Ce dix octobre 2008, le monde de la finance international a connu un "vendredi noir". Tous les indices boursiers ont fait un plongeon historique commançant à Wall Street. On veut nous faire croire que ce "tsunami" qui déferle actuellement sur les places boursières du monde nous épargne, parce que très prosaïquement nous ne serions pas concernés. Et si nous ne sommes pas concernés c'est parce que nous sommes sous-développés. Et parce que nous sommes sous-développés nous n'avons pas d'affaires en bourse, donc pas d'intérêts qui peuvent fondre comme sorbet au soleil. En quelque sorte, notre sous-développement serait finalement "du pain béni". Trop simpliste comme raisonnement. Aussi, on aurait tord de se faire tant d'illusions et de baisser la garde. Il est vrai que n'avons pas vu comme en 1929, et loin de nous, des gens se jetaient par les fenêtres des immeubles à New York et ailleurs, dans des suicides spectaculaires en série. N'en déplaise à certains de nos responsables financiers et politiques, qui affichent un optimisme de circonstance, ce serait oublier ou négliger gravement l'effet "domino" et "globaliste" de la crise. En effet, quand bien même nous ne serions pas directement touchés par celle-ci, nous le serons sans aucun doute par l'effondrement du prix du pétrole qui continue à chuter aussi de façon spectaculaire. A quel niveau ce prix va-t-il s'arrêter ? Dieu seul le sait. D'ailleurs, c'est pour cette raison que l'OPEP dont l'Algérie assure actuellement la présidence, qui prévoyait de se réunir en décembre a rapproché la date de sa réunion à la mi-novembre prochaine (le 18) à Vienne. Il y a donc péril en la demeure. Du pétrole dépend hélas ! notre survie. L'OPEP va certainement décider de réduire sa production afin de ralentir l'affaissement du prix du brut et ce, à défaut de pouvoir le stopper. On sait qu'au mois de juillet (il ya donc à peine trois mois), le prix du baril avoisinait les 150 dollars, il est descendu le10 octobre courant sous la barre des 80 dollars sur les places boursières occidentales et du sud-est asiatique. Il était exactement à 77,77 dollars à la fermeture de la bourse de New York ce vendredi 10 octobre.
Résumons-nous. Malgré l'injection dans l'économie américaine des 700 milliards de dollars du "plan PAULSON", du nom du secrétaire d'Etat américain au Trésor, cette "perfusion" sensée éponger les actifs dits "toxiques" de certaines banques américaines, (rachat par l'Etat américain des crédits hypothécaires douteux dits "subprimes", pour les revendre plus tard) n'a donné aucun résultat probant. Au contraire, le marché boursier mondial continue à se dégrader de jour en jour pour atteindre des cotations en baisses inimaginables. Dès lors, il parait évident qu'il y avait lieu d'imaginer autre chose. En ce même jour, un vendredi 10 chargé de beaucoup de fébrilité, vont se réunir en catastrophe à Washington les ministres des finances du groupe des sept (G7) et les gouverneurs de leurs banques centrales respectives. Ce sont les "pompiers attitrés" à qui échoit "la corvée" d'éteindre la crise. D'ailleurs est-il possible pour l'un d'eux de s'esquiver ? Néanmoins, Mme Christine LAGARDE, ministre français de l'économie s'était montrée fort sceptique la veille, en déclarant "qu'il n'y aura pas de réponse harmonisée". Mais, c'était sans compter avec la farouche volonté des Américains de vouloir en finir avec le problème. En effet, le président américain G.W. BUSH avait déclaré quelques heures avant la réunion des ministres du G7 que "les Etats-Unis avaient les moyens de résoudre la crise". Il faut croire que la faillite de la banque américaine LEHMAN BROTHERS (4ème grande banque dans le monde) a provoqué une sorte de "traumatisme" profond dans le monde de la finance, notamment américain. Les dirigeants américains regrettent d'avoir laisser choir la banque en question. En effet, c'est à la suite de sa faillite que s'est déclenchée une cascade de faillites bancaires en Amérique et dans le monde. Aussi, la première des cinq résolutions qu'ont prises les ministres des finances du G7, consiste à ne plus permettre de faillites de banques. Mme LAGARDE précisera par la suite qu'il s'agit de soutenir "les établissements financiers à caractère systémique". Donc il ne s'agirait pas du soutien systématique de n'importe quelle banque.
Auparavant, on s'en souvient qu'à l'instar du Trésor américain, d'autres banques centrales occidentales et du Japon avaient également injecté de l'agent frais dans leurs économies pour soutenir leurs propres marchés financiers. Force est de constater que ces apports de liquidités n'ont pas eu les effets escomptés et les bourses du monde, en premier Wall Street, continueront à subir la spirale descendante des indices qui s'effondre. Aussi, une certaine panique s'était-elle emparée du monde de la finance et des gouvernants européens. Ces derniers se sont trouvés devant la lourde responsabilité de prendre des mesures urgentes. Cette "mise en demeure" semble avoir mis en péril la solidarité ("de façade" sommes-nous tentés de dire) des Etats de l'Union Européenne qui se précipitèrent en rangs désordonnés devant la crise. Dans cette précipitation c'était apparemment "du chacun pour soi et Dieu pour tous". La France qui préside actuellement à la destinée de l'union, avait essayé à travers beaucoup d'efforts de son président M. SARKOSY, de rassembler ce qui pouvait encore l'être de la "Maison Europe", en organisant un mini-sommet et ce, pour sortir en fin de compte avec d'une décision commune mitigée qui était loin d'être convaincante encore moins satisfaisante pour tout le monde. L'Irlande, la première avait donné le "la" d'une discorde patente en accordant des soutiens financiers publics à ses banques en difficultés sans en référer aux autres pays de l'Union. L'Angleterre avait annoncé qu'elle allait agir de même et l'Allemagne faisait connaitre son désaccord pour un "Fonds de soutien commun". L'Espagne de ZAPATERO montrait de la mauvaise humeur pour ne pas avoir été invitée au mini-sommet des chefs d'Etat organisé par le président français. Quant à l'Islande, elle avait annoncé qu'elle gelait des avoirs bancaires qui concernaient aussi des Britanniques. La réaction du Royaume-Uni ne s'est pas fait attendre : M. Gordon BROWN menaçait de saisir la justice internationale si l'Islande mettait sa décision en exécution… Des réactions divergentes n'en finissaient pas. A telle enseigne que le conseil donné aux membres de l'Union par M. Dominique Strauss Kahn, Directeur Général du FMI, fut à peine audible à savoir "que toute action non coordonnée était à éviter sinon à proscrire". Il faut comprendre que tous ces pays, pris de court par le phénomène, non seulement ont perdu leurs repères habituels mais plus graves, ils sont entrés de plein pied dans la récession. Et qui dit récession dit marasme, stagnation, voire recul des activités économiques et donc diminution de la consommation. D'où la chute des prix à la consommation et notamment celui du pétrole qui nous concerne directement.
Aussi, la question qui vient à l'esprit est : "que réserve l'avenir ?". Apparemment, personne ne peut répondre ici et maintenant à cette question de façon exacte. Les experts peuvent s'étendre de conjectures en conjectures lesquelles resteront des conjectures. Les ministres des finances du G7 eux sont "mis en demeure" de trouver une solution immédiate. Ils ont décidé des mesures que l'on sait. Seul l'avenir nous dira si ces mesures sont efficaces où pas. Mais avant de formuler une quelconque hypothèse, il serait indispensable de revenir un peu en arrière pour savoir pourquoi le monde est arrivé à cette situation. Il est évident que l'idéologie néolibérale dominante est pour quelque chose dans tout ce désastre. En effet, "La main invisible" chère au génie du libéralisme l'Ecossais Adam Smith, reprise par les théoriciens de l'économie libérale classique que sont les britanniques David Ricardo et John Stuart Mill, "cette main invisible" qui régulerait le marché libre a certainement fait défaut ici. L'alchimie du "laisser-faire et laisser-aller" ne marche plus parce que le système a pris des chemins pervers. Il est vrai que les Etats-Unis d'Amérique est "un pays d'entrepreneurs" ; un pays qui s'est construit, qui s'est fait par et grâce à "l'esprit d'entreprise", au savoir-faire, à la création de richesses par le travail et une dynamique permanente de créativité et d'invention "du nouveau". Le développement crée la croissance et la croissance crée la consommation. Cette dernière est supposée apporter le bien-être aux individus. Ce "bien-être" en constante évolution et la richesse toujours possible sont à l'origine du mythique "rêve américain". Mais actuellement ce système ultralibéral est en dérive, victime de sa propre assurance. La financiarisation de l'économie américaine et partant de l'économie mondiale, semble avoir pris le pas sur l'esprit entrepreneurial "pur", non pas pour le supprimer mais pour le dominer de sorte à en tirer les profits exorbitants. La spéculation à outrance sur les marchés financiers pour des bonus toujours plus importants est à l'origine de la crise. Ce sont les effets pervers des spéculations abusives et disproportionnées sur les marchés financiers que les ministres des Finances du G7 vont essayer de corriger voire de "moraliser". Il y a donc urgence à instaurer une éthique dans toutes les pratiques boursières. Et il faudrait en même temps réparer les dégâts énormes que le système a subis. Aussi, les capitaux envisageables à mettre en place pour les éponger sont également énormes. Mais ironie du sort et de l'histoire, nous assistons à la contradiction du siècle : un gouvernement comme "l'Administration BUSCH", tenant inconditionnel de l'idéologie ultralibérale, préconise et applique l'interventionnisme étatique à outrance et qui va jusqu'à vouloir nationaliser des entreprises et/ou y prendre des parts participatives importantes. C'est presque tentons-nous de dire : une vengeance rétroactive de la chute du mur de Berlin.
Enfin, pour utiliser un langage terre à terre, il faut savoir que l'économie américaine représente actuellement environ 40 % de l'économie mondiale et ce n'est pas rien. Si cette économie est malade toute l'économie mondiale ne peut être que malade. Aussi, tout le monde a intérêt à ce que "le malade" guérisse et vite. Seulement voilà : ce n'est pas 700 milliards de dollars qu'il faudrait mais peut être entre 5 000 et 7 000 milliards de dollars selon certains experts, ne serait-ce que dans la perspective d'empêcher les plus grandes banques du monde de disparaitre. Les ministres du G7 veulent protéger aussi les titulaires de comptes de dépôts auprès des banques. Quant aux porteurs d'actions, pour celles qui ne valent plus grand-chose en bourse, ils n'auront plus que les yeux pour pleurer. Ceux qui ont investi dans l'immobilier resteront dans une expectative sans grand espoir. Ceux qui auront de l'argent "de côté" feront certainement de bonnes affaires et ça se trouve !
Pour réaliser leur programme de sauvetage, les ministres du G7 auront donc besoin de beaucoup d'argent. Et cet argent il faut bien le trouver quelque part. Bien sûr, d'abord on ira le chercher dans les caisses des Etats, c'est-à-dire dans les Finances Publiques des pays concernés en particulier, autrement dit dans la poche des contribuables, puis dans l'épargne publique ce qui revient au même, et aussi chez les personnes morales de droit public et de droit privé. Pour l'épargne publique diverses modes d'engrangement de l'argent peuvent être utilisées par les gouvernants, tels les emprunts sous forme d'émission dans le public de Bons du Trésor produisant des intérêts à des taux divers : à court, à moyen ou à long terme ou sous forme d'obligations (emprunts obligataires) dans les mêmes conditions de taux d'emprunt. Puis ces gouvernants auront certainement recours aux emprunts extérieurs : d'abords auprès des institutions de Bretton Woods : le FMI et la Banque Mondiale. Mais ce qui tombe aussi sous le sens, c'est surtout le recours aux "fonds souverains" des Etats-clients de la Banque Centrale américaine et autres. Il y aurait donc des accords et autres protocoles envisageables avec la Chine, l'Inde, la Russie et avec les Etats pétroliers du Golfe et d'ailleurs, donc l'Algérie, et qui sont tout indiqués "pour venir en aide à la résorption de la crise". Après quoi, tout ce qui restera à faire c'est de mettre en place les mécanismes adéquats pour la collette des fonds et leur utilisation rationnelle. En quelque sorte l'on pourra dire que l'un des sens que prendrait la globalisation de l'économie mondiale se concrétisera dans ce phénomène de solidarité internationale qui pourra être jugé positif ou négatif selon sa réussite ou son échec.
Autre ironie du sort : le cas échant, si les "fonds souverains" de l'Algérie sont utilisés à cette fin, ce qui est fort possible puisqu'il s'agit de dépôts de fonds garantis avec intérêts, (la banque domiciliataire n'est pas obligée de faire connaître au déposant l'utilisation de ses fonds et ne le fait jamais), l'argent de nos générations futures aurait ainsi, pour une part, servi à sauver de la déconfiture des établissements financiers et des capitalistes occidentaux, pendant que des jeunes harragas tentent toujours de rejoindre cet Occident qui ne veut pas d'eux.
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Posté Le : 23/11/2011
Posté par : soufisafi
Ecrit par : Abdallah Azizi
Source : ammouri.kinssha.org