Algérie

Le Chili va choisir entre deux projets de société



Le Chili est appelé, demain, à choisir entre deux projets de société radicalement opposés au second tour de la présidentielle: Etat-providence et progrès social ou maintien du modèle économique néolibéral et conservatisme idéologique. Les derniers sondages autorisés 15 jours avant le scrutin et ceux diffusés sur les réseaux sociaux placent les deux finalistes au coude-à-coude. Le député à la tête d'une coalition de gauche, Gabriel Boric, souhaite instaurer un système redistributif dans le pays le plus inégalitaire de l'OCDE. Et José Antonio Kast, avocat d'extrême droite, défend le maintien du libre marché avec une vision ultraconservatrice en matière sociale. Avocat de 55 ans, M. Kast a remporté le premier tour le 21 novembre avec 27,9% des suffrages, devant M. Boric, 35 ans, l'âge minimum pour concourir à la présidentielle (25,8%). Les deux partis dominants de centre-gauche et centre-droit qui ont gouverné le Chili depuis la fin de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990) ont été balayés, arrivant en quatrième et cinquième position. La progression spectaculaire de M. Kast depuis sa quatrième place en 2017 (7,93%) est en partie dû à l'effondrement de la droite libérale au pouvoir et le rejet de l'actuel président Sebastian Piñera, qui achève son second mandat (2010-2014 puis depuis 2018). Une coalition de droite soutient désormais Antonio Kast, membre d'un mouvement catholique conservateur opposé à l'avortement. S'il a quelque peu modéré son discours entre les deux tours, renonçant notamment à supprimer le ministère de la condition féminine, il maintien son projet de création d'un «fossé» aux frontières pour empêcher l'immigration clandestine, son cheval de bataille. En matière économique il propose de réduire les dépenses publiques, diminuer les impôts aux entreprises afin d'attirer les investissements et le maintien du système de retraite privé.Gabriel Boric veut, lui, la fin de ce système de retraite par capitalisation, principale revendication des manifestations sociales de 2019, et la mise en place d'un système de santé universel. Le député à la tête de la coalition de gauche, qui inclut le Parti communiste, veut ainsi incarner une transformation radicale du Chili.Mais il a tempéré son discours d'entre deux tours pour capter des voix au centre. Il maintient toutefois sa proposition d'augmenter les impôts des plus riches pour financer ses projets redistributifs. «La plupart des Chiliens qui votent (...) iront guidés par la peur», a estimé Michael Shifter, président de l'Inter-American Dialogue à Washington. Soit «parce qu'ils ne veulent pas d'un Chili plus à droite (sous Kast), soit parce qu'ils ont peur que Boric soit contrôlé par le parti communiste et que le pays devienne un autre Venezuela». L'analyste Patricio Navia, de l'université de New York, explique que «beaucoup de gens ne sont pas à l'aise avec les choix qui restent» car «les candidats modérés ne sont pas arrivés au second tour». Consuelo de la Riva Dutzan, infirmière de 47 ans, craint, quel que soit le vainqueur, «un conflit plus grand que celui que nous avons déjà depuis deux ans». Mais «pour moi, le moins mauvais est Boric, au moins il défend les femmes», dit-elle, «l'autre (...) me fait peur». Avec une abstention traditionnellement élevée au Chili (47% au 1er tour), la clé de ce scrutin sera la captation des voix au centre et la mobilisation des électeurs indécis.
Tout ce que Kast dit, c'est la «continuation» de Pinochet» et les jeunes «devraient aller voter en sachant ce que leurs parents ont vécu», affirme Camila Chamblas, 26 ans, assistante sociale auprès d'enfants autistes. «Sans relâche, j'essaie de convaincre d'aller voter», dit-elle. Le vainqueur de cette présidentielle n'aura de toutes façons pas les coudées franches, avec un Parlement à l'équilibre (égalité de 25 sénateurs à la Chambre haute et 79 députés de gauche contre 76 de droite à l'Assemblée). Il sera confronté à un scénario économique complexe: après la vigoureuse reprise de 2021, la croissance devrait ralentir dans un contexte d'inflation et une dette publique qui s'est creusée pendant la pandémie.


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