Algérie

Le cordonnier mal chaussé



Le cordonnier mal chaussé
Il y a quelque chose de surréaliste dans la médiation algérienne dans le conflit malien. S'il faut toujours se réjouir que la voix de l'Algérie soit mêlée là où la fraternité et la paix retrouvées se substituent au langage des armes, beaucoup s'interrogent néanmoins pourquoi cette diplomatie active que les observateurs ont unanimement saluée s'agissant du conflit malien n'est pas mise, avec le même aplomb et la même force de conviction, au service de la paix intérieure.C'est l'histoire du cordonnier mal chaussé ! Ambassadeur pour la paix à l'extérieur et partisan de «la paix des braves» ou de la diplomatie de la matraque à l'intérieur. Comment se peut-il que le pouvoir algérien et sa diplomatie puissent réussir à apporter leur précieuse contribution et leur expertise pour dénouer des conflits extérieurs complexes, face auxquels des puissances étrangères n'ont rien pu faire, et se montrer, paradoxalement, incapables, impuissants, voire indifférents pour relever les défis intérieurs qui se posent au pays ' Officiellement, on vous rétorquera que l'Algérie n'est pas en crise, que la réconciliation entre les Algériens a été scellée à la faveur de la loi sur la réconciliation nationale et qu'aujourd'hui, fort de cet acquis politique, le pays est «exportateur net de stabilité» au milieu des foyers de tension qui agitent la région.Et que, par conséquent, toutes les clameurs qui s'élèvent dans la société, dans la classe politique pour appeler au changement démocratique, sur le front social avec ces grèves et mouvements de contestation qui n'épargnent aucun secteur et aucune région, y compris les plus stratégiques, comme on l'a vu avec les événements de Ghardaïa et actuellement ceux d'In Salah, sont le fait d'esprits mal intentionnés, de «harkis» voués à la vindicte populaire. Les représentants les plus zélés du pouvoir usent et abusent, depuis quelque temps, de ce nouveau référent structurant du discours officiel. L'opposition est accusée de velléités de déstabilisation du pays.Au milieu de cette bruyante battue engagée contre les forces qui appellent à la transition démocratique, le président de l'Assemblée populaire nationale (APN), Mohamed Larbi Ould Khelifa, a tenté dans un entretien à El Watan (édition d'hier) de repenser la relation entre le pouvoir et l'opposition, de lancer le débat sur les conditions à réunir pour ressouder les liens entre les Algériens, par-delà leurs différences. Ramené au discours franchement agressif du pouvoir et de ses porte-voix, beaucoup trouveront sans nul doute dans l'ijtihad du président de l'APN des relents d'angélisme politique déconnectés de la réalité du pouvoir en Algérie.Son plaidoyer pour que l'opposition puisse jouer pleinement son rôle dans la gestion des affaires du pays, la main tendue à la presse privée en soulignant ? quitte à froisser les esprits vindicatifs des cercles du pouvoir qui cherchent à tailler des croupières à certains titres de la presse privée, ciblés pour leurs lignes éditoriales ? que «les journalistes ne sont pas nos ennemis» et qu'il n'y a qu'une seule presse : la presse nationale ? peut laisser penser que des lignes commencent timidement à bouger à l'intérieur des institutions. Les prochains semaines et mois nous diront si c'est bien le cas ou si la sortie de M. Larbi Ould Khelifa n'est qu'une nouvelle ruse de guerre du pouvoir destinée à gagner du temps et à endormir l'opposition.




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