Algérie - Revue de Presse

Le Conseil de sécurité autorise le recours à la force contre le régime libyen: Une guerre contre la guerre


Jeudi soir, les Nations unies ont décidé d'autoriser le recours à la force contre le régime de Mouammar Kadhafi, ouvrant

en même temps la voie pour des frappes aériennes ciblées.

Sinon une intervention militaire massive en Libye. C'est un peu le scénario qui s'était passé pour l'Irak, en 2003, sauf que la Résolution 1973 de jeudi soir a étonné plus d'un, non pas par son contenu mais par la facilité avec laquelle elle a été votée. En fait, contrairement à ses habitudes, aucun veto n'a été opposé lors du vote sur la Libye au Conseil de sécurité de l'ONU. L'Organisation a ainsi autorisé le recours à la force contre l'armée de Mouammar Kadhafi, ainsi que des opérations militaires qui pourraient être lancées «en quelques heures», notamment être menées par la France, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et plusieurs pays arabes. Et, par dix voix pour et cinq abstentions, le Conseil de sécurité des Nations unies s'est aussi prononcé pour l'instauration d'une zone d'exclusion dans le ciel libyen. La Grèce et le Canada ont apporté leur soutien. Car ce qui frappe dans la Résolution 1973, c'est bien le fait que la Russie, qui s'est abstenue de voter (pour ou contre), ainsi que la Chine n'ont pas fait prévaloir leur droit de veto. Une exception inouïe pour ces deux pays qui ont armé jusqu'à présent l'armée libyenne, notamment pour son aviation puisée du complexe militaro-industriel soviétique, puis russe. Pour autant, il est inconcevable, avec les bouleversements politiques actuels dans le monde, qu'un régime honni comme celui de Kadhafi par la communauté internationale puisse avoir une quelconque sympathie, même auprès de ses plus fidèles ou traditionnels soutiens. Par contre, le vote de l'ONU sur la Libye a consacré, une fois encore, une belle division au sein de l'axe atlantique, après l'abstention de l'Allemagne, contrairement à la France et la Grande Bretagne.

Classiques divisions européennes

L'Allemagne s'est abstenue lors du vote de la résolution onusienne présentée et soutenue par Washington, Londres et Paris. Par ce refus, l'Allemagne a réaffirmé ses fortes réserves quant à de possibles opérations militaires. «Nous restons éminemment sceptiques sur cette option. (...) Nous y voyons des risques et des dangers considérables», a indiqué son ministre des Affaires étrangères Guido Westerwelle. La France a regretté ouvertement l'attitude de son partenaire allemand sur le dossier libyen. «On avait déjà été déçu au Conseil européen de ne pas avoir vu les Allemands nous accompagner avec les Britanniques dans cette démarche», a précisé le porte-parole du gouvernement français, François Baroin, en référence à la dernière réunion de l'UE du 11 mars. La réunion de l'ONU a même été marquée en coulisses par une franche explication, le président français Nicolas Sarkozy et le Premier ministre britannique David Cameron reprochant vivement à la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, de ne pas assez s'engager en faveur d'une intervention militaire, selon plusieurs diplomates. C'est à ce niveau que nombre d'observateurs n'ont pas pu s'empêcher de faire le parallèle avec ce qui s'était passé en 2003, lors du vote pour une intervention militaire contre l'Irak. Et, certains estiment que ces tiraillements sur la Libye rappellent le spectre de 2003, lorsqu'une franche opposition était née en Europe entre partisans et opposants d'une intervention contre Saddam Hussein. A l'époque, le Royaume-Uni, l'Italie, l'Espagne, la Pologne et la République tchèque étaient dans le premier camp. L'Allemagne et la France côte à côte dans le deuxième. Les divisions se sont déplacées pour le cas de la Libye : la France, la Grande-Bretagne, le Danemark et la Pologne militent pour la manière forte, alors que l'Allemagne, la Suède et l'Italie traînent des pieds. La base italienne de Sigonella, en Sicile, devrait quand même être mise à contribution, les Français pouvant eux utiliser leur base de Solenzara, en Corse du sud. Outre l'Allemagne, la Russie et la Chine se sont tous abstenus, lors du vote des Nations unies jeudi soir. La participation de la Russie à une opération militaire en Libye est «exclue», a déclaré vendredi le chef de l'état-major de l'armée russe, le général Nikolaï Makarov. Quant aux Chinois, ils ne se sont pas encore exprimés à la suite de leur abstention. Mais, depuis quelques jours, le message est déjà passé: ils n'interviendront pas militairement en Libye.

Le vote de l'ONU autorise toutes les options

Le Conseil de sécurité de l'ONU a, par ailleurs, autorisé «toutes les mesures nécessaires» - ce qui veut dire en langage diplomatique des actions militaires - pour assurer la protection des populations civiles face à l'armée régulière libyenne. La résolution demandait, notamment, l'établissement immédiat d'un cessez-le-feu et l'arrêt complet des violences et de toutes les attaques contre des civils. A défaut, elle autorise «toutes les mesures nécessaires» pour protéger les civils et imposer un cessez-le-feu à l'armée libyenne. Elle prévoit aussi une zone d'exclusion aérienne mais précise qu'il n'est pas question d'occupation militaire. Le texte de résolution prévoit également un renforcement des sanctions existantes: embargo sur les armes, gel des avoirs du n°1 libyen et de ses proches, ouverture d'une procédure devant la Cour pénale internationale (CPI) contre les responsables de crimes contre l'humanité. Les déclarations de Kadhafi qui avait averti, quelques heures avant le vote, que ses forces entreraient dans la soirée dans Benghazi, et qu'elles ne feraient preuve d'aucune miséricorde pour quiconque leur résisterait, ont-elles accéléré le vote pour le recours à la force ? En tout cas, l'option militaire est déjà prise. Lors d'un entretien téléphonique, dans la nuit de jeudi à vendredi, le président américain Barack Obama, le Premier ministre britannique David Cameron et le chef de l'Etat français se sont mis d'accord pour se «coordonner étroitement dans les prochaines étapes» et «continuer à travailler avec les partenaires arabes et les autres partenaires internationaux».

En outre, les Etats-Unis (avec 34 Awacs), la Grande-Bretagne (7) et la France (4) possèdent assez d'avions-radars pour mener l'opération sans avoir besoin des 17 appartenant en propre à l'Otan et basés en Allemagne. Immédiatement après l'annonce du vote de l'ONU, une foule en liesse à Benghazi, un des derniers fiefs de l'opposition, agitant des drapeaux tricolores datant de la monarchie, s'est rassemblée dans le centre-ville pour saluer bruyamment le vote aux Nations unies.

25 morts dont des enfants vendredi à Misrata

Après une nuit de tirs à l'arme lourde et avec des chars, les bombardements avaient repris vendredi à Misrata, située à 200 km à l'est de Tripoli et contrôlée par l'opposition. «Des dizaines de bombes de toutes sortes s'abattent sur la ville depuis hier soir», selon un porte-parole des insurgés. Selon la chaîne de télévision al-Arabiya, ces combats auraient fait 25 morts, dont plusieurs fillettes, selon un médecin de l'hôpital de la ville. Des combats ont également eu lieu jeudi soir et vendredi matin à Nalout et Zenten, deux villes de l'ouest libyen sous contrôle de l'opposition, entre des forces loyales à Kadhafi et les insurgés, selon des habitants. À Zenten, les affrontements ont fait des victimes des deux côtés, selon un riverain. À Nalout, la situation est revenue au calme vendredi après une attaque réussie des insurgés contre une position des loyalistes la veille. Les insurgés auraient saisi des armes et des munitions sur place et fait prisonniers plusieurs militaires, selon l'opposition. Plus à l'est, Benghazi craint de subir le même sort que Misrata. Selon la chaîne al-Jazira qui rapportait vendredi matin des propos du fils de Mouammar Kadhafi Seif al-Islam, l'armée libyenne avait prévu de se déployer autour de ce bastion des insurgés, sans y pénétrer, et des unités antiterroristes devaient y être envoyées pour désarmer les insurgés. Les forces gouvernementales devaient en outre aider les habitants à quitter la ville, a ajouté Seif al-Islam selon la chaîne qatarie.

Cessez-le-feu : un bluff de plus de Kadhafi ?

La Libye «a décidé d'observer immédiatement un cessez-le-feu et de mettre fin à toutes les opérations militaires», a annoncé le ministre libyen des Affaires étrangères Moussa Koussa lors d'une conférence de presse. Il a affirmé que son pays, étant membre à part entière des Nations unies, était «contraint d'accepter la résolution du Conseil de sécurité». Sceptique, le commandant des insurgés libyens, Khalifa Heftir, a estimé que le cessez-le-feu annoncé n'était «pas important» et qu'il s'agissait d'un coup de «bluff» de Mouammar Kadhafi. L'annonce d'un cessez-le-feu immédiat est, par ailleurs, accueillie avec beaucoup de prudence au sein des pays qui ont poussé pour le vote de la Résolution 1973, dont la France qui prépare une intervention militaire qui serait imminente. L'Union européenne est en train «d'examiner» les détails de l'annonce de cessez-le-feu par le régime libyen, a indiqué de son côté la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, en soulignant qu'il fallait s'interroger sur sa «signification». La communauté internationale «ne va pas se laisser tromper» par le régime libyen» et va vérifier par tous les moyens «le degré de respect» de la résolution de l'ONU sur la Libye, a affirmé le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero. Une ultime réunion est prévue aujourd'hui à Paris entre des représentants de l'Union africaine, l'UE et l'ONU. Enfin, la Libye aurait fermé vendredi son espace aérien, selon Eurocontrol, agence qui gère le trafic aérien en Europe, ce que tripoli a démenti. Enfin, des frappes aériennes seraient imminentes, selon plusieurs agences de presse.


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