Algérie

"Le coronavirus, c'est comme l'injustice, il ne faut pas la faire subir aux autres"



Fidèle à lui-même, le célèbre chanteur, artiste et compositeur Brahim Tayeb positive. Dans cet entretien, il revient sur le confinement sanitaire, ses appréhensions, ses projets, et appelle ses fans à se protéger et à prémunir ceux qu'ils aiment du mal qui nous guette.Liberté : Comment vit Brahim Tayeb, l'artiste et le chanteur, cette période de confinement sanitaire '
Brahim Tayeb : Le confinement, ce n'est pas si mal. L'artiste a toujours besoin du confinement pour produire. Du coup, ce n'est pas une chose étrange pour un artiste qui hiberne pour travailler. Le confinement est volontaire chez l'artiste. Après, rester chez soi est une chose merveilleuse. On ne se sent mieux que chez soi. Mais aujourd'hui tous les citoyens du monde sont rentrés chez eux. Après, tout dépend de chaque artiste, car on a tendance à mélanger les genres.
D'ailleurs, c'est l'occasion de revoir la définition de l'artiste chez nous. C'est une opportunité pour se rendre compte de l'imposture. Être confiné, c'est aussi de bien se connaître soi-même et les personnes avec lesquelles nous sommes confinés. C'est le moment d'être ensemble et de se découvrir en profondeur. Il y a un côté positif de ce confinement sanitaire qu'il faudra, à mon avis, fructifier.
Profitez-vous de ce confinement sanitaire pour produire, écrire ou encore lire et composer '
Moi, sincèrement, je positive dans tout. L'artiste était confiné avant l'arrivée du coronavirus. Il y a des artistes qui restent chez eux à longueur d'année pour produire. Je profite de cette situation pour apprendre et pour avancer. Pas seulement pour créer. Par exemple, en cette période de crise sanitaire, j'ai beaucoup appris l'informatique, j'ai installé une station de travail chez moi, j'ai appris les nouvelles technologies de son et bien d'autres choses comme les instruments virtuels pour mieux servir la création. Du coup, c'est l'occasion de se remettre en cause et de remettre en cause un système qui produit n'importe quoi et médiatise toute la médiocrité qui va avec. Aujourd'hui que la crise sanitaire est là, on voit bien que nous n'avons rien construit pour donner la parole à ceux qui la méritent vraiment pour accompagner et rassurer la population en cette période de crise.
Êtes-vous en contact avec d'autres artistes pendant cette période de confinement '
J'ai des connaissances à l'échelle mondiale, notamment sur les forums des artistes que je connais bien, non pas pour créer, car la création n'est pas une fin en soi. Je vous assure que le contact et la communication sont toujours là, car les séquelles de cette pandémie seront visibles plus tard et le monde artistique connaîtra un chamboulent certain. Le partage de l'art prendra une autre forme. Une chose est sûre, ce ne sera plus comme avant. Peut-être que d'autres modèles de partage vont émerger. Du coup, le processus de la création connaîtra lui aussi un profond changement.
Justement, est-ce que vous préparez un nouveau produit pour vos fans '
Absolument. Avant cette crise sanitaire, j'étais sur un travail pour remettre en surface certaines anciennes chansons qui sont passées inaperçues. Je voulais les travailler au mieux et de les remixer. On a fini pratiquement tous les enregistrements. Avec l'arrivée de cette crise, nous avons tout suspendu en attendant d'y voir mieux. J'ai aussi des titres inédits que je voudrais lier avec l'album édité en 2017. Ces titres ne sortiront pas dans l'immédiat. Après, il y a l'ère du Hirak qu'il faudra valoriser par la chanson, car la rue a bien chanté avec des slogans inédits.
En fait, la rue a tout dit. Il y a des chansons de stades qui m'ont terrassé et marqué. Il y a tellement de métaphores que les gens se sont libérés que l'artiste doit être aussi direct sur les questions de l'heure. Cela va de l'intérêt général et de toute la société qui attend beaucoup de l'artiste. Après, il y a le handicap de la langue. Certes, la musique sait mieux faire sentir des choses que les mots pour exprimer certaines douleurs, mais je m'interroge comment il faudra exprimer toute la profondeur de ces slogans qui ne sont pas forcément scandés en kabyle.
Quel message voudriez-vous adresser à vos fans confinés et au grand public qui écoutent toujours vos tubes chez eux '
Eux aussi, ils doivent profiter de cette pause qui nous est tous indiquée. Je leur dis que c'est une occasion pour se ressourcer, pour se reconstruire et choisir les meilleures choses. C'est une aubaine pour gagner autre chose que l'argent. Le monde actuel est centré sur le gain et les intérêts, et on oublie souvent l'essentiel et les vraies valeurs qui ne sont pas quantifiables avec l'argent. Après, il faut beaucoup de prudence, non seulement pour soi, mais pour les autres en cette crise sanitaire. Car cette pandémie n'épargne personne. Si vous êtes atteint, vous devenez un danger pour les autres. Il faudra penser à ceux que vous aimez pour éviter la propagation du coronavirus. C'est comme l'injustice. Ce n'est pas parce que vous la subissez que les autres doivent la subir. La maladie, c'est comme l'injustice. Si on veut qu'elle s'arrête, il faudra éviter de la faire subir aux autres. C'est à chacun de nous tous de faire barrage à cette pandémie pour éviter de la transmettre aux autres.
Entretien réalisé par : Farid belgacem


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