prend acte de l'histoire ; 52 ans sont passés, il y a bien sûr le regard sur le passé qui est nécessaire, mais il y a aussi l'ouverture, c'est cela que nous voudrions faire, pas seuls, mais avec les collègues et amis algériens, pour l'offrir aux jeunesses des deux pays. C'est important, c'est une évolution de l'histoire et nous devons le faire ensemble. Je crains que cela gêne des personnes en France et je ne ferai pas le procès à M. Saurel d'être de ceux-là, mais c'est peut-être par opportunisme politique qu'il l'envisage, faisant ce qu'il croit intéressant pour son électorat.»Ce n'est qu'en juin que la réunion du conseil communautaire de l'agglomération montpelliéraine prendra sa décision. D'ici là, les centaines de signataires de la pétition au maire, et les dizaines d'articles et d'émissions de radio et de télévision auront peut-être fait penché le fléau de la balance vers une issue favorable.
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Posté Le : 28/05/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Walid Mebarek
Source : www.elwatan.com