Des projets
grandioses sont annoncés dans l'industrie automobile et l'énergie solaire. Des
projets si énormes qu'ils ressemblent à des rêves.
L'Allemagne n'a
qu'à bien se tenir. Même si Rabah Madjer et Lakhdhar Belloumi ont pris leur
retraite depuis longtemps, d'autres hommes ont pris la relève, et sont toujours
en mesure d'infliger à l'Allemagne une raclée similaire à celle de 1982. Cette
fois-ci, l'équipe sera entraînée par M. Ahmed Ouyahia et les hommes clés de son
dispositif seront MM. Chakib Khelil et Abdelhamid Temmar.
Les deux hommes ont en effet montré des
dispositions suffisantes pour terrasser l'ogre allemand sur son terrain. Ni la
légende des constructeurs automobiles allemands, ni la robustesse de leurs
voitures, ni la puissance financière des entreprises germaniques, ni l'expérience
allemande dans la recherche des énergies renouvelables, ne peuvent constituer
des défis insurmontables pour les deux ministres algériens. Cette semaine
encore, ils viennent d'affirmer leur détermination. Rien ne les arrêtera.
L'Allemagne a beau être la première économie d'Europe et le premier exportateur
du Vieux Continent, ce n'est pas pour autant que ses entreprises sont
imbattables. Ce n'est pas non plus une raison pour que les entreprises
allemandes se lancent dans des projets en Algérie en passant outre la
bureaucratie algérienne. M. Chakib Khellil est là, vigilant. Il est prêt à
contrer les projets allemands dans le domaine de l'énergie solaire, quitte à
empêcher le plus grand désert du monde à assurer sa mutation pour devenir, à
l'horizon 2050, un immense champ de production d'énergie solaire, après avoir
produit des hydrocarbures pendant un siècle. Interrogé sur une initiative
gigantesque lancée par un groupe d'entreprises allemandes pour produire de
l'électricité solaire au Sahara et la transférer ensuite vers l'Europe, M.
Chakib Khellil a déclaré qu'il n'était pas au courant ! «Je n'ai aucune idée
sur ce projet et je ne peux faire aucune réflexion », a-t-il dit.
Un ministre
peut-il ne peut pas être au courant d'un projet dont on dit qu'il coûtera plusieurs
milliards de dollars ? Mystère. En fait, affirme un spécialiste du secteur, M.
Khellil a utilisé cette expression pour bien affirmer que la démarche a été
faite sans son parrainage, et qu'il désapprouve la méthode. «S'il s'agit
uniquement d'implanter des panneaux sur notre sol et exporter de l'énergie
solaire, nous ne sommes pas intéressés», a dit le ministre, qui a cité un
certain nombre de conditions, parmi lesquelles le recours au partenariat, le
transfert de technologie et des équipements. «Si ces conditions ne sont pas
remplies, nous ne sommes pas intéressés ».
L'argumentaire peut paraître solide. D'autant
plus que, pour un pays comme l'Algérie, il n'est pas illégitime de vouloir
associer une grande entreprise publique à un projet aussi important que la
recherche dans le domaine de l'énergie solaire. Il reste à savoir ce que l'on
entend par partenariat. Cevital, l'entreprise du milliardaire Issad Rabrab, a
été associée au projet allemand. Est-ce là un partenariat non suffisant aux
yeux du ministre ? « Les partenaires allemands ont offert à M. Rabrab une place
pour bénéficier de ses entrées dans le système de décision algérien », estime
le même spécialiste de l'énergie. « Mais les Allemands resteront maîtres du
processus, car aucune entreprise privée algérienne n'est en mesure de traiter
d'égal à égal avec eux », dit-il. « Cela signifie que les partenaires allemands
veulent garder le contrôle du projet et, si possible, contourner M. Khelil et
son ministère», estime-t-il.
Est-ce le bon choix ? En tous les cas,
l'option ne semble pas plaire au ministre de l'énergie, qui le montre
clairement. Mais au-delà de ce qui s'apparente à une querelle
algéro-algérienne, se profile un problème de fond, que l'Algérie semble
condamnée à traîner pendant de longues années. Il s'agit de l'incapacité de
l'administration algérienne à accompagner tout projet relativement complexe. Ce
qui donne un curieux résultat : ministres et hauts responsables annoncent des
projets grandioses, mais rien ne se concrétise sur le terrain, qu'il s'agisse
du million de logements ou des 35 milliards de dollars d'investissements de la
firme émiratie Eemar, par exemple. Les seuls projets qui aboutissent sont ceux
offerts intégralement à des entreprises étrangères : autoroute est-ouest, téléphonie
mobile, etc.
Dans ce cas précis, la situation est encore
plus inquiétante. En effet, un protocole d'accord a été signé il y a un an par
l'Algérie et l'Allemagne, en vue de développer la coopération dans le domaine
de l'énergie solaire. Très engagés dans la recherche d'énergie propre, les
Allemands ont le financement et le savoir-faire. L'Algérie peut contribuer au
financement, et dispose du « champ de soleil ». Il ne reste plus qu'à trouver
les formules d'association, et à régler deux problèmes techniques majeurs :
comment produire de l'énergie solaire à grande échelle à un coût acceptable, et
comment la transférer du Sahara vers l'Europe sans trop de déperditions ? Mais
depuis la signature du protocole d'accord, le dossier n'a guère avancé. La bureaucratie
algérienne attend les instructions. Et les Allemands s'impatientent. D'où,
peut-être cette maladresse, qui consiste à vouloir bousculer les choses en
trouvant un cheval de Troie pour s'introduire en Algérie. Une manÅ“uvre qui bute
sur la vigilance de M. Khelil. Quitte à pousser le partenaire allemand à
chercher ailleurs, comme l'avait fait Renault, parti s'installer au Maroc alors
que tout désignait l'Algérie pour abriter une grande usine de montage
automobile.
Mais pour l'automobile non plus, il n'y a
guère de souci à se faire. M. Temmar veille. Si Renault hésite, tant pis pour
le constructeur français. L'Algérie trouvera un partenaire encore plus solide.
Ce sera fait avant la fin de l'année, annonce triomphalement M. Abdelhamid
Temmar. Des négociations sont en cours avec une grande firme européenne,
dit-il. Volkswagen, murmure-t-on à Alger.
Et l'Algérie ne se contera pas d'un simple
montage, mais elle ira vers la fabrication ! Ultime coquetterie, M. Temmar
précise que le coût du véhicule à produire en Algérie « doit être inférieur à
celui importé ».
En clair, cela signifie que des Golf, des
Polo, et des Passat seront bientôt fabriquées en Algérie. Il reste juste un
petit problème à régler: plus personne ne prend M. Temmar au sérieux depuis
longtemps.
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Posté Le : 30/07/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abed Charef
Source : www.lequotidien-oran.com