Algérie

Le capital symbolique



Trump l'a décidé, Netanyahu l'a voulu et leurs sous-fifres du monde arabe n'avaient qu'à exécuter. Le plus zélé d'entre eux, bombardé du titre de "Chef de fil", est sans aucun doute le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane (MBS). Accentuant sa campagne anti-iranienne, et voulant impliquer le maximum de pays (mission accomplie avec le Maroc et le Liban) et de personnes, le royaume wahhabite vient d'ajouter une autre victime à son tableau de chasse.Connu pour ses positions fermes contre l'extrémisme religieux et par ces interventions réputées pour leur modération, Adnan Ibrahim, a subitement "viré" et se retrouve à défendre ceux qu'ils n'a pas cessé de critiquer des années durant. Cet islamologue autrichien, d'origine palestinienne, est devenu subitement « persona no grata » pour ses partisans (qui étaient très nombreux) et ses ennemis. En quelques jours sa vie a totalement basculé.
Tout commencera par une rencontre diffusée sur une chaine saoudienne, « Rotana Khalidjia », le 02 mai dernier, et dans laquelle il a fait de surprenantes déclarations. Pourfendeur de la famille royale saoudienne, Adnan Ibrahim se transforme en un défenseur zélé de MBS ! Mieux encore, et c'est ce qui semble être la priorité de la transformation, l'islamologue, qui a de tout temps soutenu la position de Téhéran, critique l'Iran ouvertement.
Adnan Ibrahim ©D.R
Cette sortie cathodique a déclenché la colère de ses partisans sur les réseaux sociaux. D'idole Adnan Ibrahim s'est rapidement transformé en paria. Les critiques et les insultes fusaient de partout et de tous les pays arabo-musulmans. Evidemment ses partisans l'ont rapidement renié et regrettaient d'avoir cru en lui pendant tant d'années. par contre ses détracteurs (essentiellement de la mouvance salafo-wahhabite) se frottaient les mains. Tous étaient unanimes sur le fait que Adnan Ibrahim n'a renié ses convictions qu'en échange d'argent et d'avantages. De graves accusations devant lesquelles il n'a rien pu faire. Isolé et décrié, voilà que quelques jours après l'islamologue était interdit d'antenne sur les chaînes TV...saoudiennes! Ainsi la mission des officines wahhabites étant accomplie. Il était question de discréditer un modéré et, en même temps, son discours axé sur les lumières. Son revirement médiatisé a suffit pour remettre en cause tout le travail accompli durant plusieurs années par Adnan Ibrahim .
Le tenter, le convaincre, le gagner à sa cause, et après s'en débarrasser. Tel a été le "cheminement" des services de MBS. Le directeur du Centre arabe de recherches et d'analyses politiques et sociales de Genève (Suisse), Riadh Sidaoui, l'a bien résumé dans une de ses dernières interventions sur sa chaîne Youtube: "Il a été acheté et jeté en une semaine!". Le tunisien n'a d'ailleurs pas été tendres sans sa "lecture" du cas de Adnan Ibrahim. Ne cachant ni sa déception ni sa colère, Riadh Sidaoui est allé évoquer l'un des concepts clés du sociologue Pierre Bourdieu. Avec cette histoire, Adnan Ibrahim, a surtout perdu son capital symbolique, acquis auparavant, désormais perdu, et qu'il ne pourra plus jamais reprendre même avec des milliards de dollars. La légitimité et le respect d'avant ne seront plus lié au nom de l'islamologue, au grand désespoir de plusieurs personnes qui ne cessaient pas de lui faire des louanges. S'il avait sacrifié tout ça pour de l'argent, sa mise à l'écart par les télés saoudiennes vient d'un coup lui faire perdre le capital financier.
Cette subtile "disqualification" de Adnan Ibrahim survient juste après celle d'une autre victime de MBS. Cette fois il s'agit d'un homme politique, Saad Hariri. Le premier ministre libanais, et après sa rocambolesque histoire de démission et de kidnapping de novembre dernier (le tout orchestré par le Royaume Saoudien), se retrouve dans le banc des perdants. S'affichant plus pro-saoudien que les plus fervent des wahhabites, Saad Hariri, après avoir perdu son capital symbolique, vient de perdre son capital électoral, en perdant, il y a deux semaines, les élections législatives devant le Hezbollah.
C'est ainsi indéniable que tout ce que touche le prince héritier saoudien est, tôt ou tard, "grillé". La feuille de route de MBS est loin d'être à sa phase finale et d'autres soubresauts surviendront. Le pire est à venir.
Le Yémen bombardé, la Syrie anéantie, le Bahrein anesthésié, le Qatar isolé, le Hezbollah et l'Iran ciblés, la liste des pays qui on eu à subir l'arrogance du royaume saoudien est bien longue. Celle des personnes s'allonge de plus en plus. Les pétrodollars et la propagation des idées extrémistes font gagner du terrain à MBS et à ses mentors. Devant cette déconcertante facilité de man?uvre wahhabite dans les pays arabo-musulmans, presque aucune force de riposte n'est "visible". Pourtant les prémices d'un prochain embrasement total sont bien visibles.
Salim KOUDIL
@Salim Koudil


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