Algérie

Le cireur de Brahim-Fatah Temporal


Le cireur de Brahim-Fatah                                    Temporal
Octobre, le mois de tous les souvenirs qui reviennent à l'esprit pour restituer au passé le droit à l'hommage qui lui incombe. Ce n'est pas juste la rentrée des classes, cette date prétorienne conçue pour les indigènes regagnant les bancs de l'école Brahim-Fatah, c'est aussi un nom qui continue de résister aux aléas du temps, et à l'oubli. Non loin de la célèbre ''Koudia'' de Sidi-Ramdane, la citadelle avait, désormais, rendez-vous avec un autre combat sur la culture. Le dernier des normaliens après Mohamed Ben Cheneb et Ismaïl Bouderba, défenseurs de la medersa et l'émancipation de la femme algérienne : Brahim Fatah. Ce dernier a forcé le destin pour imposer à l'administration coloniale la baptisation d'une école qui accueillit plus de deux générations d'élèves rompus aux activités nationalistes. Un tribun hors pair qui sut rendre politesse à son rival, Jules Ferry, le champion de l'école laïque. Dans les premiers balbutiements du combat politique sur le nationalisme algérien, les anges gardiens du patrimoine culturel ont élu domicile dans le « Nadi », centre culturel des réformistes pour s'inscrire en faux contre le bannissement de la langue arabe dans le programme éducationnel « des indigènes ». Dans cette atmosphère de fronde, les petits cireurs de l'ex-Square Bresson déambulaient à travers les rangées de tables du Tantonville en quête de chaussures mal polies. Dans leur boîte à outils, la boîte de cirage, une brosse et un cahier crasseux contenant en lettres majuscules le nom commun d'un élève scolarisé à l'école Brahim-Fatah. C'est un peu les anges aux visages sales, James Cagney n'avait pas peine à se reconnaître à ces kids de la Casbah. L'automne, la saison des feuilles mortes révélait au grand jour un malaise naissant dans les regards, la senteur du charbon présageant une année de braise qui alla enflammer une cour d'école abritant des pensionnaires pas comme les autres. Les premiers militants, arrêtés par la police française viennent tout droit de l'école Brahim-Fatah. C'était une véritable revolt academy. Dans ce petit carré de résistance, la grandeur des hommes faisait son chemin. Le déclenchement de la lutte armée a trouvé écho dans ce vivier de potaches troquant leurs maigres effets scolaires misérablement rangés dans un sac de jute pour le premier baptême du feu. Le petit Yacef avait à peine treize ans en ce mois d'octobre 1957, jour de la rentrée scolaire... Il avait rendez-vous avec l'Histoire.
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