Le coup de bill'art du Soir

Par Kader BakouL'homme, blasé, n'aime pas qu'on parle politique ou religion devant lui. Chaque jour avant de prendre le taxi, il espère de tout son cœur que personne, ni le chauffeur de taxi ni les autres passagers, n'abordent ces deux thèmes honnis.Il est surtout étonné (et agacé) par l'assurance des gens et leurs jugements sans appel. Ils savent tout, sur tout le monde. Il est aussi étonné par leur manichéisme et leurs modes de pensée stériles, voire destructeurs.L'homme n'est pas athée, mais n'aime pas se mêler aux discussions sur la religion, à peu près pour les mêmes raisons qui le font fuir des discussions sur la politique.Ce jour-là , il est dans un taxi à Alger, quand un passager aborde le thème de la religion. Le blasé se dit : «Encore les mêmes discussions byzantines !».«Dieu a donné la raison à l'homme pour trouver la voie de la sagesse et éviter la fitna», fait remarquer le chauffeur de taxi après le discours «djihadiste» du passager. Cette remarque n'était visiblement pas du goût du passager qui, d'ailleurs, allait descendre. Le blasé est maintenant le seul passager dans le taxi. Le chauffeur poursuit sa discussion sur la religion. Ses paroles sont d'or. Il parle surtout de spiritualité. L'ex-blasé de religion l'écoute dans un silence religieux. Il découvre qu'il existe d'autres dimensions dans la vie. Pour la première fois depuis qu'il est monté dans ce taxi, il regarde attentivement le chauffeur de taxi.«Il doit être un mozabite», se dit-il. Il est déjà arrivé à destination. Mais il n'a rien dit au chauffeur de taxi afin de continuer à l'entendre parler de religion. Quand ce jour-là il est descendu du taxi l'esprit et le cœur apaisés, l'ex- blasé avait retrouvé le repos de l'âme. Aujourd'hui, il ne comprend pas ce qui se passe à Ghardaïa.K.'b.