Algérie

Le couffin du Ramadhan, c'est fini!



Un rituel où il y avait à boire et à manger. Au propre comme au figuré. L'Etat ne procédera plus à aucune distribution de couffins durant le mois sacré. Une pratique qui emportera avec elle beaucoup de tares...La charité avait bon dos. C'est le président de la République en personne qui a pris la décision, lors du Conseil des ministres de mardi dernier, de retirer le couffin de Ramadhan des activités de l'Etat. Après avoir écouté attentivement l'exposé du ministre de l'Intérieur sur le bilan des opérations de solidarité nationale de ce mois de Ramadhan, le chef de l'Etat est revenu peu après sur le sujet pour couper «une mauvaise branche» de ces opérations. «8,4 milliards DA ont été mobilisés, notamment par les communes et les wilayas, pour assurer la distribution de près de 2 millions de couffins, ainsi que la distribution de près de six millions de repas chauds au niveau de 1 300 restaurants» a précisé le ministre de l'Intérieur dans son exposé en Conseil des ministres. 840 milliards de centimes! Joli pactole remis aux collectivités locales pour aider leurs démunis. Joli pactole qui a permis la distribution d'environ 2 millions de couffins pleins de provisions et de servir près de 200.000 repas chauds chaque jour. Deux types d'aides qui prêtent à débat. Commençons par les couffins. Dans la forme, la formule donne beaucoup de travail et de soucis aux autorités locales. Il leur faut trouver les fournisseurs, les bons fournisseurs, des couffins et de leurs contenus. En général ce ne sont pas de vrais couffins en raphia, mais des substituts en matière plastique. C'est déjà moins cher, avec en plus un grand choix de fournisseurs pour faire jouer la concurrence. Une fois ce «marché» conclu, on passe à la seconde phase, celle des produits alimentaires devant remplir les couffins. La liste de ces produits varie selon les territoires. En général on y retrouve des pâtes alimentaires, de l'huile, du sucre, du concentré de tomate, enfin les produits de base consommés par tous les foyers. Là aussi, l'administration doit chercher et trouver le ou les meilleurs fournisseurs. Ce n'est pas de tout repos, mais quand on est charitable on y met toute son énergie. Quitte à «geler» d'autres activités qui pourront reprendre après l'Aïd. Oui, car ensuite vient la distribution qui n'est pas une mince affaire non plus' Il faut dresser la liste des démunis, des vrais démunis. Pour enfin procéder à la distribution. Alors commencent les critiques et la rumeur. Sur la liste contestée des démunis supposée contenir des passe-droits. Sur les supposés «conflits d'intérêts» entre les fonctionnaires et les fournisseurs. Et enfin sur la qualité des provisions et notamment leurs dates de péremption. Au final, l'administration s'est attirée plus de problèmes qu'elle n'en a résolu chez les nécessiteux. C'est pourquoi la décision du président de la République est «tombée» à point nommé. «Le chef de l'Etat a instruit le gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour que cesse le recours à la distribution du couffin de Ramadhan, et que cette action de solidarité de l'Etat soit réalisée dès l'année prochaine à travers des allocations financières décaissées par chèque ou par monétique» pouvait-on lire dans le communiqué publié, mardi dernier, à l'issue du Conseil des ministres. Pour que l'activité de solidarité nationale soit plus «propre». Plus honnête. Plus digne. Avec moins de tracas ni de manipulations. Un chèque représentant l'équivalent de la valeur d'un couffin préparé et distribué sur la base du fichier des démunis, revu et corrigé régulièrement, établi par le ministère de la Solidarité nationale, voilà qui est plus simple et plus clair. Une seule opération au lieu de 36. Viennent ensuite les repas chauds servis au cours de chaque Ramadhan. Les structures de l'Etat gèrent «1300 restaurants» de ce type, selon Bedoui. Pour le parcours de préparation, c'est pire que pour le couffin. Faire ses courses, c'est une chose, cuisiner et servir la table avant de la débarrasser, en est une autre. Mais au-delà des critiques, des anathèmes et des rumeurs, il faut donner un sens à cette opération. Que la police ou la gendarmerie dresse des restos le long des routes du pays pour permettre l'Iftar des voyageurs surpris loin de chez eux par l'Adhan, cela est tout à la fois sensé et magnifique. Que des zaouïas ou des associations caritatives agréées (pour le contrôle de l'hygiène et de la qualité), comme le Croissant-Rouge algérien, offrent ce genre de prestations au cours du mois de Ramadhan, mais également le reste de l'année, il faut tout simplement applaudir. Mais que des collectivités locales créent spécialement pour le Ramadhan des lieux de restauration, cela n'a aucun sens. D'une part il n'y a pas de démunis d'un mois et riches les onze mois restants. D'autre part et même dans les endroits où il n'y a pas de «restos» gratis, à la seconde même de l'Iftar, il n'y a pas âme qui vive à l'extérieur. Ce qui veut dire que tout le monde, sans exception aucune, est penché sur son bol de chorba. Que certaines personnes, pas forcément démunies, préfèrent manger gratos pour faire des économies, c'est leur problème. Mais que l'Etat fasse la cuisine et mette le couvert pour servir les démunis, il y a comme une fausse note à ce tableau. D'autant qu'il ne dure qu'un mois alors que les vrais démunis doivent manger toute la vie. Quand on vous disait que dans ce sujet il y avait à boire et à manger!
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