Algérie

Le défi de la modernisation compromis par la surpopulation



Avec l'aide d'experts britanniques, l'administration pénitentiaire a lancé hier un nouveau système de gestion moderne des prisons. Avec une population carcérale de 59 000 détenus, âgés dans près de 65% des cas de moins de 30 ans, entassés dans des établissements en majorité datant du début du siècle dernier, la gestion des prisons devient un défi très difficile à relever.En attendant la construction de nouveaux établissements, dont la réception pour les 13 premiers est prévue vers la fin de 2009, des efforts doivent être entrepris pour assurer le minimum, comme l'hygiène, la santé, l'alimentation, mais aussi donner une chance de réinsertion sociale aux détenus à travers l'accès à l'enseignement et à la formation en milieu carcéral. Dans ce cadre, un programme de gestion stratégique des prisons a été lancé dès 2006 avec le Centre international des sciences pénitentiaires (CISP) de Grande-Bretagne, spécialisé dans les systèmes de gestion des établissements pénitentiaires et dont la compétence a été reconnue dans au moins une trentaine de pays à travers le monde.Le programme avec l'Algérie repose sur trois axes. Le premier, consacré au workshop, a été achevé hier, alors que le second, consacré à l'application de nouvelles techiques de gestion des prisons adaptées à la situation algérienne, a été officiellement lancé hier. Doté d'un budget de 300 000 livres sterling, ce programme vise la modernisation de la gestion des établissements pénitentiaires à travers quatre prisons pilotes. Lors d'une cérémonie organisée au nouveau siège de la direction générale de l'administration pénitentiaire (DGAP), à Ben Aknoun, Alger, et à laquelle ont été conviés l'ambassadeur du Royaume-Uni à Alger, des experts britanniques du CISP, ainsi que des représentants d'associations qui activent dans le domaine de la réinsertion des détenus, Mokhtar Felioune, premier responsable de la DGAP, a mis l'accent sur la coopération avec le CISP qui va permettre, selon lui, de moderniser la gestion des prisons afin qu'elles soient conformes aux normes internationales.Il a affirmé que le lancement de la deuxième phase de ce programme, qui prend fin en 2010, entre dans le cadre de la réforme de ce secteur et « intervient au moment où une nouvelle loi relative à la gestion des établissements pénitentiaires a été adoptée (2005), et l'Etat a lancé la réalisation de nouvelles prisons répondant aux standards internationaux. Ce qui rend votre expertise très utile pour nos efforts ». En marge de cette cérémonie, M. Felioune a expliqué que quatre établissements pilotes ont été retenus pour servir à l'application de ce nouveau système moderne de gestion adapté à la réalité carcérale algérienne. Leur choix n'a pas été fortuit. Il s'agit des prisons de Boufarik, où il y a une forte proportion de prévenus, d'El Harrach, pour le fait qu'elle abrite toutes les catégories de détenus, Tidjelabine, pour sa dimension moyenne, et enfin la prison de Boussouf, à Constantine, parce qu'elle est grande.Les experts britanniques se sont déclarés optimistes quant à la réussite de ce programme parce que, selon eux, il a fait ses preuves dans des conditions beaucoup plus difficiles dans d'autres pays. La troisième phase de ce programme algéro-anglais concerne la formation à travers des voyages d'étude dans les prisons britanniques au profit des gestionnaires des établissements pénitentiaires algériens. M. Felioune a insisté sur les efforts fournis depuis 2000 en matière de prise en charge des détenus. Ce qui a permis, a-t-il précisé, de doter tous les établissements de chauffage central, d'améliorer les repas, la création de 96 quartiers pour les détenus malades dans les hôpitaux et l'augmentation de 300% du budget relatif à l'acquisition des médicaments.M. Felioune a précisé que d'autres mesures ont été prises pour augmenter le nombre de visites à quatre fois par mois et doter tous les établissements de lignes téléphoniques. En matière d'enseignement, le responsable a rappelé qu'entre 2003 et 2008, le nombre de détenus inscrits pour suivre les cours d'alphabétisation et d'enseignement a atteint 42 911. Parmi eux, 1451 ont réussi leur BEF, alors que 36 751 ont suivi une formation professionnelle.Pour ce qui est de la réinsertion, le responsable a déclaré qu'entre 2005 et 2008, 7545 détenus ont bénéficié de la liberté conditionnelle, 1399 de la semi-liberté et 8268 de la permission de sortie, alors que 1898 autres ont été libérés dans le cadre de l'activité d'intérêt général. Néanmoins, ces efforts restent compromis par la surpopulation qui, depuis la baisse des mesures de grâce et l'aggravation des peines contre la petite délinquance, ne fait qu'augmenter. Ainsi, la population carcérale est passée de 45 000 en 2006, à 55 000 en 2007 et a atteint 59 000 au 31 mai 2008.Ce qui constitue une contrainte importante et une pression lourdement ressentie par les gestionnaires. M. Felioune a estimé que le prochain amendement du code pénal permettra peut-être de résoudre ce problème en attendant la réception des établissements pénitentiaires d'ici fin 2009. « Le projet de texte prévoit des peines de substitution qui permettront aux magistrats de favoriser les travaux d'intérêt public pour certaines catégories d'infraction au lieu de la détention », a-t-il noté.


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