Algérie

Le consensus arabe se lézarde



Au moment même où le secrétaire d'Etat britannique chargé du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, Alistair Burt, s'était montré persuadé, hier, à  Tripoli où il effectuait une visite, que l'isolement de la Syrie allait s'intensifier si le régime de Damas décidait de continuer à  tuer les protestataires, le régime de Bachar Al Assad s'est longuement félicité des déclarations faites par Ankara rappelant que la Turquie n'autoriserait pas d'attaques contre d'autres pays à  partir de son territoire. Par de telles déclarations, la Turquie fixe en quelque sorte les lignes rouges à  ne pas dépasser aux pays qui appellent actuellement à  un changement de régime en Syrie. En clair, Ankara ne veut pas de grabuge dans la région et encore moins avec un voisin dont elle aura besoin à  l'avenir.     La situation traduit assez bien l'ambivalence pour ne pas dire l'ambiguïté qui caractérise le traitement du dossier syrien par la communauté internationale. Le constat s'applique également à  la Ligue arabe qui semble, ces derniers jours, avoir opté pour un ton plus conciliant à  l'égard de ce pays après avoir adopté contre lui de sévères sanctions, les premières de cette ampleur à  l'encontre de l'un de ses membres. Celles-ci prévoient, entre autres, un gel des transactions commerciales avec le gouvernement syrien et de ses comptes bancaires dans les pays arabes.  
Evidemment, il n'est pas interdit de penser que ce changement d'attitude affiché par les uns et les autres à  l'égard du cas syrien soit le résultat d'une prise de conscience que ce pays n'est pas la Libye et que le régime de Bachar Al Assad a encore les moyens de résister aux coups de bélier de la communauté internationale. L'hypothèse tient, d'autant que Damas bénéficie, pour le moment, du soutien indéfectible de Moscou et de Damas.
Les intérêts économiques plus forts que la politique
Dans le cas de la Ligue arabe, le recul peut s'expliquer surtout par l'incapacité de ses membres à  faire tout simplement respecter leurs décisions. A ce propos, il y a lieu de constater que le fameux consensus arabe à  propos duquel se gargarisait, il y a quelques jours encore le Qatar, s'est lézardé. La preuve ' Intérêts obligent, la Jordanie a fini par obtenir l'accord de l'organisation panarabe pour exclure des sanctions visant la Syrie, le commerce et les vols aériens entre Amman et Damas. Amman a en effet trop à  perdre en appliquant les sanctions votées le 27 novembre dernier contre Damas.
Il faut savoir que le commerce entre la Jordanie et la Syrie représente un total de 7 milliards de dollars depuis 2000.
Il s'agit là de statistiques du royaume hachémite. Sur les 9 premiers mois de 2011, les échanges commerciaux entre les deux pays étaient évalués à  550 millions de dollars. La compagnie aérienne jordanienne Royal Jordanian (RJ) a deux vols quotidiens, l'un vers Damas et l'autre vers Alep (nord). Stopper d'un coup les échanges avec la Syrie serait tout simplement suicidaire pour un pays qui, comme la Jordanie, est aussi au bord de la crise sociale. Idem pour le Liban et l'Irak qui n'ont pas approuvé la conduite imprimée à  la Ligue arabe par le Qatar et la Turquie. A eux seuls, ces deux pays peuvent permettre à  Damas de continuer à  respirer économiquement pendant longtemps encore.  En tout état de cause, Bachar Al Assad semble assez bien connaître les limites de l'action arabe commune. C'est la raison pour la laquelle, il se permet depuis près de deux semaine de jouer à  cache-cache avec la Ligue arabe.
Mieux, Damas a exigé mardi la levée des sanctions arabes pour recevoir des observateurs de la Ligue arabe en Syrie où les violences avaient pourtant fait plus de 100 morts en l'espace de trois jours.
Al Assad se sent tellement en confiance qu'il s'est permis hier d'accorder un long entretien à  la chaîne de télévision américaine ABC News dans lequel il a indiqué n'accorder aucun crédit au bilan de 4000 morts avancé par l'ONU. «Qui a dit que l'ONU était une institution crédible '», s'est-il interrogé. Quant à  la Ligue arabe, il n'en a même pas parlé.
 


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